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L'action syndicale fait elle monter les salaires ?

henry hazlitt Extrait des Archives : publié le 09 mai 2012
4530 mots - Temps de lecture : 11 - 18 minutes
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henry hazlitt.

On a beaucoup exagéré le pouvoir des Syndicats de faire monter les salaires pour une longue durée et pour l'ensemble de la classe ouvrière. Cela tient surtout à ce qu'on ne veut pas reconnaître que le niveau des salaires est déterminé avant tout par le rendement du travail. C'est pour cette raison en particulier que les salaires aux États-Unis étaient beaucoup plus élevés qu'en Angleterre ou en Allemagne au cours de la période où cependant le mouvement ouvrier s'était beaucoup plus développé dans ces deux pays qu'en Amérique. Cette vérité évidente que le rendement du travail est la cause déterminante de l'accroissement des salaires est généralement oubliée ou tournée en dérision par les chefs syndicalistes, tout autant que par les nombreux écrivains en matière économique qui cherchent à se faire une réputation d' « avancés » en copiant leurs discours. Mais cette vérité ne repose pas, comme ils paraissent le croire, sur le postulat que les patrons sont tous des hommes justes et généreux, qui font toujours ce qu'ils croient équitable. Elle repose sur un tout autre postulat, à savoir que le patron, dans son entreprise, cherche à réaliser un profit maximum. Si des ouvriers consentent à travailler pour des salaires plus bas que ceux qu'il est prêt à leur payer, pourquoi les paierait-il davantage ? Pourquoi ne préférerait-il pas donner un dollar par semaine à ses ouvriers plutôt que deux comme le fait son voisin ? Aussi longtemps que cet état de concurrence existe, les patrons auront tendance à payer leurs ouvriers en proportion de leur valeur professionnelle. Tout cela ne veut pas dire que les syndicats n'aient pas à remplir un rôle utile et légitime. Ce rôle consiste surtout à veiller à ce que tous leurs membres reçoivent bien toute la valeur marchande de leur travail. Il est rare en effet que la concurrence des travailleurs à la recherche du travail, et des patrons à la recherche des ouvriers, joue parfaitement. Ni les patrons, ni les ouvriers, pris individuellement, ne sont toujours renseignés sur les conditions du marché du travail. Un travailleur isolé peut très bien ignorer, et les cours du travail, et la valeur marchande qu'il représente pour son patron, s'il n'est pas aidé par le syndicat. Et s'il reste seul, il est beaucoup plus désarmé pour en discuter les éléments. Ses erreurs de jugement lui sont plus préjudiciables qu'à son patron. Celui-ci, en effet, peut commettre l'erreur de ne pas embaucher un homme dont le travail lui eût été très utile, il perd alors le profit que celui-ci eût pu lui apporter, mais il lui arrive d'en embaucher une centaine ou un millier. Tandis que l'ouvrier qui commet l'erreur de refuser du travail parce qu'il espère en trouver facilement d'autre, mieux rétribué, risque de la payer cher. Ce sont ses moyens d'existence même qui sont en jeu. Non seulement il peut ne pas trouver rapidement d'autre travail mieux rétribué, mais il se peut aussi qu'il attende longtemps avant de retrouver un travail payé au taux qu'il avait refusé. Or, dans son cas, le temps est l'essence même du problème, car il lui faut vivre et faire vivre sa famille. Il peut alors être tenté d'accepter du travail à un taux qu'il sait inférieur à sa « valeur réelle », plutôt que de courir le risque d'avoir trop à attendre. Mais quand les ouvriers d'un patron ont affaire à lui en un corps constitué, et s'offrent à travailler à un « salaire type » pour telle espèce de travail, ils peuvent espérer ainsi traiter d'égal à égal et éviter les erreurs néfastes. Mais l'expérience montre que les syndicats — outrepassant leur droit légitime à défendre l'ouvrier, et aidés en cela par une législation partiale du travail qui n'use de contrainte qu'envers les patrons — s'embarquent souvent dans une politique antisociale et à bien courte vue. C'est ce qu'ils font, par exemple, chaque fois qu'ils cherchent à faire monter les salaires de leurs membres au-dessus du cours du marché. Il en résulte toujours du chômage. Les accords réalisés sur ces bases n'arrivent, en fait, à se maintenir que par la menace ou la contrainte. Parfois le syndicat réduit le nombre de ses membres en n'acceptant ceux-ci que sur une base autre que celle de la valeur professionnelle. Cette restriction prend alors les formes suivantes : on impose aux nouveaux venus des droits d'entrée excessifs, ou bien la justification de qualifications arbitraires, ou bien encore des discriminations, avouées ou dissimulées, tenant à la religion, à la race ou au sexe ; ou bien le nombre des membres se limite à un chiffre donné, ou enfin, on boycottera par la force, non seulement les produits du travail non syndiqué, mais même celui des ouvriers affiliés à des syndicats d'autres villes ou d'autres États voisins. Le cas le plus évident où l'on emploie l'intimidation et la force pour maintenir ou faire monter les salaires des membres d'un syndicat, au-dessus du cours normal du marché, est celui de la grève. Il existe des grèves pacifiques. Dans la mesure où elle demeure calme, la grève est une arme ouvrière légitime, bien qu'on ne doive l'utiliser que rarement et en dernier ressort. En quittant tous ensemble leur travail, les ouvriers d'un patron sottement obstiné, qui ne les a pas payés à leur prix, le ramènent à la raison. Il peut alors se rendre compte qu'il lui sera difficile de remplacer ses ouvriers par d'autres qui soient aussi bons et qui acceptent le salaire que les premiers ont refusé. Mais à partir du moment où les ouvriers emploient l'intimidation ou la force pour faire valoir leurs revendications, à partir du moment où ils installent des piquets de grève pour empêcher d'anciens ouvriers de travailler ou pour empêcher le patron d'embaucher d'autres ouvriers à leur place, leur cas devient discutable. Car les piquets de grève sont placés, non surtout contre le patron, mais contre d'autres ouvriers. Ces nouveaux ouvriers ne demandent pas mieux que de faire le travail que les grévistes ont abandonné, et pour le salaire que ceux-ci répudiaient. Ceci prouve que ces nouveaux ouvriers n'ont pas trouvé de conjoncture meilleure que celle que ces ouvriers ont refusée. Si donc les grévistes réussissent par la force à empêcher ces nouveaux ouvriers de prendre leur place, ils les privent ainsi de travailler dans les conditions qui leur paraissaient les meilleures, et les obligent à prendre un travail moins bien rémunéré. Les grévistes combattent donc pour se faire une position privilégiée, et usent de la force pour défende ce privilège. contre d'autres travailleurs. Si cette analyse est correcte, réprouver indifféremment tous les « briseurs de grèves » est une position indéfendable. On est en droit de les haïr, si ces briseurs de grève ne sont que des bandits professionnels qui eux-mêmes emploient la violence, ou des ouvriers incapables, en fait, d'exécuter le travail des grévistes, ou des gens payés temporairement t...
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