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Explication économique du Bitcoin.

Georges Lane Publié le 16 décembre 2017
7947 mots - Temps de lecture : 19 - 31 minutes
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Paris le 15 décembre 2017. 1. Peut-on expliquer l'évolution du Bitcoin ? L'évolution du Bitcoin a fait que le prix de celui-ci est passé de beaucoup moins d’1 $ en 2010 à beaucoup plus que 15000 $ en 2017 (cf. ce billet de novembre 2017). Peut-on expliquer économiquement le phénomène ? A cette question, ma réponse est « oui ». Et, pour la comprendre, il faut - d’une part, ne pas faire référence aux « marchés » des économistes du « mainstream » qui, par construction, et sauf exception extraordinaire, excluent de leurs théories l’invention ou les innovations conséquences des actions des gens, pour préférer sacraliser l’« équilibre (macro)économique (générale) » et ce qu'ils croient pouvoir en déduire par le raisonnement et, - d’autre part, se protéger par la pensée de ce qu’on peut tirer tacitement de l’hypostase des « marchés ». Certes, des économistes ont commencé à s’intéresser indirectement fin 1960-début 1970 (Allen 1998, Brunner et Meltzer 1971, Cheung 1998, Clower 1971, Miller 1965, Perlman 1971, Ulph et Ulph 1975, Williamson, 1989, etc.) au concept de « coût de l’échange ». Allen, D.W., (1998), "Transactions Costs", Encyclopedia of Law and Economics, Edward Elgar Press, Chelthenham, 2000, pp.893-926. Site internet : http://encyclo.findlaw.com/0740book.pdf Brunner, et Meltzer, (1971), « The Uses of Money : Money in the Theory of an Exchange Economy », American Economic Review, décembre, pp.784-805. Cheung, S.N.S. (1998), "The Transaction Costs Paradigm", Presidential Address Western Economic Association, http://www.google.fr/search?q=cache:dAVrYYe13QkJ:www.stevenxue.com/ref_134.htm+transaction+cost&hl=fr Clower, 1971 Miller Jr H.L. (1965), "On 'Liquidity' and 'Transaction Costs'" http://www.jstor.org/pss/1054981 Niehans, J. (1969), "Money in a Static Theory of Optimal Payment Arrangements", Journal of Money, Banking, and Credit, 1, novembre, pp.706-26. Perlman, M. (1971), “The Roles of Money in an Economy and the Optimum Quantity of Money”, Economica, 38, août, pp.233-252. Ulph, A.M. et Ulph, D.T. (1975), "Transaction Costs in General Equilibrium Theory - A Survey", Economica, 168, novembre, pp.355-372. Williamson, O. E. (1989). ‘Transaction Cost Economics,’ in Richard Schmalensee and Robert Willig, eds., Handbook of Industrial Organization. Amsterdam: North Holland, pp. 135-182. Mais ils sont restés coincés par la préférence qu’ils donnaient - au résultat de l’action d’échange de l'être humain sur l’action elle-même, - à l’équilibre économique sur les situations économiques changeantes de chacun. A cause de cela, le processus a consisté tout simplement à mettre de côté, dans la théorie économique, les relations entre « coût de la situation » de chaque être humain, « coût de l’acte d’échange » et « coût de la monnaie ». En particulier en France, elle est vite restée sans lendemain à cause, - d’une part, de mauvaises idées sur l’anglicisme « coût de transaction » et, - d’autre part, sur l’indigence de l’« histoire de la pensée économique » sur le sujet. Il ne faut pas oublier que ce développement de la prééminence de l’équilibre économique que, par exemple J.M. Keynes (1936) disait reprendre de David Hume (1711-76), était à l’opposé de ce qu'ont pu écrire d’autres philosophes, comme Emile Boutroux (1845-1921), - « contre » la notion d'immobilité, de permanence, d’équilibre et - « pour » celle de « situations économiques changeantes ». Reste que, depuis que des savants économistes les ont inventées aux XIXème et XXème siècles, - ni la "théorie de l'équilibre économique général" - ni les approches de la "théorie macroéconomique" n'expliquent l'invention ni les innovations. Et pour cause. Par construction, ils se donnent un équilibre (macro)économique (général) qu’ils peuvent utiliser pour expliquer ce qu’ils cherchent à expliquer et qui exclut toute notion d'invention ou d'innovation (cf. billet de mai 2012). "Equilibre" et "invention" font deux. Par là même, les savants économistes