La récession va se poursuivre et le chômage augmenter en 2012 et 2013, selon les dernières prévisions de l’OCDE. Comment pourrait-il en être autrement, vu la politique appliquée à l’instigation d’une Commission européenne qui persévère ? Celle-ci vient d’accorder aux gouvernements des délais pour accomplir des objectifs – qui étaient inatteignables – de réduction du déficit, les assortissant à titre de contreparties de mesures visant les retraites et la réforme du travail. Là où elle devrait s’en tenir à des recommandations, le rapport de force qui s’est installé lui permet de formuler des exigences, mais il est un peu tard pour s’en offusquer après y avoir contribué ! On ne joue pas au plus fin avec la logique de contraintes budgétaires avalisées bien que sans fondements. Sous couvert d’ajustement fiscal, la diminution du coût du travail et des retraites est au cœur de la politique préconisée par Bruxelles. C’est l’essence même de la dévaluation interne en cours, que l’on habille avec un discours péremptoire (mais particulièrement creux) sur les réformes structurelles. Celles-ci reviennent à échanger la promesse d’une hypothétique croissance future et de ses bienfaits avec l’adoption de mesures accroissant les inégalités de la distribution de la richesse. En attendant, l’essentiel du poids des sacrifices repose sur le travail (passé, présent et futur), ce qui donne un aperçu de ce qui peut être au final attendu. Non seulement le chômage poursuit sa progression, mais le système bancaire européen, dont le destin est solidaire de celui de ses composantes, est fragilisé plus que prévu par la récession. La montée du taux de défaut est enregistrée, diminuant l’offre de crédit, ce qui approfondit en retour la récession. Les gages qui sont donnés aux banques, ainsi que ceux dont bénéficient les milieux d’affaires, n’y changeront rien. Ils demanderont toujours plus, c’est tout. Devant la baisse de l’inflation, un destin à la japonaise se profile. C’est sans doute cette hypothèse qui est à l’origine des dix ans d’ajustement qui sont promis, sachant que la déflation dure depuis plus de vingt ans au Japon, qui n’en est toujours pas sorti… Faisant preuve d’une aveugle obstination, les dirigeants allemands qui ont pris le leadership européen portent la responsabilité d’avoir conduit toute la zone euro dans un véritable tunnel et les autres de les avoir suivis. À nouveau appelée à jouer les sauveurs pour avoir déjà fait preuve de beaucoup de créativité, la BCE voit ses marges de manœuvre se restreindre et constate que ses outils sont inopérants. La crise politique qui a débuté dans toute l’Europe n’est en conséquence qu’à ses premiers épisodes. C’est le IVème acte qui a commencé. Dans la perspective de la tenue du prochain sommet fin juin, les opérations de relations publiques gouvernementales se succèdent, afin d’aller à la rencontre d’une opinion publique avec laquelle un fossé s’accroit. Hier la mise en cause de l’évasion et l’optimisation fiscales – dont on verra ce qu’elle produira effectivement – aujourd’hui à propos du sort d’une jeunesse particulièrement touchée par le chômage, dont il est possible sans attendre de mesurer le faible impact potentiel. Toutes semblent obéir à la loi suivant laquelle moins on en fait, plus on pratique l’emphase. Mais va-t-il être longtemps possible de remplacer l’action par des artifices de communication et de langage qui arrivent trop tard ? |