Un gros fabricant japonais de
produits électroniques a approché directement First Majestic Silver Corp pour
la première fois le mois dernier afin de sécuriser des réserves futures, ce
qui selon le producteur d’argent aujourd’hui le plus performant au monde, est
un signe que les risques de pénurie pourront faire flamber le prix du métal
blanc.
« Le fait qu’un fabricant s’adresse
directement à nous en dit long sur ce qui change aujourd’hui sur le marché, »
a expliqué Keith Neumeyer, directeur général de First Majestic, la société la
plus performante parmi ses pairs cette année au Canada. « Je pense que
nous verrons bientôt un prix de l’argent à trois chiffres ». Selon lui,
il pourrait grimper jusqu’à 140 dollars avant 2019.
C’est une
prédiction osée. Bien que l’argent ait déjà gagné 19% cette année pour passer
devant l’or en tant que métal précieux le plus performant, il a de nouveau
baissé mercredi pour passer à 16,26 dollars l’once sur le Comex, après avoir
atteint un record de 50 dollars en 2011. Selon une majorité des analystes
sondés par Bloomberg, l’argent atteindra 57 dollars par once en 2019.
« Voilà qui semble excessif, »
explique Dan Denbow, gestionnaire de portefeuilles chez USAA Precioux Metals
& Minerals Fund à San Antonio. « Nous avons souffert d’un manque d’investissements
sur l’exploration argentifère, mais une hausse de prix apportera une hausse
de production. La courbe actuelle des coûts ne supporterait pas un tel prix. »
Il y a cependant d’autres signes
optimistes qui indiquent une hausse imminente du prix de l’argent. Les fonds
de couverture ont élargi leurs paris haussiers sur le métal pour les porter
jusqu’à un record historique en début de mois.
Parce que l’argent est utile à
la fois en tant que valeur de réserve et qu’actif industriel, il a grimpé en
début d’année dans l’idée que le rythme de hausse des taux d’intérêt
américains ralentirait, et que le secteur manufacturier chinois se
rétablirait.
First Majestic est le deuxième
plus gros producteur d’argent au Mexique, qui produit plus d’argent que n’importe
quel autre pays du monde. La société a été l’un des bénéficiaires primaires
de la reprise du prix de l’argent, après avoir refusé de se diversifier sur d’autres
métaux comme l’ont fait beaucoup de ses pairs. La société tire plus de 63% de
ses revenus de ses ventes d’argent, et le prix de ses actions a plus de
triplé cette année pour enregistrer les meilleures performances sur le
S&P/TSX Composite Index. Ses actions ont gagné 2,2% pour passer à 14,65
dollars canadiens à 9h51 à Toronto, et porter la valeur marché de la société
à 2,36 milliards de dollars canadiens (1,82 milliards de dollars).
Bien qu’il soit depuis longtemps
utilisé dans la fabrication de bijoux, de pièces et d’ustensiles, l’argent est
de plus en plus demandé par le secteur industriel. L’année dernière, le
secteur industriel a représenté la moitié de la consommation d’argent, en
raison notamment des fabricants de téléphones portables, de télévisions écran
plat et de panneaux solaires, selon des données compilées par GMFS pour le
Silver Institute de Washington.
« L’argent n’est pas un
métal précieux, il est un métal stratégique, » a expliqué Neumeyer lors
d’un entretien à Vancouver, où est basée la société. « L’argent est le
matériau le plus conducteur de la planète à l’exception de l’or, qui est trop
cher pour être utilisé dans la construction de circuits imprimés, de panneaux
solaires et de voitures électriques. A mesure que nous électrifions la
planète, nous avons besoin de toujours plus d’argent. Il n’en existe pas de
substitut. »
La demande industrielle devrait
grimper, influencée par la hausse des revenus et la pénétration accrue de la
technologie dans les nations peuplées et développées, ainsi qu’en raison des
nouveaux usages de l’argent pour ses propriétés antibactériennes et
réflectives, ce qui en fait un composant essentiel de nombreux produits,
depuis les pansements jusqu’aux fenêtres.
« D’ici ces 10 à 20 prochaines
années, de plus en plus de gens utiliseront ces produits, et l’argent reste
une matière première limitée. Il n’en existe simplement pas beaucoup. »
L’usage de l’argent, qui inclue
la demande en investissement et les ventes de pièces, a surpassé la
disponibilité annuelle du métal chaque année depuis 2000, selon les données
compilées par GFMS, l’unité de recherche de Thomson Reuters Corp. Mais tout
le monde ne pense pas que nous nous dirigeons vers une pénurie de métal
blanc.
« Je ne suis pas d’accord avec
l’idée que l’argent soit plus rare que ce qu’on croit, » explique David
Lennox, analyste chez Fat Prophets à Sydney. « L’argent ne peut pas
facilement être substitué, mais nous n’en avons pas besoin en abondance. Je m’attends
à ce que les activités d’exploration minière s’intensifient, et à ce que nous
en trouvions des substituts bien avant que le prix de l’argent n’atteigne 140
dollars. »
L’année dernière, 50% de la
demande est venue de sources très sensibles aux prix, telles que le secteur
de vente de pièces au détail et le secteur de la bijouterie et de l’argenterie,
ce qui devrait limiter la hausse de prix. C’est ce que pense Erica Rannestad,
analyste chez GFMS à Chicago. « Une pénétration accrue sur les marchés
des économies émergentes résultera certainement sur une consommation d’argent
par tête plus importante, mais cela se fera sur le long terme plutôt qu’en
peu de temps. »
Comme l’explique Neumeyer, sa
société n’a pour le moment aucun projet d’acquisition en cours, et ne prévoit
pas de s’endetter davantage. La société a levé 57,5 millions de dollars
canadiens en début de mois, qu’elle prévoit d’utiliser pour le développement
et l’exploration de ses mines, qui ont souffert de sous-investissement au
cours du marché baissier de ces dernières années. « Ce capital sera
utilisé à l’échelle interne. »
Neumeyer admet que ses
prédictions ne sont pas toujours correctes. First Majestic a établi ses
budgets 2016 sur une base de 14 dollars par once d’argent. « Je crois bien
m’être trompé chaque année depuis quatre ou cinq ans. »
« La reprise de l’argent ne
fait que commencer, a-t-il ajouté. Ce que nous avons vu ces deux derniers
mois n’est que le début d’un nouveau marché haussier. »
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http://www.bloomberg.com/news/articles/2016-0...-silver-pric...