“Cette institution est le mécanisme
même par lequel les rêves de la Droite fanatique et de la Gauche
fanatique prennent corps »
La
Banque centrale américaine, appelée Réserve
Fédérale, a été créée en 1913.
Personne n’a encouragé cette institution avec pour slogan de
rendre les guerres plus probables et de garantir que presque un demi-million
d’Américains mourraient sur les champs de bataille
étrangers, tout comme d’ailleurs des millions de soldats
et de civils étrangers.
Personne
n’a jamais souligné le fait que cette institution permettrait au
gouvernement américain d’établir un empire global qui
ferait apparaître les empires romain et britannique comme inoffensifs
en comparaison.
Vous
pourriez aligner 100 historiens spécialistes des guerres et chercheurs
en sciences politiques professionnels pour parler du 20ème
siècle et il est probable qu’aucun d’entre eux ne
mentionne le rôle de la Fed dans le financement du militarisme
américain. Et pourtant, c’est vrai : la Fed est
l’institution qui a créé la monnaie finançant les
guerres. Dans ce rôle, elle a résolu un problème majeur
auquel avait été confronté l’Etat durant toute
l’histoire humaine. Un Etat sans argent ou bien un Etat qui doit taxer
ses citoyens pour lever l’argent nécessaire à ses
campagnes est obligatoirement limité dans ses ambitions
impérialistes. Gardez bien en tête que ceci est uniquement un
problème pour l’Etat. Ce n’est pas un problème pour
le peuple. L’incapacité de l’Etat à financer ses
ambitions illimitées possède davantage de valeur pour le peuple
que toute autre forme de vérification ou d’équilibre
légal. Elle a plus d’importance que toutes les constitutions
jamais élaborées.
L’Etat
ne possède pas de richesses propres. Ce n’est pas une entreprise
profitable. Tout ce qu’il possède doit être pris à
la société dans un jeu à somme nulle. Cela signifie habituellement
des impôts, mais les impôts ennuient les gens. Ils peuvent
déstabiliser l’Etat et menacer sa légitimité. Ils
inspirent la colère, la révolte et même la
révolution. Plutôt que de risquer ce résultat,
l’Etat, depuis le Moyen Age et jusqu’à l’aube de la
naissance des banques centrales a été très prudent dans
ses ambitions globales et ce, tout simplement parce qu’il devait
montrer la plus grande prudence à voler ouvertement et directement le
peuple pour payer ses factures.
Il
est certain qu’une banque centrale n’est pas nécessaire
pour qu’un Etat choisisse l’inflation plutôt que la
taxation comme instrument de financement. Tout ce qu’il faut,
c’est un monopole de production de la monnaie. Une fois acquis, le
monopole de production de la monnaie mène à un processus
systématique de dépréciation de la monnaie que ce soit
par baisse de la teneur en métal des pièces, par la
dévaluation ou bien par l’introduction du papier monnaie qui peut
ensuite être imprimé sans aucune limite. La banque centrale soutient
ce processus d’une manière décisive : elle
cartellise le système bancaire, le conduit essentiel par lequel la
monnaie est prêtée au public et au gouvernement lui-même.
Le système bancaire devient de cette manière l’agent
principal de financement de l’Etat et en échange de ses services
obtient une garantie contre le risque d’insolvabilité et de
faillite, en profitant de l’inflation. Si le but de l’Etat est
une monopolisation complète de la monnaie dans un système de
monnaie-papier totalement flexible, il n’existe pas de meilleure voie
pour l’Etat que la création d’une banque centrale.
C’est la plus grande réalisation pour la victoire du pouvoir sur
la liberté.
