Les journaux britanniques ont
publié cet été de nombreux articles concernant l’aide accordée par la Banque d’Angleterre
au Nazis non pas une, mais deux fois au cours de l’année 1939. Elle n’avait
pour cela bien entendu pas reçu l’accord du gouvernement Britannique, malgré
sa tentative de geler les actifs Tchèques.
L’affaire de l’or Nazi est
tout aussi fascinante qu’elle est tragique.
Qu’est-ce que l’or Nazi ?
L'or Nazi fait
référence au métal physique pillé par les Nazi à l’aube et tout au long de la
seconde guerre mondiale.
Il est clair que l’or a joué
un rôle important tout au long de l’Histoire et a agi en tant qu’arme à la
fois politique et économique au cours des guerres du XXe siècle.
Au travers du Traité de
Versailles et de l’hyperinflation de la période d’entre
deux guerres, l’Allemagne a appris à ses dépens qu’un système
monétaire stable soutenu par l’or est crucial pour toute nation qui
désirerait retrouver sa gloire économique d’autrefois. Mais cela signifie
également que les Nazis avaient parfaitement conscience de la dévastation que
générait une absence de devise saine.
Comme vous le savez peut-être,
à la suite de leurs invasions, les Nazis pillaient les réserves d’or et les
actifs de valeur des nations, et faisaient de leur mieux pour dévaluer leur
devise souveraine. Ce pillage du système financier Européen n’est que peu
connu, mais a servi d’arme aux Nazis dans leur objectif de faire tomber les
nations à genoux. Les Nazis ont consolidé leur pouvoir en accumulant de l’or
alors que leurs victimes étaient restreintes à n’utiliser que des devises
papier de faible valeur.
Quelles quantités d’or ont-ils pillé ?
Après la guerre, d’importantes
réserves d’or furent découvertes en Allemagne, la plus conséquente s’étant
élevée à 8000 tonnes de métal.
Il est toutefois impossible
d’estimer quelles quantités d’or ont été pillées compte tenu de la nature du
vol. 50% de l’or pillé aurait été vendu sur les marchés internationaux.
L’Holocaust
Educational Charity
reporte qu’après la guerre, ‘approximativement 260 millions de dollars d’or
monétaire et non-monétaire ont été découverts en Allemagne. Une grande partie
de l’or pillé avait alors déjà quitté le pays’.
A qui ont-ils volé cet or ?
Bien souvent, référence est
faite à l’or Nazi comme étant l’or volé aux banques centrales aux quatre
coins de l’Europe. La valeur de l’or dérobé est estimée à plus de 400
millions de dollars.
Mais les victimes n’ont pas
été que les banques, le régime a également pillé les poches et les bouches
des citoyens dans sa quête et a mis la main sur chaque pièce, bijou et
plombage qu’il a pu trouver. Plus de 140 millions de dollars d’or auraient
été volés aux civils.
Où l’ont-ils volé ?
Chacun des pays qui ont été
envahis par l’armée d’Hitler ont perdu leur or.
A l’aube de la guerre, entre
1937 et 1939, les Nazis ont volé les réserves d’or de l’Autriche, de la
République Tchèque et de Dantzig. Durant la guerre, les Nazis ont pris le
contrôle financier de nombreuses nations dont la France, la Belgique, la
Pologne, la Roumanie, la Hollande, la Lettonie, le Danemark, la Norvège,
l’Albanie, l’Italie, le Luxembourg, la Yougoslavie et la Grèce, qui ont pour
la plupart vu leurs réserves d’or fondre pour être transférées vers les
coffres de la Reichsbank.
Comment les Nazis ont-ils pu s’en tirer ?
L’usage de la force était leur
tactique principale, mais lorsqu’il en venait à gérer et vendre l’or pillé,
les Nazis avaient besoin de la ‘coopération’ d’autres institutions.
Ceux impliqués dans les plus
récents articles à ce sujet sont la BRI et la banque d’Angleterre.
Les documents de la banque
d'Angleterre et le journal de Norman Montagu (qui
en était alors le gouverneur) impliquent que la banque centrale répondait aux
instructions de son client la BRI.
Jusqu’à ce jour, la banque
centrale Britannique et la BRI jouent un rôle important sur le marché de l’or
et leur confidentialité est souvent remise en question.
