Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
J’étais hier matin l’invité d’Écorama pour commenter l’actualité économique. Pour voir ou revoir la vidéo, c’est ici.
Nous savons tous, car c’est ce qu’il faut dire, que tout va mieux que bien, surtout aux États-Unis d’Amérique, terre de croissance devant l’Éternel… Pourtant, hier fut une journée catastrophique sur le front des statistiques économiques matérialisant ainsi l’évidente mollesse de la croissance américaine tant vantée.
Pendant ce temps, les « zobservateurs » glosent savamment sur les modalités de remontées de taux aux USA… Pourtant, augmenter les taux autrement que symboliquement serait pure folie économique tant l’économie étasunienne est droguée et dépendante à l’argent gratuit. Tout là-bas est à taux variable. Aucun crédit n’est fixe, de votre prêt étudiant à celui de l’achat pour votre maison, sans parler des crédits octroyés aux entreprises dont par exemple les producteurs de gaz de schiste… et les 5 400 milliards de « subprimes » pétrolières sur lesquels nous sommes assis.
États-Unis : chute inattendue des mises en chantier
C’est la première information du jour dont je souhaitais vous parler. « Les mises en chantier de logements aux États-Unis ont sévèrement chuté de façon inattendue en février, selon les chiffres publiés mardi par le département du Commerce.
En données corrigées des variations saisonnières, les mises en chantier ont plongé de 17 % en février pour s’établir à 897 000, alors que les analystes tablaient sur 1,04 million. »
Évidemment, c’est toujours la faute à quelqu’un et ici en l’espèce c’est la faute à… la météo, comme d’habitude !
« Les conditions météo difficiles du mois dernier ont affecté les départs de nouveaux chantiers, qui tombent ainsi sous la barre du million en rythme annuel, comme en janvier de l’année dernière, au plus fort d’un hiver 2014 qui avait fortement ralenti l’activité économique. »
Pourtant, le chiffre qu’il faudrait mettre en exergue c’est bien celui-là, le plus significatif, l’évolution sur un an… et l’évolution sur un an ne montre pas véritablement les signes d’une reprise économique transcendante :
« Sur un an, les mises en chantier sont en recul de 3,3 % par rapport à février 2014. »
Encore une fois, oui les choses vont moins mal aux USA qu’en Europe, mais aller moins mal ne veut pas dire aller très bien ! Et c’est cette confusion sur laquelle il convient d’insister lourdement.
Mais ce n’est pas tout.
USA : la balance des flux de capitaux bascule dans le rouge en janvier
C’est une dépêche de l’AFP qui revient sur le fait que « la balance américaine des flux de capitaux investis à long terme a nettement basculé dans le rouge en janvier, selon les chiffres publiés lundi par le département du Trésor.
Elle a affiché un déficit de 39,3 milliards de dollars, sous l’effet notamment d’une chute des achats des bons du Trésor, après avoir dégagé un excédent de 49,7 milliards de dollars en décembre ».
En clair, les USA attirent moins de capitaux venant s’investir aux États-Unis que de capitaux américains quittant les USA pour aller s’investir ailleurs…
Plus grave, cette précision de l’AFP dans sa dépêche :
« Selon les données du gouvernement, qui ne sont pas corrigées des variations saisonnières, cette évolution tient notamment à une désaffection des investisseurs privés pour les bons du Trésor américains. »
Cela veut simplement dire… qu’il y a nettement moins d’acheteurs de bons du Trésor américain et que donc la dette américaine ne trouverait plus preneur. Si ce mouvement devait se poursuivre, les taux évidemment monteraient en l’absence d’action de la FED, la banque centrale américaine, qui peut toujours venir racheter la dette de l’État fédéral… Encore une fois, ce n’est pas la fin du monde et un mauvais mois ne fait pas une tendance lourde… Mais cela commence à faire tout de même beaucoup d’indices.
Enfin, car ce n’est pas tout !
Des « mesures exceptionnelles » pour éviter le plafond de la dette aux États-Unis
On commence à reparler du plafond de la dette et nous allons nous diriger encore vers un nouveau psychodrame si un accord n’est pas rapidement trouvé entre un congrès républicain et un président démocrate sur le relèvement de ce fameux plafond de la dette… plafond qui, comme la petite « bêbêtte, monte, monte, et monte encore » !
« Le Trésor américain a été contraint de prendre des mesures «exceptionnelles» lui permettant de ne pas atteindre le plafond légal de la dette publique, réactivé lundi après plus d’un an de suspension.
En février 2014, démocrates et républicains avaient accepté de suspendre provisoirement l’obligation pour les États-Unis de maintenir leur dette publique sous un montant maximum fixé par la loi, un mécanisme budgétaire à l’origine de graves crises politiques dans le pays.
Le compromis ayant expiré lundi, les États-Unis sont désormais tenus de ne pas dépasser leur niveau actuel d’endettement, d’environ 18 100 milliards de dollars, tant que le Congrès n’aura pas formellement relevé ce plafond légal. »
Mais rassurez-vous, cela va pouvoir durer longtemps cette fois les tractations entre marchands de tapis, puisque « un défaut de paiement ne menace toutefois pas immédiatement les États-Unis. Les liquidités en réserve et les mesures exceptionnelles devraient permettre de tenir jusqu’en octobre ou en novembre, a récemment estimé le Bureau du Budget du Congrès (CBO) »…
Ouf ! À un moment j’ai eu peur, j’ai presque cru que la croissance battait de l’aile aux États-Unis. D’ailleurs, augmenter les taux d’intérêt en Amérique au moment où la croissance vacille et lorsque le dollar vient de s’apprécier de 20 % dans les derniers mois avec la baisse de l’euro, je trouve que c’est une idée admirable pour aller plus loin dans l’expansion économique.
Mais vraiment, c’est une idée exquise. Encore plus lorsque l’on sait que le PIB américain c’est essentiellement de la consommation basée sur un recours massif au crédit… à taux variable ! Hahahahaha, hahahahahahaha, mais qu’est-ce qu’on va rire !
Il est déjà trop tard, préparez-vous.
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)