Le
lien entre la guerre et l’inflation, alors, date de bien avant la
création de la Réserve Fédérale. En fait, il date
de la création des Etats-Unis eux-mêmes. Le destin de la monnaie
continentale pendant et après la guerre de Révolution par
exemple, était un très mauvais présage pour notre futur
et le pays dans son ensemble a payé un lourd tribut. C’est cette
expérience qui a conduit par la suite à la « clause
or » de la Constitution. Excepté les partisans
d’Hamilton, cette génération complète de
politiciens comprit le lien unissant la liberté et une monnaie saine
et considérait le papier-monnaie comme la sève de la tyrannie.
Voyez
Thomas Paine:
Le
papier-monnaie c’est comme boire par petites gorgées : cela
apaise un moment la soif par une sensation trompeuse mais diminue aussi la
chaleur naturelle et laisse le corps dans un état pire qu’on ne
l’a trouvé. Si tel n’était pas le cas, et que la
monnaie pouvait être créée selon son bon plaisir, chaque
souverain d’Europe serait aussi riche qu’il le
souhaiterait…le papier-monnaie constitue à première vue
une grande économie ou plutôt ne semble rien coûter, mais
c’est la monnaie la plus chère qui soit. La facilité avec
laquelle elle est émise par une assemblée au départ sert
à emprisonner le peuple finalement. Elle opère comme
anticipation des impôts futurs.
Mais
la sagesse de cette génération, attaquée par Lincoln, a
finalement été jetée par-dessus bord pendant
l’époque progressiste. On a cru qu’une époque
prônant une politique publique scientifique avait besoin d’une
machinerie scientifique produisant de la monnaie contrôlée par
une élite puissante. L’aube de l’âge de la Banque
Centrale était aussi l’aube de la planification centrale et il
ne pouvait y avoir de contrôle du gouvernement sur le commerce de la
nation sans avoir d’abord un contrôle de la monnaie. Et une fois
l’Etat maître de la monnaie et du système bancaire, il
peut donner libre cours à ses ambitions.
Avant
la création de la Réserve Fédérale,
l’idée d’une entrée dans le conflit qui allait
devenir la première guerre mondiale aurait été
inconcevable. En fait, c’était une idée hautement impopulaire
et Woodrow Wilson lui-même avait fait
campagne avec un programme qui promettait de nous tenir en dehors de la
guerre. Mais avec un monopole monétaire, tout semblait possible. Il
n’a fallu que quatre années après la création de
la Fed en guise de planification politique scientifique pour que
l’objectif réel devienne évident. La Fed permettrait
le financement de l’entrée des USA dans la première
guerre mondiale.
Ce
n’était pas l’entrée en guerre seule qui
était rendue possible. La première guerre mondiale était
aussi la première guerre totale. Elle impliquait presque toutes les
nations du monde civilisé et non seulement leurs gouvernements mais
aussi les populations civiles, en tant que combattants et cibles. On a
écrit que cette guerre a mis une fin à la civilisation dans le
sens où l’on entendait ce terme au 19ème
siècle. Cela signifie que c’est cette guerre-là qui a mis
un terme à la liberté telle que nous la connaissions.
Réfléchissant
sur la calamité représentée par cette guerre, Ludwig von Mises écrivit en 1919
On
peut dire sans exagération que l’inflation est un instrument
indispensable au militarisme. Sans elle, les répercussions de la
guerre sur la prospérité deviennent évidentes beaucoup
plus rapidement et de manière plus incisive, la lassitude de la guerre
commencerait beaucoup plus tôt.
Il
y a toujours un prix à payer pour le financement offert par la banque
centrale. La situation d’après-guerre aux Etats-Unis en
Amérique est un cas classique. Il y avait de l’inflation. Il y
avait des dislocations massives. Il y avait une récession ou ce que
l’on appelait alors récession, un résultat direct de la
dislocation du capital qui masquait un boom économique mais qui fut
ensuite suivi d’une crise. La dépression frappa en 1920 mais ce
n’est pas un événement fameux de l’histoire
économique des Etats-Unis. Pourquoi ? Parce que la Réserve
Fédérale n’avait pas encore acquis les moyens de produire
un plan de sauvetage de l’économie. A la place, ni la Fed ni le
Congrès ni même le président n’aimaient beaucoup
cette idée, une réponse digne de louanges. Le résultat,
une dépression courte qui devint une note de bas de page de
l’histoire. La même chose aurait pu avoir lieu en 1930 si Hoover
n’avait pas tenté d’utiliser le gouvernement comme moyen
de réanimation.