excluent aussi de la théorie économique, comme on va le montrer ci-dessous, coûts et amoindrissements des coûts… En conclusion de The logic of Action I (1997), Murray Rothbard a considéré que : … “There are three cloudy and interrelated areas that need further elaboration. [1] One is the route by which money can be released from government control. [...] [2] A second area for research is the matter of free banking as against one-hundred-percent reserve requirements for bank deposits in relation to gold. [...] [3] Finally, there is the related question, which Mises did not develop fully, of the proper definition of the crucial concept of the money supply. In current mainstream economics, there are at least four competing definitions, ranging from Ml to M4.” (Rothbard, 1997, pp. 116-7) Il me semble qu’il y a eu un quatrième nuage et les lignes qui suivent.y insistent. Le nuage tient : - à la négligence des concepts de « coût de l'acte d’échange » et d’ « amoindrissement du coût de l'acte d’échange » que n’a pas évoqué Rothbard et - aux considérations rhétoriques employées à la place de ces derniers (pouvoir d’achat, épargne, liquidité, fonctions de la monnaie, etc.) : faute de concepts, on fait de la rhétorique… 2. Comment expliquer la tendance du Bitcoin ? En faisant le point sur le processus dont témoigne l’évolution, à savoir celui du « coût des actes d’échange » des gens et de son « amoindrissement » en partie réussi (car les coûts ne sont pas nuls…). De tout temps dans le passé, l’être humain a cherché à satisfaire sa situation économique par l’action, à amoindrir le coût qu’il donnait à sa situation, à savoir le « coût de sa situation », dont il n’était pas satisfait, et c’est un autre phénomène souvent oublié. Il y est parvenu en partie. Encore faut-il, pour le comprendre, partir - des choix de l’être humain et - non pas de ceux de telle ou telle hypothèse (... ciel, nature, univers, société, marché, état, gouvernement, etc.) inventée par le savant économiste. Troisième phénomène, de tout temps dans le passé, l’être humain a aussi cherché à amoindrir le « coût des actes d’échange » qu’il menait et y est parvenu en partie. La méthode suivie s’apparente à la « loi de l’économie » chère à certains savants de l’économie politique ou d’autres sciences (dont les sciences physiques…). Dernier phénomène, l’invention, puis les innovations mises en œuvre par l’être humain de l’intermédiaire des échanges qu’est la « monnaie» (cf. par exemple Say, 1815), ont contribué à lui permettre d’amoindrir le « coût des actes d’échange » …en dépit de la législation croissante dans le domaine que lui infligeaient, sans vraie raison, les hommes de l’état. 3. Quel avenir, dans ces conditions, pour le Bitcoin. Ce qui est dénommé aujourd’hui « Bitcoin », marque juridique d’un intermédiaire récent, nouveau, des échanges, n’est qu’un nouveau stade du processus d’amoindrissement du coût des actes d’échange. Il semble ouvrir le passage de l’ère analogique à l’ère numérique de ce qui avait été dénommé jusqu’alors « monnaie » et est devenu ce qui est dénommé « cybermonnaie » ou « cryptomonnaie » … Les lignes qui suivent se proposent de faire intervenir tous ces coûts en harmonie avec la « loi de l’économie », alternative aux "marchés", pour expliquer le Bitcoin. Elles font apparaître que l’être humain, axiome de base de la théorie de l’ « économie politique autrichienne », insatisfait de sa situation économique, y voit un coût, à savoir le « coût de la situation », étant donné le propos suivant qu’a écrit explicitement James Buchanan en 1969 : … "Le coût ne peut pas être mesuré par quelqu'un d'autre que le décideur car il n'y a aucun moyen que l'expérience subjective puisse être directement observée". "Cost cannot be measured by someone other than the decision-maker because there is no way that subjective experience can be directly observed" (Buchanan, 1969, p.42). Buchanan rejoignait ainsi le propos de Carl Menger (1871), à savoir : « La valeur n'est rien d'inhérent aux biens […] [n'est] pas une propriété de ceux-ci, ni une chose indépendante existant en elle-même. C'est un jugement que les individus économiques font de l'importance des