Bien que la probabilité en soit très
limitée avant deux mois, il n’est pas idiot de penser que la BCE
finira un jour par se voir forcée de monétiser une importante
quantité de la dette des gouvernements Européens et des banques
commerciales. Il semble donc légitime ici que de discuter des
avantages et inconvénients d’une telle
éventualité, mais puisque je ne parviens pas à en
trouver quelque avantage, je me contenterai d’en énoncer les
inconvénients.
S’il est un point clé à retenir,
c’est que l’inflation monétaire développée
par la banque centrale est un problème, tout comme l’est la
contrefaçon privée. En effet, elle débouche sur un
échange de rien du tout contre quelque chose, ou si vous
préférez, n’est autre qu’une forme de vol. Si
personne n’oserait dire qu’un contrefacteur privé offre un
service utile à l’économie en imprimant des billets de
banque pour racheter les obligations de gouvernements en difficulté,
pourquoi beaucoup pensent-ils normal que la banque centrale puisse venir en
aide à l’économie en achetant des obligations grâce
à de la monnaie fabriquée à partir de rien ?
Le simple fait de penser que, sous certaines conditions,
les impressions monétaires de la banque centrale peuvent ne pas faire
de mal (à défaut de faire du bien) à
l’économie ne relève de rien de plus que d’un
manque de logique et de sens commun. Bien sûr qu’imprimer de la
monnaie est une mauvaise chose ! Elargir la masse monétaire ne
peut en aucun cas augmenter la richesse totale de l’économie et
pourtant, les injections monétaires enrichissent certaines personnes.
Si certains deviennent plus riches dans le même temps que la richesse
totale de l’économie n’augmenta pas, cela signifie que
certains deviennent également plus pauvres, et que ce à quoi
nous assistons n’est en fait rien de plus qu’un transfert
forcé de richesses.
Nous comprenons désormais ce qu’est la
monétisation de la dette par la banque centrale : un moyen de
transférer de la richesse depuis un groupe de personnes vers un autre.
Pour le cas de la BCE et de son utilisation de nouveaux euros dans le cadre du
rachat des dettes de gouvernements et de banques insolvables, il
s’agirait d’un transfert de richesses vers les investisseurs
possédant de ces obligations depuis les mains de toutes les personnes
disposant d’épargne en euros. En effet, le coût d’un
mal-investissement sur obligations serait non plus porté par ceux qui
sont à l’origine de cette mauvaise décision
d’investissement, mais par des personnes n’ayant rien à
voir avec cette décision. En plus de cela, ce transfert de responsabilité
se fait de la manière la plus sournoise qui soit. Si tous ceux qui
épargnent en euros recevaient une facture qui leur présente
noir sur blanc ce transfert de richesses, nous assisterions sans aucun doute
à une révolution. C’est pourquoi il est mis en place par
le biais de l’inflation monétaire. Ainsi, seule une personne sur
un million est capable de déterminer pourquoi elle est devenue plus
pauvre.
Le coût porté par les épargnants est
un coût caché, puisqu’au lieu d’un transfert
immédiat de monnaie, c’est un transfert graduel de pouvoir
d’achat qui est mis en place. Les détenteurs d’obligations
et les banques jouissent d’une hausse immédiate de leur pouvoir
d’achat, parce qu’ils sont les premiers à recevoir la
nouvelle monnaie et les épargnants subissent une diminution graduelle
de leur pouvoir d’achat dans le même temps que cette nouvelle
monnaie est injectée dans l’économie. Il est important de
savoir que les effets de cette nouvelle monnaie sur les prix sont
aléatoires, dans la mesure où certains en sont plus
affectés que d’autres. Tout ceci entraîne des
mal-investissements, ce qui signifie que la monétisation de la dette
n’apporte pas uniquement un transfert de richesse contraire à
l’éthique, mais également une réduction de la
richesse globale.
Nous pouvons donc nous poser la question suivante : Pourquoi
une banque centrale déciderait-elle de monétiser la dette si
elle sait pertinemment que sa décision ne viendrait en aide
qu’à une poignée de spéculateurs, irait aux
dépens d’un grand nombre d’épargnants et
entraînerait une réduction de la richesse totale ?
Cela n’a bien entendu rien à voir avec la
protection des déposants des banques, puisque ces derniers
n’enregistrent aucune perte lorsque les actionnaires de leur banque
sont anéantis et que les détenteurs d’obligations
subissent d’importantes pertes. Selon moi, cela a en revanche quelque
chose à voir avec un certain degré d’ignorance et une
volonté de s’engager dans des pratiques injustes à des
fins politiques et financières.
Voici certaines des raisons pour lesquelles
l’ignorance joue un rôle important :
1. Un grand nombre de personnes ne comprend pas le lien
entre l’inflation monétaire et la dégradation de son
niveau de vie.
2. Les personnes qui dirigent la banque centrale sont
généralement de très mauvais économistes, du
simple fait qu’un bon économiste ne voudrait jamais occuper leur
poste et ne serait de toute façon jamais considéré comme
pouvant correspondre à ce type d’emploi.
3. La quasi-totalité des hommes politiques ne
comprennent rien à l’économie.
La volonté de s’engager dans des pratiques
injustes à des fins politiques et financières se traduit par
les points suivants :
1. La capacité de créer de la monnaie
à partir de rien offre aux hommes politiques un moyen d’acheter
plus de votes qu’ils n’en obtiendraient si leurs promesses
devaient être tenues par le biais de la taxation seule.
2. L’inflation monétaire donne souvent
l’illusion d’une économie plus saine sur le court terme,
ce qui peut permettre au président sortant d’être
réélu.
3. Les personnes qui bénéficient le plus de
l’inflation monétaire exercent souvent une influence
disproportionnée sur la banque centrale et le gouvernement.
4. En raison des promesses faites par les hommes
politiques par le passé, un certain nombre d’électeurs a
désormais un intérêt à voir se poursuivre les
politiques d’inflation, parce que c’est seulement par le
transfert de richesses apporté par l’inflation monétaire
que ces personnes sont en mesure de recevoir leurs fameux privilèges.
En raison de la combinaison de l’ignorance et des
intérêts listés ci-dessus, l’inflation
monétaire risque encore de s’étendre dans le futur et ce,
malgré son caractère dénué d’éthique
et économiquement débilitant. La question n’est donc pas
de savoir si, mais quand.
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