“L’aube
de l’ère de la Banque Centrale était aussi l’aube
de la planification centrale et il ne pouvait y avoir de contrôle du
gouvernement sur le commerce de la nation, sans contrôle de la monnaie
d’abord. »
Malheureusement,
la convalescence sans histoires de 1920-1922 donna à la banque
centrale la tentation de revenir vers l’inflation avec, comme
résultat, un marché des actions en hausse suivi d’une
crise et d’une dépression et, finalement, la destruction de
l’étalon-or lui-même. FRD [Franklin D. Roosevelt] en
conclut que même la planification économique de style
fasciste et l’inflation ne pouvaient restaurer la
prospérité, il se tourna vers cette vieille méthode qui
consiste à rechercher un conflit dans lequel entrer. C’est ici
que l’histoire des USA et de la Fed croise celle tragique de la banque
centrale allemande.
Le
gouvernement allemand avait également financé sa grande guerre
grâce à l’inflation. A la fin de la guerre, la circulation
avait atteint le quadruple d’avant-guerre. Les prix avaient
augmenté de 140%. Pourtant sur le plan international, le Mark allemand
n’avait pas souffert comme on aurait pu s’y attendre. Le
gouvernement allemand trouva cela encourageant et promptement, se mit à
fabriquer une guérison complète au moyen de l’inflation.
De manière incroyable, en 1923, le Mark était tombé
à un millier de milliardième (1/1012) de sa valeur or de 1914.
Le dollar valait alors 4 200 milliards de Marks. C’est un exemple
de destruction de la monnaie qui est demeuré légendaire dans
l’histoire du monde – et tout cela fut rendu possible par une
banque centrale obligeante envers le gouvernement et monétisant ses
dettes de guerres.
Mais
est-ce que les gens s’en prirent à la planche à
billets? Non, l’explication populaire relie ce
phénomène directement au Traité de Versailles.
C’est la dure paix imposée par les alliés qui avait
amené l’Allemagne au bord du gouffre de la destruction totale,
ou voilà ce qu’on croyait. Mises lui-même écrivit un
livre entier qui, espérait-il, expliquerait que
l’Allemagne devait ses souffrances à la guerre et au socialisme
et non pas à Versailles en tant que tel. Il demandait instamment au
peuple allemand de rechercher les causes véritables et d’établir
des marchés libres, au risque que la dictature impériale ne se
révèle être le prochain stade du développement
politique. Mais il fut ignoré.
Le
résultat, comme nous le savons tous, fut l’avènement
d’Hitler.
Si
l’on se tourne vers la Russie, la vérité cachée
à propos de la révolution bolchévique, c’est que
l’instrument de propagande le plus efficace de Lénine incluait
les souffrances du peuple russe pendant la première guerre mondiale.
Les hommes furent appelés et tués à un niveau horrible.
Lénine a appelé cela une exploitation capitaliste, appellation
fondée sur le fait que la guerre résultait de motifs
capitalistes. En fait, c’était seulement un aperçu du
monde que le socialisme amènerait, un monde dans lequel tout le peuple
et toute la propriété seraient traités comme instruments
vers des buts étatistes. Et ce qui avait permis la prolongation du
rôle de la Russie dans la première guerre mondiale,
c’était une institution créée en 1860
appelée la Banque d’Etat de l’Empire Russe, une version
russe de la Fed.
