Entre l'abattage d'un
avion de ligne russe par une bombe
cachée dans une canette et les récentes attaques qui ont frappé Paris, le
voyage à l'étranger commence à perdre de son lustre.
La nuit dernière, par
exemple, j'ai discuté en soirée avec un ami sur le point de prendre sa
retraite. Quand je lui ai demandé quels étaient ses projets, il m'a dit qu'il
aimerait beaucoup visiter l'Italie, où il a de la famille. Mais pas tout de
suite. « Il y a beaucoup à voir ici, au Nord-Ouest du Pacifique,
m'a-t-il dit. Et il n'est pas nécessaire de prendre l'avion pour y
aller. »
Avec un déclin du
tourisme apparaît un déclin du commerce, et avec un déclin du commerce vient
un déclin de la croissance -- comme si l'économie globale déjà surendettée
avait besoin qu'on la pousse davantage vers l'abysse.
Voyez ceci: Les
transports de conteneurs s’effondrent de 70% en trois semaines.
Mais alors que nous nous
sommes laissé distraire par ISIS, quelque chose de potentiellement plus
dangereux s'est développé, comme par hasard, dans une exploitation porcine
chinoise.
(Washington
Post) - En général, je fais de mon mieux pour ne pas vous alarmer. Mais les
bactéries résistantes aux antibiotiques sont alarmantes -- et vous devriez en
avoir peur.
Selon
une étude publiée dans Lancet Infectious Diseases, un gène surnommé MCR-1
devient de plus en plus commun dans les bactéries trouvées en Chine. MCR-1
donne à une bactérie la capacité de résister aux antibiotiques appelés
polymyxines. Ces antibiotiques agressifs sont considérés comme étant une
dernière ligne de défense -- un traitement utilisé contre une bactérie
résistante contre tous les autres. Mais une fois munie de MCR-1, une bactérie
peut contrecarrer nos médicaments les plus agressifs.
Cela
signifie qu'elle est en quelque sorte invincible. Et MCR-1 pourrait
théoriquement être transmis à tous les types de bactéries.
« Les
polymyxines étaient la dernière classe d'antibiotiques capable d'empêcher une
résistance de se propager d'une cellule à l'autre », a expliqué
Jian-Hua, professeur à l'université agricole de Guangzhou, à l'AFP.
Tout
ça pour ça.
Les
chercheurs ont examiné des cochons d'abattoir et de la viande crue achetée
sur des marchés. MCR-1 a été trouvée dans 20% des cochons examinés, et dans
15% de la viande, et son abondance s'accroît d'année en année. Le gène a
également été décelé dans les échantillons d'E. coli K. pneumoniae de seize
sur un total de 1.322 patients de deux hôpitaux.
Il
faut admettre que ces résultats soient troublants. Mais ils ne sont pas
surprenants. Les bactéries résistantes aux antibiotiques sont déjà impliquées
dans au moins 700.000 morts par an à l'échelle de la planète, et certains
estiment que si la tendance se poursuivait, le nombre de morts pourrait
atteindre 10 millions de personnes par an d'ici à 2050.
Un
récent rapport a déterminé qu'une majorité de la population ne comprend pas
ce que signifie résistance aux antibiotiques. L'équation est simple : Plus
les antibiotiques sont utilisés, plus les bactéries qui y sont exposées ont
de chances de devenir résistantes. Si nous ne limitons pas notre recours aux
antibiotiques, nous pourrions bientôt manquer d'antibiotiques susceptibles de
fonctionner.
Les
polymyxines sont réservées aux cas médicaux les plus graves -- après tout,
ces antibiotiques sont trop toxiques pour qu'un humain choisisse de les
consommer. Mais en Chine, leur rare utilité chez l'Homme les a redirigés vers
un secteur secondaire : l'élevage de bétail. Les cochons chinois comptent
parmi les plus gros consommateurs de colistine, une sorte de polymyxine, qui
est utilisée pour les engraisser. Les chercheurs ont déterminé qu'il s'agit
là très certainement de l'origine de la résistance, une déclaration que le
Ministère de l'Agriculture a décidé d'examiner.
Nous
n'avons peut-être pas ruiné le recours à la colistine aux Etats-Unis, mais
nous sommes sur le point d'en faire de même avec d’autres antibiotiques.
Selon les estimations, 70% des antibiotiques importants pour la santé sont
utilisés sur des animaux aux Etats-Unis. Nous ne sommes peut-être pas en
train de jeter notre dernière ligne de défense par les fenêtres, mais nous
réduisons peu à peu nos options de traitement -- et augmentons nos chances de
devoir avoir recours à des antibiotiques plus agressifs tels que la
colistine.
Une idée assez
effrayante, et à bien des niveaux. Mais le plus immédiat est financier : Il
suffirait que quelques cas de ce type ou liés à un virus similaire soient
médiatisés en Europe ou aux Etats-Unis pour que les locaux perdent toute
envie aller visiter ces régions sources d'infections -- ou refusent
d’accueillir des visiteurs venus de ces régions. Pour ce qui est des
importations de viande susceptible de contenir des bactéries, ne vous ne
faites pas.
La combinaison de la
menace terroriste et de la propagation de super bactéries viendra bientôt
limiter le déplacement des individus et des biens de manière plus efficace
que la forme la plus sévère de protectionnisme. L'ère du libre-échange
pourrait bientôt toucher à sa fin.
* Notes optimistes : Les
pandémies sont bien évidemment de mauvaises choses. Mais le développement de
super bactéries a quelques effets secondaires positifs. Premièrement, il
pourrait marquer la fin de l'élevage industriel, l'un des chapitres les plus
brutaux -- et destructeurs -- de l'Histoire humaine. Deuxièmement, il pourrait
accélérer le développement de sources de nourriture locales, ce qui est une
excellente conclusion pour les fermes organiques et les communautés locales
en général -- aux dépens des grosses sociétés.