La guerre du cash aura donc lieu ; elle a même déjà commencé. Petit à petit, tout se met en place et l’étau se resserre lentement mais sûrement, pour que l’argent liquide disparaisse des mains des citoyens, et que, progressivement, les États renforcent leur contrôle des populations sous leur coupe.
Les raisons officielles sont aussi connues que comiques : en supprimant les grosses coupures, on lutte contre le méchant blanchiment, qui dans le monde merveilleux des politiciens-bisounours, ne pourrait avoir lieu avec des petites coupures, trop encombrantes (il semble évident pour nos dirigeants que le dealer refusera les paiements en billets de 20€, et refusera la vente si vous n’avez pas des billets de 50 ou de 100). L’argument du terrorisme étant d’un grotesque achevé, nous n’en parlerons même pas.
Les arguments officiels étant bien pourris, on peut se pencher sur les officieux, bien plus intéressants.
Dans ce cadre, la lutte contre l’argent liquide apparaît en réalité très pratique pour contrôler les foules. Le cash disparu, tout n’étant plus qu’électronique, on sait qui fait quoi et pour combien. On peut même facilement museler des opposants en les effaçant des transactions, puisqu’après tout, l’impossibilité d’accès à un compte en banque signe rapidement la misère pour le citoyen concerné.
Bien évidemment, la lutte contre le cash représente avant tout la lutte contre la fraude fiscale et sociale. Oh, pas celle avec les valises remplies de billets que certains politiciens s’échangent discrètement, mais plutôt l’économie souterraine, i.e. le travail au noir. Et même si on crée de la misère dans la foulée (tous ceux qui ne peuvent s’en sortir qu’en dessous du travail minimum mais sans charges ni protection n’ont alors plus aucun recours), on peut toujours prétendre lutter un peu contre les paradis fiscaux (mais seulement un peu : les lois sont faites par ceux qui savent les contourner, après tout).
Apparaît un bonus évident : lorsque tout est électronique, tout est en banque, et moyennant un taux négatif sur ces comptes, on oblige les gens à consommer. Pratique, lorsqu’on cherche absolument à noyer les dettes et les erreurs du passé dans une inflation soutenue.
Logiquement, tout s’enchaîne alors : si, pour l’État, il est facile de se servir sur les comptes, il est aussi facile de distribuer de l’argent directement dessus, ce qui, là encore, permet de créer une inflation terriblement pratique pour effacer des années de déficits accumulés en dettes abyssales.
C’est là que le revenu universel rentre en jeu.
Le revenu universel, ou revenu de base (les noms sont nombreux, le concept est globalement simple et unique), c’est l’idée selon laquelle l’État devrait distribuer un revenu (de base) de manière inconditionnelle à l’ensemble des citoyens, chômeur volontaire ou involontaire, travailleur à temps plein ou à temps partiel, et cumulable avec d’autres revenus. Sur le papier, ça vous a un petit côté « Let’s Go Party » indéniable.
Fortuitement ou presque, on apprend ces derniers temps que l’expérience du revenu de base est tentée dans un nombre croissant d’endroits, pas tous loufoques : Finlande, Utrecht, les exemples se multiplient. Dernièrement, c’est le Canada, après la Suisse, qui exprime le souhait de tenter le coup.
En France, les petites initiatives politiques pour pousser le concept sont relayées avec gourmandise par une presse qui semble chaleureusement acquise à l’idée ; on ne compte plus les politiciens qui se sont déclarés favorables au concept et s’empressent de le faire savoir. Miam.
Ce n’est pas un hasard : le but affiché est toujours dégoulinant de gentillesse puisqu’il s’agit d’offrir à tous un revenu qui pourra être employé pour se loger, se nourrir, etc… Et tout indique, par la propagande actuelle en faveur de cette « nouveauté », par les rumeurs, les débats des réseaux sociaux, et les reportages de deux minutes rapidement balancés sur les chaînes publiques ou non, que l’idée s’installe, douillettement, dans les têtes de chacun. Et bien trop rares sont les fois où il est rappelé qu’il s’agit tout de même d’une distribution d’argent public. Pensez donc : donner de l’argent sans condition, simplement parce que vous existez, parce que « C’est Ça La Puissance Des Droits de L’Homme ! », ma brave dame, voilà qui fait couiner du chaton mignon, non ?