La
guerre russe elle-même avait été financée par la
création monétaire, qui avait conduit à des
augmentations de prix, des contrôles et des restrictions pendant la
guerre. Je ne partage pas l’opinion, à la différence des
néoconservateurs que la monarchie russe fut un régime
particulièrement mauvais, mais la tentation créée par la
machine à faire de l’argent était trop importante. Elle
transforma une monarchie relativement inoffensive en une machine de guerre.
Un pays qui avait été longtemps intégré dans une
division internationale du travail et qui était sous
l’étalon-or est devenu une machine à tuer. Et si horrible
et catastrophique que furent les morts pour le moral des Russes,
l’inflation affectait chaque personne particulière et a
inspiré une inquiétude massive qui a conduit au triomphe du
communisme.
A
cette intersection de l’histoire, nous pouvons observer ce que les
banques centrales nous ont apporté. Non pas la fin des cycles
conjoncturels. Mais tout simplement plus de liquidité pour le
système bancaire. Pas la fin des ruées et des paniques
bancaires. Pas une politique publique scientifique. Les économies
mondiales les plus importantes devenaient sujettes des monopoles
monétaires et leurs dirigeants une sorte de despote les plus mauvais
de l’histoire du monde. Maintenant, ils se préparaient
à se battre avec toutes les ressources à leur disposition. Et
pour les ressources qu’ils n’avaient pas, ils se les
procureraient avec leur instrument préféré : la
banque centrale.
En
temps de guerre, la planche à billets tournait sans arrêt mais
avec le niveau totalitaire de rationnement, de contrôle des prix et de
socialisation complète des ressources du monde occidental, le
résultat de l’inflation ne fut pas simplement
l’augmentation des prix. Ce furent de grandes pénuries et de
grandes souffrances en Grande-Bretagne, en Russie, en Allemagne, en Italie,
en France, en Autriche-Hongrie, aux Etats-Unis et on peut dire sur presque
toute la planète.
“On peut dire sans exagérer que
l’inflation est le moyen indispensable du militarisme. »
–
Ludwig von Mises
Ainsi
donc, nous pouvons observer ici l’ironie étonnante de la banque
centrale à l’œuvre. L’institution promue par les
économistes en coopération avec les banquiers (qui devait
apporter rationalité et science pour canaliser les problèmes
monétaires) a donné naissance aux plus mauvais des trends
politiques de l’histoire du monde : le communisme, le socialisme,
le fascisme, le nazisme, et le despotisme de la planification centrale sur
l’occident capitaliste. L’histoire des banques centrales est une
étape que l’on a retirée de l’histoire des bombes
atomiques et des camps de la mort. Il y a une raison pour laquelle
l’Etat ne connait plus de restrictions ces cents dernières
années et cette raison, c’est précisément celle
que de nombreuses personnes considèrent comme étant purement
technique et trop complexe pour le commun des mortels.
Avance
rapide sur la guerre d’Iraq qui possède toutes les
caractéristiques d’un conflit né du pouvoir
d’imprimer de l’argent. Il fut un temps où la
décision de partir en guerre impliquait un véritable
débat au Congrès américain ou aux Communes britanniques.
Et de quoi débattait-on ? Des ressources disponibles et de la
possibilité de taxer. Mais une fois le pouvoir exécutif
débarrassé de la nécessité de compter sur les dollars
provenant des impôts et n’ayant plus à
s’inquiéter de rechercher d’éventuels acheteurs
volontaires pour ses instruments de dettes non garantis, le débat
politique était étouffé.
Dans
la course pour la guerre, Georges Bush a juste assumé comme
étant un acte politique, le fait de décider seul
d’envahir l’Iraq. Les objections de Ron Paul et d’autres
membres du Congrès et d’un grand nombre
d’Américains ont été réduites à un
brouhaha, semblable à bruit de fond. Imaginez qu’il ait dû
dégager cet argent pour la guerre par des taxes. Elle n’aurait
jamais eu lieu. Mais il n’avait pas à le faire. Il savait
qu’il aurait de l’argent. En dépit de $200 milliards de
déficit et de 9 000 milliards de dettes et 5 000 milliards
d’instruments de financement/de dettes détenus par le public, un
budget de 3 000 milliards de dollars et des recettes fiscales en baisse
en 2001, Bush contemplait une guerre qui avait coûté 525
milliards de dollars ou 4 681 dollars par ménage. Imaginez
qu’il doive aller demander au peuple américain cette somme. Que
serait-il arrivé ? Et ça, ce sont des chiffres
gouvernementaux, le coût réel de la guerre est peut-être
de 20 000 dollars par ménage.
