Je
pensais avoir une idée très claire des désastres
auxquels nous pourrions faire face en 2013, mais c’était avant
que je ne lise le récent rapport de l’US Commodity
Futures Trading Commission sur la participation des
banques sur les marchés à terme de l’or et de
l’argent. Selon ce rapport, ces marchés seraient en route pour
une crise que seuls très peu verront arriver. Je commencerai tout d’abord
par observer ce qu’il se passe sur le marché de l’or.
Le
premier graphique ci-dessous présente les expositions nettes à
découvert des banques sur le marché de l’or au 4
décembre. Entre les mois de février et d’août, les
banques Américaines ont réduit leur exposition nette à
découvert de 104.717 à 57.689 contrats dans un contexte de
déclin du prix de l’or. C’est tout à fait logique,
et c’est ce que nous attendrions d’une gestion sensible de
positions. En revanche, lorsque le prix de l’or a recommencé
à augmenter après la publication du rapport, les positions
nettes à découvert des banques ont à nouveau atteint des
records pour continuer d’augmenter le mois dernier, alors que le prix
de l’or recommençait à baisser. C’est une preuve
que les banques Américaines ont des difficultés à
plafonner un marché qui est au mieux neutre et très
probablement survendu. Ceci est très différent d’un
marché suracheté avec des preneurs de bénéfice
à chasser, comme c’était le cas lorsque l’or
s’affichait à 1900 dollars l’once et que les banques sont
parvenues à reprendre le contrôle de son prix.
Ce
second graphique représente les positions à découvert
nettes des banques non-Américaines. Depuis octobre 2011, ces banques
ont accumulé des positions à découvert, avec un rebond
soudain entre les mois d’août et d’octobre, avant de les
réduire jusqu’à ce qu’elles n’atteignent plus
que 44.707 contrats ce mois-ci. Il semblerait que certaines de ces positions à
découvert aient été transférées vers les
bilans de banques Américaines, portant l’exposition de ces
dernières à des niveaux inconfortables, comme nous avons pu le
voir sur le premier graphique.
Le
rebond de ces positions nettes entre août et octobre a compris de
brutales augmentations de positions longues à la vente comme à
découvert impliquant des swaps et d’autres outils commerciaux.
Leurs positions à la vente ont plus que triplé en passant de
9.199 à 34.881, et leurs positions à découvert sont passées
de 49.772 à 113.445 suite à la hausse du prix de l’or.
L’explication la plus probable à tout cela pourrait être
que des acheteurs se sont matérialisés parmi ces banques
non-Américaines et qu’ils aient acquis une protection
financière en achetant des contrats à terme. Certaines de ces
banques ont aperçu que le prix de l’or se dirigeait dans une
direction défavorable à leurs positions à
découvert et ont tenté de le contenir en intervenant sur le marché.
En conséquence, lorsque les banques Américaines ont
entraîné une baisse du prix de l’or en octobre, les
banques non-Américaines ont sauté sur l’occasion en
réduisant leurs positions à découvert
jusqu’à des niveaux plus adéquats.
Cette
information a une importance capitale, étant donné que le
rapport de Commitment of Traders présente
clairement une réduction substantielle de la position nette des
banques commerciales de l’ordre de 34.551 contrats au cours de la
semaine de sa publication. Cela donne l’impression d’un
marché qui est acheté pour être
contrôlé. Le rapport suggère cependant le contraire.
Qu’en est-il de l’argent
Alors
qu'il existe d'importantes quantités d'or qui pourraient
théoriquement devenir disponibles si le prix
du métal grimpait, ce n’est pas le cas pour l’argent.
Regardons tout d’abord les positions des banques Américaines. Ce
premier graphique montre que même si le prix de l’argent est bien
inférieur à son record de 2011, les positions à
découvert des banques Américaines sont substantiellement plus
importantes que ce que nous pourrions penser. Leurs positions vendeuses ont
diminué de 625 contrats et leurs positions à découvert
s’élèvent à 40.198 contrats. Les quatre banques
ont donc une exposition nette sur le marché de l’argent qui
s’élève à près de 200.000.000 onces, soit
deux fois les réserves annuelles disponibles aux investisseurs
après demande industrielle.
Ce
dernier graphique présente les positions à découvert des
banques non-Américaines. Contrairement à leur exposition
à l’or, ces banques sont dans la même situation que les
banques Américaines qui ont commis l’erreur d’augmenter
leur exposition jusqu’à des niveaux records après la
hausse du prix de l’argent enregistrée entre août et
octobre. Elles souffrent d’un squeeze baissier vicieux. Les positions
à découvert de ces banques couplées à celles des
banques Américaines s’élèvent à 290.000.000
onces. Leurs positions à découvert n’étaient que
de 120.000.000 onces lorsque le prix de l’argent chutait depuis son
record historique de 2011.
Conclusion
Il
n'existe pas assez d’argent pour couvrir ces positions à
découvert et il suffirait de très peu d’achats
supplémentaires pour qu’une importante crise se développe
sur ce marché. Pour ce qui est de l’or, il existe toujours des
banques centrales aux réserves d’or suffisantes pour
atténuer les pénuries, mais pour autant que nous le sachions,
les réserves stratégiques d’argent accumulées au
cours de ces dernières décennies sont épuisées.
Il n’existe donc aucun prix auquel ces positions puissent être
épuisées.
Les
positions des banques sur l’or et l’argent semblent avoir
été négativement affectées par des
évènements ‘indéterminés’ depuis la
publication du rapport de Commitment of Traders.
Toutes les tentatives de la communauté bancaire à regagner le
contrôle de ces importants marchés semblent avoir
échoué.
Depuis
le 4 décembre dernier, nous avons pu assister à trois
tentatives des banques de réduire leurs positions à
découvert, sans pour autant que le prix de l’argent ne passe
sous la barre des 32,60 dollars. Cela signifie que des acheteurs plus
importants que ces banques se tiennent prêts à acheter lors de
chaque chute de prix. Cette intervention sur les prix supporte
l’idée que les barres de métal physique disponibles sur
les marchés tels que celui de Londres sont limitées.
Si
la tendance venait à se poursuivre, le NYMEX aurait bientôt
à déclarer une situation de force majeure sur ce marché.
Les conséquences d’une action si extrême seraient extrêmement
déstabilisantes non seulement pour le prix de l’argent et sa
demande, mais également pour l’or.
Ainsi,
nous devons ajouter l’effondrement des marchés des métaux
précieux à le liste des risques
systémiques auxquels nous pourrons faire face en cette nouvelle
année.
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