Le problème va se résoudre.
Le 18 juillet 2013, la ville de Détroit a officiellement demandé d’être placée sous la protection du chapitre 9 de la loi américaine sur les faillites. S’élevant à 18 milliards de dollars, il s’agit de la plus importante faillite municipale de l’histoire des États-Unis.
Selon le plan de restructuration, la ville prévoit de radier la totalité du déficit de 3,5 milliards de dollars des caisses de retraite et compte régler ses obligations relatives aux autres avantages postérieurs à l’emploi (qui ne sont pas financées du tout) de la même façon que celles afférentes aux détenteurs obligataires, soit les réduire de 90 %. Au bout du compte, les retraités pourraient perdre une valeur de 8,6 milliards de dollars d’avantages sociaux futurs, soit 41 % de tous les avantages (prestations de retraite et autres avantages postérieurs à l’emploi) auxquels ils avaient droit avant que la ville ne déclare faillite. De toute évidence, une si forte réduction aura un effet marquant sur les moyens de subsistance des retraités. De plus, cette situation se répercutera sans aucun doute sur l’activité économique des communautés où ces gens vivent.
Ce qui nous laisse perplexes, c’est dans quelle mesure les problèmes de la ville de Détroit étaient prévisibles et à quel point si peu d’efforts ont été déployés pour remédier à la situation avant qu’il soit trop tard.
Malheureusement, le cas de la ville de Détroit est loin d’être unique en son genre. Un récent rapport publié par Standard & Poor’s souligne que, en 2012, le déficit total des caisses de retraite et des autres programmes d’avantages postérieurs à l’emploi des sociétés inscrites au S&P 500 totalisait respectivement 452 milliards de dollars et 235 milliards de dollars.
Ces résultats suggèrent que le problème pourrait être beaucoup plus sérieux que l’explication publique le laisse entendre.
Bien que ces chiffres semblent énormes, en réalité, ils ne représentent que la pointe de l’iceberg. Les promesses du gouvernement fédéral américain sont encore plus difficiles à gérer. Chaque année depuis 2003, le Trésor américain fait état de la valeur actualisée nette de ses obligations futures sur un laps de 75 ans (l’écart budgétaire). Ce chiffre représente, en pratique, le niveau d’endettement réel des générations futures. Soit dit en passant, les médias grand public passent largement sous silence cette statistique.
À la fin de son dernier exercice, le gouvernement fédéral inscrivait à son bilan des obligations totales d’environ 85,4 billions .
M. Kotlikoff estime que, sur un « horizon infini », l’écart budgétaire afférent à la sécurité sociale seulement (soit la différence entre la valeur actuelle de toutes les prestations promises et recettes fiscales futures) s’établit à environ 23,1 billions de dollars. Pour mettre ces chiffres en contexte, précisons qu’on prévoit un PIB dépassant légèrement 16 billions de dollars pour les États-Unis cette année.
M. Kotlikoff estime que pour éliminer entièrement l’insuffisance de capitalisation de la sécurité sociale, le gouvernement aurait besoin de réduire de 22 % toutes les prestations de sécurité sociale actuelles et futures, ou d’augmenter de 32 % les impôts perçus dans le cadre de la Federal Insurance Contributions Act (FICA) (soit de 12,4 % à 16,4 %). Or, ces mesures ne régleraient que le problème de la sécurité sociale!
Pour l’ensemble du gouvernement fédéral des États-Unis, M. Kotlikoff estime que l’écart budgétaire s’établit à environ 222 billions. Plus on retarde, plus les citoyens souffriront quand les prestations et les programmes de protection auxquels ils s’attendent de leur gouvernement disparaîtront soudainement. Au fil du temps, les politiciens de toutes les allégeances se sont montrés doués pour la dissonance cognitive. Or, les mesures visant à augmenter les impôts et à réduire les prestations devront être mises en oeuvre d’une façon ou d’une autre; ce n’est qu’une question de temps.
Par Eric Sprott et Etienne Bordeleau 3/8/2013 Commenté il y a 4099 jours |