Or,
quand les libéraux de gauche parlent de ces chiffres, ils aiment
à les comparer à ce que l’Etat aurait pu faire s’il
avait dépensé ces sommes dans la sécurité
sociale, les écoles publiques, les programmes de maternelles pour
enfants défavorisés, ou les bons de nourriture. Ceci est une
erreur, car cela démontre que la gauche ne propose pas
véritablement d’alternative à la droite. Elle a seulement
un ordre différent de priorités pour dépenser les
ressources acquises grâce à la machine à inflation. Il
est vrai que les écoles publiques sont moins chères en termes
de vies et de propriété que la guerre. Mais un Etat providence
financé par l’inflation a également un effet corrosif sur
la société. La chimère que le monstre de
l’inflation peut-être utilisé
pour réaliser le bien au lieu du mal illustre une certaine
naïveté concernant la nature de l’Etat lui-même. Si
l’Etat en a le pouvoir et qu’on lui demande de choisir entre
partir en guerre et faire le bien, que va-t-il choisir ? Dans le
contexte américain, c’est certainement de partir en guerre.
« L’histoire du
centralisme bancaire est une étape que l’on a retirée de
l’histoire des bombes atomiques et des camps de la mort. »
Il
est tout aussi naïf pour la Droite de parler de museler le gouvernement
et dans le même temps d’espérer un conflit global. Tant
que l’Etat à un accès illimité à la planche
à billet, il peut se permettre d’ignorer les pléiades de
groupes idéologiques qui se préoccupent de savoir comment cet
argent va être dépensé. Il est également stupide
pour la Droite de croire qu’elle peut avoir ses guerres, son
militarisme, son nationalisme et sa belligérance sans dépendre
du pouvoir de la Réserve Fédérale. Cette institution est
le mécanisme même par lequel les rêves de la Droite
fanatique et de la Gauche fanatique prennent corps.
Les
effets de la planche à billets vont bien au-delà du financement
de programmes gouvernementaux indésirables. La Fed crée des
bulles financières qui produisent une dislocation économique.
Rappelez-vous la bulle technologique de la fin des années 1990 ou la
bulle du marché immobilier ? Ou bien encore le boom qui précéda
la crise actuelle. Tout cela, ce sont des conséquences de la
monopolisation de la monnaie.
Ces
temps-ci, les consommateurs américains sont durement touchés
par les hausses de prix du pétrole, de l’habillement, de la
nourriture et de bien d’autres choses. Pour la première fois
depuis des décennies, les gens le ressentent et le ressentent
durement. Et comme pour toute autre inflation dans l’histoire du monde,
les gens recherchent les coupables et ils accusent les mauvaises personnes.
Ils pensent que ce sont les compagnies pétrolières qui les
exploitent, ou bien que les négociants de pétrole
étrangers sont en train de réduire leur offre ou bien que les
pompistes profitent d’une crise pour engranger des profits à nos
dépens ;
Je
n’exclurais pas complètement la possibilité d’un
contrôle des prix dans un avenir proche. Quand Nixon les a
imposés en 1971, ni lui ni ses conseillers ne pensaient qu’ils
pourraient contrôler l’inflation. En fait, le but était
plutôt de reporter la colère du public visant le gouvernement et
ses banques vers les détaillants qui, alors, deviendraient des
boucs-émissaires. Et en ce sens, les contrôles des prix
fonctionnent. Ils font croire aux gens que le gouvernement est en train de
faire baisser les prix tandis que le secteur privé essaie de les faire
augmenter. C’est une véritable dynamique politique qui est en
marche avec les contrôles des prix.
