À plusieurs
reprises au cours des derniers mois, la question du prix des panneaux
solaires est revenue dans l’actualité. En 2009, le watt des
cellules photovoltaïques coûtait plus de 2 euros. Au premier
semestre de cette année, et surtout pendant les dernières
semaines, ce prix est tombé en-dessous de 0,55 cents. Voici une
nouvelle qui aurait dû ravir les écologistes… s’ils
n’étaient pas aussi protectionnistes.
En
réaction aux différents groupes de pressions, notamment de l’association
ProSun (créée
à l’initiative de l’entreprise allemande Solarworld et regroupant les principaux producteurs de
panneaux solaires européens), la Commission européenne est
montée au créneau pour exiger de la part des exportateurs
chinois des prix plus élevés pour les panneaux solaires, sous
peine d’une augmentation des tarifs douaniers ; il s’agirait
d’une proposition de taxe des panneaux photovoltaïques
d’importation chinoise. Elle serait susceptible d’entrer en
vigueur le 6 août 2013 afin de s’assurer que leur prix reste
au-dessus de 0,65 cents.
Comme on
pouvait s’y attendre, en rétorsion, le gouvernement chinois
promet à son tour d’augmenter proportionnellement les droits de
douane sur certains produits européens, notamment le vin
français et les voitures allemandes. Pour sortir de cette impasse, les
représentants de la Commission européenne et du gouvernement
chinois négocient activement depuis plus d’un mois pour fixer un
prix des panneaux solaires supérieur à 0,60 cents sans pour
autant déclencher les mesures de rétorsion chinoises.
Pour mieux
comprendre les enjeux de cette étrange négociation, cherchons
d’abord à déceler les intérêts
européens.
Cette
négociation laisse tout d’abord entrevoir le poids du lobby européen
des producteurs de panneaux solaires. Car cette démarche consistant
à taxer davantage les importations de panneaux solaires chinois semble
contraire aux intérêts mêmes de l’industrie solaire
européenne dans son ensemble. Elle est en grande partie
composée de fournisseurs de services et d’installateurs qui ont
tout intérêt à ce qu’il y ait plus de panneaux sur
le marché.
Il est ensuite
ironique que des défenseurs des énergies renouvelables se
plaignent de son bas prix. Car dès lors que l’on prône
l’énergie solaire comme une énergie renouvelable en
mesure de réduire la pollution provoquée par les
énergies conventionnelles
(ou encore les gazes à effet de serre), toute baisse des prix
des panneaux solaires (quelle que soit sa nature) devrait être une source
de satisfaction. Aussi étrange que cela puisse paraître, il
s’avère que pour les écologistes, le vert n’est pas
la seule couleur à prendre en compte ; celle des drapeaux des
pays producteurs des panneaux solaires semble l’être tout autant.
En l’occurrence, les verts européens se montrent
gênés par le fait que le drapeau des producteurs des panneaux
solaires soit rouge alors qu’ils auraient préféré le
bleu étoilé du drapeau européen.
Nombre de
producteurs européens ont mal supporté la baisse des prix des
panneaux solaires du fait de la suppression des subventions à la
production auxquelles ils étaient habitués. Plusieurs
entreprises européennes (notamment allemandes) ont ainsi
été contraintes de déposer le bilan au cours des deux
dernières années: Q-Cells a
été racheté en 2012 par le sud-coréen Hanwha, Siemens a annoncé la cession progressive
de la production des panneaux solaires, tandis que Solarworld
a été renfloué le mois dernier à hauteur de 64
millions d’euros par le Qatar pour pouvoir éponger ses dettes et
éviter la faillite.
Déjà
l’année dernière, un
rapport du Joint Research Centre of the European
Commission mettait en garde contre un monopole des entreprises chinoises,
prêtes à prendre les parts de marché abandonnés
par les compagnies européennes restées ainsi sans support. En
effet, d’après les statistiques présentées dans le
rapport, les entreprises chinoises s’érigent en leaders mondiaux
de la production des panneaux photovoltaïques en représentant
près de 80% du marché mondial. Plus de la moitié des
exportations de panneaux solaires chinois se font par ailleurs vers
l’Union européenne. Quel est le secret de ce
« miracle » chinois ? Comment se fait-il que les
prix des entreprises chinoises soient si faibles ?
Voici des
questions auxquelles le prochain billet s’efforcera de répondre.
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