La Suisse, qui est restée
neutre tout au long de la guerre, est aussi impliquée dans l’affaire.
Wikipédia estime à 100 tonnes la quantité d’or Nazi blanchie grâce à la
Suisse, dont seulement 4 tonnes ont été redécouvertes après la guerre.
Avant la guerre, la Banque
Nationale Suisse était le plus gros centre de distribution d’or en Europe. La
Suisse acceptait l’or des Nazis (aussi bien que celui d’autres nations) qui
avaient besoin de placer leur or quelque part pour pouvoir le vendre sur les
marchés internationaux, mais le problème posé par l’obtention d’un paiement
en échange d’or volé à des victimes continue de hanter le pays.
Comme des historiens l’ont
déjà mentionné par le passé, en raison de l’emplacement et de la politique de
la Suisse, le pays n’avait d’autre choix que de communiquer et de pratiquer
des échanges avec l’Allemagne. Winston Churchill écrit lui-même que ‘le fait que la Suisse
ait pu ou non nous offrir les avantages commerciaux que nous désirions ou en
ait offert trop aux Allemands pour pouvoir survivre n’a aucune importance. La
Suisse est demeurée démocratique et a défendu sa liberté du haut de ses
montagnes et, malgré la guerre, a agi en notre avantage’.
Le Portugal, qui était lui
aussi neutre à l’époque, était le deuxième plus important acheteur d’or Nazi,
contre lequel il offrait à l’Allemagne des armements. Après avoir découvert
que les devises payées par les Nazis étaient contrefaites, le Portugal a
demandé à être payé en or pur.
Qui veut encore récupérer son or ?
En 1946, la Commission
Tripartite sur l’Or fut établie pour que soit restitué l’or volé de l’Europe.
Les pays ayant demandé à récupérer leur métal sont l’Albanie, l’Autriche, la
Belgique, la République Tchèque, la Grèce, l’Italie, le Luxembourg, les
Pays-Bas, la Pologne et la Yougoslavie.
Selon Wikipédia, malgré le
fait que beaucoup d’or ait pu être retrouvé, cet or ne fut jamais suffisant
pour compenser toutes les victimes. Seules 65% des plaintes auraient été
résolues. La provenance des barres d’or n’était pas vérifiée, et elles ne
furent pas retournées à leur propriétaire original.
Le rapport de la Commission
Tripartite précise que :
En seulement très peu de
temps, une quantité d’or considérable a été saisie par les Alliés ou été
identifiée comme ayant été déposée auprès d’autres nations. En juillet 1948, un
total de 9.849.169 onces d’or ont été déposées auprès de la Réserve Fédérale
de New York et de la banque d’Angleterre ou se trouvaient encore dans les
coffres de dépôt de la bourse de Frankfort sous la protection des autorités
Américaines. Les quantités d’or retrouvées ont continué d’augmenter et ont
atteint 10.816.223,863 en décembre 1974. En 1996, deux autres barres d’or,
d’un poids net de 797,539 onces ont été découvertes, ce qui nous donne un
total de 10.817.020,402 onces. La part des pièces d’or reçues par l’Albanie
le 29 octobre 1996 se sont cependant prouvées contenir une quantité minime de
pièces contrefaites – bien que toujours composées d’or. Les quantités d’or
découvertes ont donc dû être ajustées pour passer à 10.817.020,139 onces,
l’équivalent de 336.446,0667 kilos. La chasse à l’or fut déclarée fermée par
les trois gouvernements le 13 juillet 1998.
Certains pays continuent
encore de chercher leur or, et certaines victimes demandent encore
compensation.
En 1997, la Deutsche Bank a
fait un don de 3 millions de dollars aux victimes de l’Holocauste après avoir
admis que les réserves d’or vendues en 1995 auraient pu être de l’or Nazi.
La crise économique actuelle a
aussi soulevé de nombreuses questions quant à l’or Nazi.
En 2010, le premier ministre
Grec, Theodoros Pangalos, a expliqué lors d’un
entretien avec la BBC que les Allemands devaient toujours à son pays l’or qui
lui a été volé pendant la guerre. Cette dispute fait encore rage malgré les
plans de sauvetage offerts indirectement à la Grèce par l’Allemagne et qui
devront être remboursés.