La
question est de savoir si vous serez vous-même coincé dans ces
stratagèmes. Il est plus que grand temps pour nous de prendre note que
la cause du véritable problème ici, ce ne sont ni les
producteurs ou la guerre en tant que telle mais l’agence
fédérale qui a obtenu un privilège légal de
contrefaçon à volonté et de dépréciation
de la valeur de la monnaie tout en finançant tout schéma étatique
que ce soit de guerre ou de projets sociaux. Nous devons regarder la Fed et
dire : l’ennemi le voici!
Notons
que la Réserve Fédérale n’est pas un parti
politique. Ce n’est pas non plus un groupement
d’intérêts reconnus. Ce n’est pas non plus un lobby
renommé de Washington. Ce n’est pas davantage un secteur de
l’opinion publique. Elle semble complètement
protégée d’un débat public vigoureux. Si nous
croyons fermement à la liberté et décrions l’Etat
tout puissant [Léviathan State], cette situation ne peut plus
être tolérée.
“Tant
que l’Etat à un accès illimité à la planche
à billet, il peut se permettre d’ignorer les pléiades de
groupes idéologiques qui se préoccupent de savoir comment cet
argent va être dépensé »
Je
dis à la Droite sincère, si vous souhaitez réellement
limiter l’Etat, vous devrez abandonner vos rêves de refaire le
monde à la pointe du fusil. Les guerres et un gouvernement
limité, ce n’est pas possible. De plus, vous devez arrêter
d’ignorer le rôle de la politique monétaire. C’est
un sujet technique bien sûr, mais c’est un sujet que tout le
monde doit considérer et comprendre si l’on souhaite restaurer
quelque chose qui ressemble à la Liberté américaines des
fondateurs [de la République].
Je
dis à la Gauche sincère, si vous souhaitez vraiment
arrêter la guerre et l’Etat espion, mettre un terme à la
persécution des dissidents politiques et aux camps de Guantanamo pour
les étrangers, mettre fin à la culture du militarisme et du
nationalisme, vous devez nous rejoindre en tournant votre regard sur le
rôle de la politique monétaire. Les planches à billets
doivent être débranchées. Il est vrai que cela affectera
les programmes que la Gauche chérit, comme la sécurité
sociale et les programmes d’éducation fédéraux.
Mais tant que vous souhaiterez que l’Etat finance vos rêves, vous
ne pouvez pas vous attendre à ce qu’il ne finance pas aussi les
rêves des personnes que vous haïssez.
Laissez-moi
ajouter quelques mots pour les libertariens qui
rêvent d’un monde avec un gouvernement limité sous un
régime légal, un monde dans lequel l’entreprise libre
règne et dans lequel l’Etat n’a pas le pouvoir de
s’immiscer dans nos vies tant que nous nous comportons paisiblement. Il
est complètement absurde de croire que ceci puisse être accompli
sans réforme monétaire. Et pourtant, jusqu’à la
campagne la plus récente de Ron Paul [pour la présidence
américaine], -et mis à part Murray Rothbard
et le travail accompli ces 26 dernières années par le Mises
Institut- je ne me souviens pas que les libertariens
se soient un tant soit peu préoccupés de ce problème.
En 1983, le Mises Institut a tenu une large conférence sur
l’étalon-or et nous l’avons tenue à Washington,
D.C. (Des articles scientifiques y étaient présentés,
Ron Paul a débattu avec un gouverneur de la Fed. Ron a gagné).
