Angela
Merkel et François Hollande ont lors de leur
rencontre de samedi, ce dernier à son corps défendant,
entériné le retard à l’allumage qui se profilait :
la concrétisation de la première phase de l’union
bancaire – la supervision des banques – qui était
souhaitée pour la fin de l’année par le gouvernement
français, a été repoussée à une date
ultérieure non précisée, pour cause de désaccord.
La suite, notamment la création d’un fonds de sauvetage des
banques financé par elles-mêmes (sur le papier), est encore plus
problématique.
En
conséquence, le versement de l’aide directe aux banques
espagnoles est toujours suspendu, et ce sont les mégabanques
espagnoles qui financent dans l’urgence les caisses
d’épargne, ainsi que les régions, en utilisant les
crédits de la BCE qui fait le relais en attendant que la situation se
clarifie. Rien n’est toujours clair quant à un soutien financier
à Madrid, que les Allemands voudraient différer et les Français
accélérer. La perspective d’entrer dans la logique des plans
de sauvetage est un tel repoussoir qu’elle incite le gouvernement
espagnol à prendre par avance les mesures qui seraient exigées
en espérant pouvoir en rester là. La Grèce joue bien le
rôle exemplaire qui lui était assigné.
Des
discussions sont en cours afin de doper les capacités
d’intervention du MES. Der Spiegel a cru pouvoir annoncer la somme de
2.000 milliards d’euros, aussitôt démentie par le
porte-parole du gouvernement allemand. Il faut néanmoins
s’attendre, mais pour plus tard, à l’annonce d’une
somme mirobolante et à un montage financier du type de ceux qui
avaient été étudiés pour le FESF, puis à
l’époque recalés. Car une chose est
présentée comme certaine : la participation allemande ne
dépassera pas 190 milliards d’euros, seuil au-delà duquel
un vote du Bundestag serait nécessaire. Si les moyens et le calendrier
restent à préciser, l’objectif poursuivi est toutefois
clair : il s’agirait de se doter des moyens de sortir du marché
l’Espagne et l’Italie, afin d’enclencher
l’intervention de la BCE avec pour mission de stabiliser le
marché obligataire. L’avenir dira le sort réservé
à cette tentative.
Angela
Merkel va successivement rencontrer Mario Draghi et Christine Lagarde mardi et mercredi. Le FMI
cultive sa différence avec la stratégie européenne
poursuivie, Christine Lagarde préconisant de « réduire
l’ajustement budgétaire » quand c’est «
nécessaire et possible » et d’appliquer « de la
manière la plus souple et judicieuse possible » les
modalités des plans de sauvetage, car « il y a des
circonstances économiques qui sont telles que les objectifs ne seront
pas atteints ». Pour la Grèce, dit-elle, il y a « un
problème de financement », prenant le contrepied de la position
du gouvernement allemand, ajoutant que « le problème de la dette
grecque devra être réglé ». En provenance de la
presse allemande, des rumeurs font état d’un rapport de la Troïka
attribuant à la récession une part de responsabilité
dans le déraillement grec, ouvrant la voie soit à un
refinancement, soit à une restructuration de la dette, ou bien
à une combinaison des deux. L’alternative peu probable serait un
défaut. Comme pour l’Espagne, la BCE pourrait être appelée
à la rescousse, en acceptant la restructuration de la dette grecque
qu’elle détient désormais en masse.
La
question est désormais posée : combien de temps le
schéma de la BCE s’appuyant sur des conditions préalables
devant être suivies par les gouvernements et fixées par les
États européens va-t-il être tenable ?
Les
gouvernements de la zone euro n’en restent pas moins sur leur
lancée, toujours sommés de procéder à une dévaluation
interne (une diminution des salaires). Mario Monti vient à ce
propos d’appeler ses compatriotes à développer la
productivité en procédant à leur tour à un
« ajustement radical » du coût du travail, après que
l’OCDE a constaté dans le pays « une rigidité
à la baisse dans la formation des salaires ». Appliqué au
maintien d’une présence industrielle de Fiat en Italie, cela
implique d’en « créer le contexte » et non pas
d’aider financièrement le groupe, a bien précisé
le président du Conseil.
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre, Les
CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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