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La BNS aspire l’épargne des Suisses. Entretien.

Liliane Held-Khawam Publié le 11 juillet 2019
3386 mots - Temps de lecture : 8 - 13 minutes
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Les faits et leurs conséquences potentielles que décrit l’économiste vaudois dans son livre, paru il y a bientôt deux ans, n’ont à ce jour fait l’objet d’aucun démenti, ni d’aucune contestation. (Photo Blaise Kormann) Le calme avant la tempête. Par Christian Rappaz (Editorial) Depuis une année, il ne se passe pas un jour sans que Donald Trump critique violemment la politique monétaire de la banque centrale américaine, pas un jour sans que le fantasque locataire de la Maison-Blanche crache son fiel au visage de Jerome Powell, le président de cette Réserve fédérale amarrée à une ligne beaucoup trop rigoureuse à ses yeux. En Suisse, c’est tout le contraire. La Banque nationale (BNS) et ses dirigeants ne subissent aucune pression de la sorte et jouissent d’une indépendance totale. Grâce, surtout, à l’inertie du monde politique, Conseil fédéral en tête, et à la bienveillance des médias, dénonce l’économiste neuchâtelois Vincent Held, qui jette un gros pavé dans une mare beaucoup trop tranquille à ses yeux. Car, selon lui, la politique que mène depuis dix ans la BNS pour affaiblir le franc relève de la haute voltige et fait peser un risque majeur sur le pays et ses citoyens. Certes, nos exportations se portent bien, la bourse suisse est à son plus haut historique et nos multinationales versent des dividendes mirobolants à leurs actionnaires. Mais à l’autre bout de la chaîne, les caisses de pension et autres assurances sociales – nos retraites, donc – se font laminer par les taux négatifs. Ce n’est pas tout. Le diplômé de HEC Lausanne affirme que pour financer sa très coûteuse politique d’affaiblissement, l’institution n’a pas hésité à mettre en gage l’épargne de la nation et à s’empêtrer dans une alliance contre nature avec la finance spéculative européenne. Un système de Ponzi qui tournerait à la catastrophe si d’aventure les marchés financiers se crashaient. Est-ce à cause de cette crainte que, en 2011, le parlement a voté pratiquement comme un seul homme et presque sans débat la loi sur les banques «too big to fail» (trop grandes pour faire faillite)? En vertu de celle-ci, les créanciers de ces établissements, dont les épargnants bien sûr, verraient leurs économies confisquées pour participer au sauvetage. Officiellement, tous les dépôts sont garantis jusqu’à concurrence de 100’000 francs, nous dit-on. «Pas garantis mais privilégiés», a corrigé en catimini le Conseil fédéral, expliquant que ces fonds ne seraient pas nécessairement remboursés en cas de faillite bancaire. Ne dit-on pas que c’est dans ce genre de détail que le diable se cache? Dans un livre choc, l’économiste vaudois Vincent Held dénonce ce qu’il nomme la fuite en avant éperdue de la Banque nationale suisse (BNS) pour affaiblir le franc et alerte sur les graves dangers que cette politique fait peser, selon lui, sur le pays et ses citoyens. – La Banque nationale suisse (BNS) vole de record en record: 30,7 milliards de francs de bénéfice au premier trimestre 2019 et fonds propres culminant à 167 milliards de francs. Malgré ce trésor de guerre, elle ne distribue que 2 milliards par an à la Confédération et aux cantons. Pourquoi ne fait-elle pas plus profiter les citoyens de cette manne financière? – Vincent Held: La question mérite en effet d’être posée puisque la Constitution et d’autres lois prévoient que la BNS distribue deux tiers de ses bénéfices aux cantons et le tiers restant à la Confédération. Aujourd’hui, elle ne redistribue annuellement qu’un peu plus de 1% de ses bénéfices cumulés. La loi prévoit pourtant une «répartition constante» des bénéfices. Mais à l’heure actuelle, nous sommes plutôt dans une logique de distribution minimale. – Dans ce cas, pour quelle raison les cantons et la Confédération ne réclament-ils pas leur dû selon vous? – Sur le plan légal, personne ne peut forcer la BNS à faire quoi que ce soit. Comme l’a expliqué Philipp Hildebrand, son ancien patron, alors qu’il était sous enquête de la Confédération, «la BNS est indépendante et fait ce qu’elle veut». Concrètement, cela signifie qu’elle est libre d’interpréter le droit à sa manière. Aucun tribunal ni aucune institution politique ne peut la contraindre à verser plus que les 2 milliards précités. En 2016, elle n’avait par exemple reversé que 1,7 milliard à l’Etat, alors qu’elle venait de réaliser un bénéfice de 24 milliards. Ça montre bien que ces versements sont totalement à bien plaire. – Aucune chance, donc, que la BNS contribue à renflouer l’AVS ou les caisses de pension par exemple… – En fait, ce serait plutôt le contraire. Je m’explique. Depuis quatre ans, la Banque nationale a engrangé 6,7 milliards de francs grâce aux intérêts négatifs (1). Il faut bien comprendre que cet argent a été prélevé sur le système financier suisse, notamment sur les caisses de pension, l’argent de tout le monde, en somme. Or 6,7 milliards de francs, c’est exactement le montant que la BNS a reversé à l’Etat ces quatre dernières années. – Vous voulez dire que la BNS ponctionne les épargnants pour reverser l’argent aux cantons et à la Confédération? – Oui, tout à fait. Vous noterez d’ailleurs que les caisses de pension se plaignent aujourd’hui de la charge considérable que représente pour elles le paie...
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Par Liliane Held-Khawam via lilianeheldkhawam.com
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