Et même à cette époque, je me souviens que des libertariens nous ont ridiculisés pour avoir tenu
une telle réunion débattant de la Fed et de son remplacement
par une monnaie saine. Ils disaient que le Mises Institut aurait l’air
ridicule et que nous serions estampillés de fétichistes de
l’or et de fous. Mais nous l’avons fait quand même. Et
toutes ces années plus tard, le livre issu de cette
conférence demeure une source majeure de compréhension du
rôle de la monnaie dans l’avancée du despotisme ou la
résistance à ce dernier et un plan de route pour le futur.
Bien
sûr, la tradition autrichienne a combattu la monnaie-papier et les
banques centrales depuis le début. Menger était un avocat de
l’étalon-or. Böhm-Bawerk l’a établi quand il était
ministre des finances sous la monarchie des Habsbourg. Le livre de Mises sur
le sujet paru en 1912 était le premier à définir le
rôle de la monnaie dans les cycles conjoncturels et il émit des
avertissements terribles concernant les banques centrales. Hayek s’est
exprimé vigoureusement contre l’abandon de
l’étalon-or dans les années 30. Hazlitt a prévenu
des échecs inévitables de l’après Bretton Woods et a
défendu un véritable étalon-or à la place. Et Rothbard était le champion de la monnaie saine et le
plus grand ennemi que la Fed n’ait jamais eu.
Mais
de manière générale, j’ai détecté
une tendance dans les cercles libertariens à
ignorer ce sujet et en partie, précisément pour les raisons
citées plus haut : ce n’est pas respectable.
Et bien, je vais vous dire pourquoi ce sujet n’est pas
considéré comme respectable: il relève de la
priorité absolue pour l’Etat de conserver sa planche à
billet cachée derrière un voile. Quiconque ose relever le voile
est accusé de crime intellectuel d’une manière ou
d’une autre. Et c’est précisément la raison pour
laquelle nous devons en parler à chaque occasion. Nous devons mettre
fin à la conspiration silencieuse sur ce sujet.
J’étais
intrigué de savoir comment Ron Paul, durant sa campagne, ferait pour toujours
mettre le sujet en avant. La plupart des politiciens sont là pour
flatter leur public, pour dire les choses que les gens voudraient entendre.
Et je vous assure qu’au début de cette campagne, personne ne
voulait l’entendre parler de la Réserve Fédérale.
Mais il l’a fait tout de même. Il a travaillé à
former son public sur la nécessité d’une réforme
monétaire. Et ça a marché. Pour la première
fois de ma vie, il y a un très large mouvement public dans ce pays qui
prend ce sujet très au sérieux.
L’économiste
monétaire Joseph Salerno a été appelé par C-Span, l’autre jour, qui souhaitait
l’interviewer à la télévision sur la
nécessité de restaurer l’or comme base de notre monnaie.
Alors que je regardais cette excellente interview, j’ai
été étonné par le grand triomphe que cela
représente pour la Liberté, que ce thème ait de
nouveau une place à part entière dans le débat national.
Au 19ème siècle, c’était un sujet
présent à l’esprit de tout un chacun. Cela peut le
redevenir à condition que nous n’esquivions pas la
vérité dans la formation de notre message.
On
pourrait dire que défendre une privatisation serait politiquement
irréaliste et donc une perte de temps. De plus, on pourrait
également dire qu’en continuant à insister sur ce sujet,
nous ne faisons que nous marginaliser et prouvons que nous sommes à
l’extrême. Je me rends à
l’évidence : il n’existe pas de meilleur moyen pour
qu’un sujet soit envoyé aux oubliettes que d’arrêter
d’en parler.
Bien
loin d’être un sujet archaïque et anachronique,
l’étalon-or et les sujets qu’il soulève vont droit
au cœur de l’actuel débat concernant le futur de la guerre
et de l’économie mondiale. Pourquoi le gouvernement et ses
partisans ont-ils une aversion pour l’étalon-or ? Parce
qu’il enlève le pouvoir discrétionnaire de la Fed en
plaçant de sévères limites à la capacité
de la banque centrale à faire grossir l’offre de monnaie
[inflation]. Sans ce pouvoir discrétionnaire, le gouvernement a
beaucoup moins d’instruments à sa disposition pour la
planification centrale. Le gouvernement peut réglementer, ce qui est
une fonction du pouvoir de police. Il peut taxer, ce qui implique
d’ôter à d’autres gens leur propriété.