Mais deux minutes de réflexions ne laissent pourtant aucun doute : c’est un concept effroyable.
Sur le plan moral tout d’abord, elle instille l’idée perverse qu’on peut, sans dommage sur l’individu, rendre instantanément tout le monde directement dépendant de l’État, de la naissance à la mort. Distribuez ce revenu pendant quelques années et au bout d’un peu plus d’une génération, plus personne ne se souviendra qu’avant son arrivée, des millions de gens se passaient de son existence et savaient vivre sans lui, sans l’État, exactement de la même façon que tout le monde est maintenant persuadé de l’absolue nécessité de la guerre permanente contre les drogues ou de l’interdiction du port d’arme, même si drogues et armes furent bien plus librement disponibles dans l’Histoire sans qu’il fut question de sociétés barbares ou médiévales (on parle d’il y a moins d’un siècle).
Sur le plan économique ensuite, ce revenu deviendra en pratique un plancher pour à peu près tout, créant de l’inflation de façon immédiate ou quasiment ; de la même façon que les APL (aides publiques au logement) ont tiré les loyers vers le haut pour quasiment l’intégralité de leurs montants, le revenu universel en fera de même pour à peu près tout ; tout étant renchéri, le gain pour ceux qui n’auront que ce revenu sera à peu près nul.
C’est de l’économie de base, et c’est très bien décrit dans ce billet de Contrepoints.
Mais surtout, quoi qu’on pense de ce revenu universel, il faudra bien le financer.
D’un côté, bien sûr, il y a les naïfs qui s’imaginent qu’il viendra en remplacement de tout le reste, des aides diverses et variées et en remplacement des millions de petits cerfas dodus et autres formulaires à rallonge qu’il faut remplir pour toucher l’une ou l’autre aide que l’État, notre maître à tous, est parfois assez bon pour nous jeter en pâture, une fois de temps en temps.
Dans cette optique, si on élimine toutes les aides diverses et variées et qu’on les remplace par une seule distribution simple et universelle, on comprend qu’on gagnera au moins sur les frais engendrés par la complexité précédente.
Malheureusement, de l’autre côté, il y a la réalité qui nous oblige à considérer ce « si » (en gras dans le paragraphe précédent) comme une condition quasiment impossible à remplir. Cette même réalité nous rappelle en effet assez douloureusement que toutes les inventions du même acabit, toutes les aides sensées réformer de fond en comble des systèmes de redistributions ont systématiquement fini par s’ajouter à l’édifice socio-légal déjà existant.
Le revenu de base viendra donc s’ajouter à tout ce qui existe, et ne simplifiera rien du tout. Son universalité sera rapidement attaquée, des taux seront appliqués, des effets de seuils apparaîtront, des dérives s’accumuleront sans que personne n’y puisse rien faire.
Et la question du financement, au départ écartée sur l’air du « Comme ça remplace ces milliards dépensés là, il n’y aura qu’un jeu de vases communicants », reviendra rapidement au milieu des débats…
À moins bien sûr que toute cette manœuvre n’ait qu’un seul but : celui de pousser à la consommation et donc, de créer de l’inflation, Graal vital pour nos keynésiens en charge de saboter bibliquement l’économie mondiale. Et là, tout devient beaucoup plus simple puisqu’alors, peu importe que le bidule s’ajoute au reste. Peu importe qu’il n’y ait pas l’argent pour le financer, puisqu’en définitive, cet argent, on va l’imprimer comme on n’a jamais imprimé avant.
Mieux que ça : comme tout l’argent physique aura fini par disparaître, aucune impression ne sera même nécessaire. Il suffira de réarranger quelques octets sur chaque compte courant, et l’affaire est entendue.
Créer de la richesse virtuelle en modifiant simplement quelques portes logiques ici ou là, franchement, comment voulez-vous que ça foire ?