Dans le Rapport Bigelow de 1946, le Vatican a déclaré avoir reçu 350 de
francs Suisses d’or Nazi. Une poursuite judiciaire a été lancée contre le
Vatican par les survivants de l’Holocauste selon lesquels le Vatican aurait
offert l’asile aux Oustachis durant la seconde guerre mondiale bien qu’ils
aient pillé de l’or dans les maisons de Serbes et de Juifs. L’affaire a été
abandonnée en 1997.
En 1997, le système bancaire
Suisse a été forcé de payer 270 millions de francs Suisses au Fonds pour
l’Holocauste. Le pays a été forcé de reconnaître son d’avoir agi en tant que
contact entre les pays en guerre.
La banque d’Angleterre pourrait-elle réitérer ?
La banque d’Angleterre a lancé
une série d’initiatives en cours de semaine dernière afin de paraître plus
transparente. Ces efforts font suite à de nombreuses questions quant à
l’honnêteté de la banque centrale en ce qui concerne les réserves d’or que
lui ont confiées d’autres pays. Compte tenu de sa proximité avec le marché de
Londres, il n’est pas surprenant que les affaires d’or remis en hypothèques
ne cessent de ressurgir.
L’Allemagne, qui a annoncé son
projet de rapatriement de son or en début d’année, a décidé de ne pas
rapatrier d’or depuis Londres. Est-ce un signe de l’intégrité de la banque
d’Angleterre et du marché de l’or de Londres, ou que quelque chose est
enterré à soixante ans de profondeur ?
Ajoutant à l’idée que la
banque centrale soit une puissance en elle-même pour ce qui concerne les
ventes d’or, le gouverneur de la banque de 1939 Norman Montagu
s’est montré très vague quant à son implication sur le marché de l’or, tout
comme l’est son directeur actuel.
Prenons l'exemple de Sir John
Simon, chancelier Britannique en 1939, qui a posé des questions à Montagu quant à l’or Tchèque. Montagu
lui a répondu de manière délibérément vague, mais lui a indiqué que la banque
était de temps à autre utilisée comme dépositaire pas la BRI sans savoir si
l’or déposé était sa propriété ou celle de ses clients. Il n’a donc pas pu
dire si sa banque était le dépositaire de l’or de la République Tchèque.
Aujourd’hui, de nombreuses
questions sont posées à la banque d’Angleterre quant à la quantité d’or
déposée dans ses coffres. Pas plus tard que cette semaine, @KoosJansen a, entre autres, demandé à la banque de
s’exprimer quant aux 400.000 barres d’or déposées dans ses coffres. La banque
lui a répondu, stipulant que ce nombre est ‘délibérément peu spécifique’.
L’or comme outil de puissance économique
Comme je l’ai expliqué au
début de cet article, les Nazis étaient conscients des dommages causés par
une monnaie à la fois non-soutenue par de l’or et susceptible d’être imprimée
indéfiniment. Le vol de l’or des nations envahies ne faisait que faciliter la
destruction de la confiance envers leur devise domestique.
La souffrance causée par la
blitzkrieg et les nouvelles formes de combat de la seconde guerre mondiale
est largement documentée. En revanche, seuls très peu se soucient de la
déstabilisation d’une devise nationale comme arme de guerre. Et cette même
arme est utilisée aujourd’hui.
Nous entendons fréquemment
parler des guerres de devises, un terme imaginé par le ministre des finances
Brésilien Guido Mantega pour décrire l’impression
monétaire par les banquiers centraux. Dans le cadre des guerres de devises
actuelles, la carte joker est toujours la même : l’or.
Dans notre système financier
post-crise actuel, nous pouvons voir la Chine et les pays de la BRIC
accumuler de l’or aussi rapidement que possible. Et cela ne se produit pas seulement
qu’au niveau des banques centrales, mais aussi parmi la masse de citoyens. La
ruée vers l’or est lancée, et les économies en expansion font tout pour
éviter la trappe inflationniste du système dollar.
L’affaire de l’or Nazi attire
l’attention parce que nous savons tous que l’or est le plus précieux des
actifs. Les Nazis ont volé de l’or afin de consolider leur pouvoir et leur
richesse, de la même manière que d’innombrables nations et armées avant eux.
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