biens […] la valeur n'existe pas en dehors de la conscience des individus ». » (Menger, 1871, pp.120-1). Il faut être David Ricardo et ses disciples pour confondre "quantité" et "coût" et dénommer "coûts" des "quantités" (cf. L. Baudin, 1947). Et n’oublions pas ce que Mises a écrit à propos du « prix en monnaie » de n’importe quoi : … « Les prix ne sont pas mesurés en monnaie, ils consistent dans de la monnaie. » (Mises, 1953, p.664). Si les "prix en monnaie » des marchandises et quantités de marchandises dont nous convenons vont certes de pair, les échanges convenus ne doivent pas faire oublier les coûts. Ensuite, le présent texte fait valoir que l’être humain cherche à amoindrir le coût qu’il lui donne par l’acte d’échange qu’il choisit de mener, à savoir le « coût de l’acte d’échange ». Enfin, il montre qu’y contribuent tant l’intermédiaire des échanges qu’est l’invention qu’on a dénommée « monnaie » hier que le coût de production de celle-ci et tout ce qui s'y rattache (en particulier, les réglementations..., les normes comme on dit aujourd'hui) que l’être humain supporte, à savoir le « coût de la monnaie ». Dans une première section, les lignes qui suivent évoquent des postulats à dénoncer en relation avec l’échange ou le commerce de marchandises et "ce qu’on dénomme « monnaie »" (initiales : C.Q.D.M.). Dans une seconde, elles schématisent l’explication du Bitcoin qu’on a pu observer à partir des notions de "coût" et d’"amoindrissement du coût". 4. Des postulats du commerce à dénoncer. a. Ludwig von Mises. Ludwig von Mises (1881-1973) a eu l’occasion, dans un journal scientifique, en 1917-1918, il y a donc précisément un siècle, d’insister sur l’importance de lier la monnaie aux actes d’échange de chaque être humain – qu’il a dénommés « catallaxie » -, si on voulait comprendre ce qu’était ce qu’on dénommait alors « monnaie ». Mises a insisté de nouveau sur le texte intitulé « On the Classification of Monetary Theories », en particulier en 1953, en annexe de la réédition anglaise de son livre de 1912 intitulé Theory of Money and Credit. Il a distingué, à cette occasion, - d'un côté, la doctrine catallactique de la monnaie où celle-ci procède explicitement de l'échange et, - de l'autre, les doctrines « a catallactiques » dont la monnaie ne procède pas, mais principalement des hommes de l'Etat. Et il y a mis en pièces les « a catallactiques » en insistant sur les catallactiques en ces termes: … « Les théories catallactiques de la monnaie […] s’accordent à la théorie des taux d'échange. Elles recherchent ce qui est essentiel dans la monnaie lors de la négociation des échanges, elles expliquent sa valeur par les lois de l'échange. Il devrait être possible - pour toute théorie générale de la valeur, de fournir aussi une théorie de la valeur de la monnaie, et - pour toute théorie de la valeur de la monnaie, d’être incluse dans une théorie générale de la valeur. Le fait qu'une théorie générale de la valeur ou une théorie de la valeur de la monnaie remplisse ces conditions n'est en aucun cas une preuve de sa justesse. Mais aucune théorie ne peut s'avérer satisfaisante si elle ne remplit pas ces conditions. Il peut sembler étrange que des vues a catallactiques sur la monnaie ne fussent pas complètement supprimées par la croissance de la doctrine catallactique. Il y a plusieurs raisons à cela. Il n'est pas possible de maîtriser les problèmes de l'économie théorique, sauf si les questions de la détermination des prix (prix des matières premières, salaires, loyers , intérêts, etc. ) sont d'abord traitées dans l'hypothèse d'un échange direct, l'échange indirect étant laissé temporairement de côté. Cette nécessité donne lieu à une division de la théorie de la catallaxie en deux parties - la doctrine de l'échange direct et - celle de l’échange indirect. Désormais aussi abondants et difficiles que soient les problèmes de la théorie pure, a été très bien accueillie la possibilité de mettre une partie d'entre eux de côté, au moins pour le moment. Ainsi elle a fait que la plupart des récents chercheurs ont consacré - soit aucune attention - soit très peu à la théorie de ...
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