Mais ses activités dans le domaine financier sont radicalement
freinées.
Pensez
à vos gouvernements locaux et régionaux. Ils peuvent taxer et
dépenser. Ils peuvent manipuler et intervenir. Comme tous les
gouvernements, depuis l’aube des temps, ils retardent
généralement le progrès social et embourbent les choses à
plaisir. Ce qu’ils ne font pas en revanche, c’est mener des
guerres globales massives, créer des déficits énormes,
accumuler des dettes de milliers de milliards de dollars, réduire la
valeur de la monnaie, aider financièrement des gouvernements
étrangers, fournir des crédits illimités à des
entreprises en faillite, administrer des schémas d’assurance
sociale extrêmement coûteux et destructeurs, ou bien encore
déclencher des changements de direction vertigineux dans
l’activité économique.
Les
gouvernements locaux et régionaux sont horribles et doivent être
contrôlés sans cesse, mais ce n’est rien comparé
à la menace que représente le gouvernement
fédéral. Ils ne sont ni aussi arrogants et ne se croient ni
aussi infaillibles ni aussi indispensables.
C’est
la banque centrale, et seulement la banque centrale, qui œuvre en tant
que machine à sous pour le gouvernement et cela fait toute la
différence. Pourtant il n’est pas impossible qu’une banque
centrale existe aux côtés d’un étalon-or, un prêteur
en dernier recours qui évite la tentation de détruire ce qui le
limite. De la même manière, il est possible pour quelqu’un
possédant une soif insatiable de vin de s’attabler à un
banquet étalant de délicieux crus sans en boire une
gorgée. Disons simplement que l’existence d’une banque
centrale introduit une occasion de pêcher pour un gouvernement.
C’est pourquoi, sous le meilleur système
d’étalon-or, il n’y aurait pas de banque centrale, les
pièces d’or circuleraient aussi librement que leurs substituts
et les règles contre la contrefaçon et le vol interdiraient aux
banques d’accumuler les crédits au-delà de la demande
d’épargne.
« Avant la plus récente campagne
présidentielle de Ron Paul, je ne me souviens pas que ce sujet ait
fortement intéressé les libertariens
eux-mêmes »
Si
nous continuions à construire le système parfait, toute frappe
de monnaie serait privée. Les banques seraient traitées comme
des entreprises : pas de privilèges spéciaux, pas de
promesse de repêchage en cas de crise, pas d’assurances
subventionnées et aucune connexion au gouvernement à quelque
niveau que ce soit.
Ceci,
c’est un management du système monétaire selon le
marché libre, selon la libre-concurrence, ce qui signifie rendre cette
institution de la monnaie dans son intégralité à
l’économie de marché. Comme n’importe quelle institution
dans une société libre, elle n’est pas imposée
d’en haut, ou dictée par un groupe d’experts mais elle est
le résultat, de facto, de ce qui se produit dans une
société qui respecte de manière consistante les droits
de propriété, encourage l’entreprise et promeut la paix.
Et
cela se résume à ça : Si vous haïssez la
guerre, opposez-vous à la Fed. Si vous haïssez les violations de
vos libertés, opposez-vous à la Fed, si vous voulez
réduire le despotisme, restreignez la Fed. Si vous voulez assurez
votre liberté et celle de vos descendants, abolissez la Fed.
Lew
Rockwell
[Ce
discours a été tenu lors de la conférence
organisée par la Future
of Freedom Foundation
sur le thème « Restaurer la République : la politique
étrangère et les libertés civiles » "Restoring the Republic: Foreign Policy and Civil Liberties"
le 6 juin 2008]
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