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La faillite des Etats providence

Georges Lane Publié le 11 janvier 2012
5772 mots - Temps de lecture : 14 - 23 minutes
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Il est une étape dans ma découverte et ma réflexion sur l'organisation de la sécurité sociale obligatoire qui a assujetti les gens en France depuis la décennie 1940, et cela en toute impunité, au moins jusqu'à récemment (cf. ce billet pour davantage d'informations) Quoique méconnues, les pénalités sont aujourd'hui multiples et les plus grosses, devant nous, à l'horizon (cf. le livre que j'ai écrit en 2007 sur le sujet et qui a laissé de marbre les commentateurs patentés). [Début du texte.] 1. L'origine identifiable de la protection sociale en France: une double faillite intellectuelle. L'origine identifiable de la protection sociale (1) est double. 1. Remarquons en passant qu'on ne peut pas parler de protection sociale des Français car tout travailleur en France (chômeur ou non) ou tout « ayant droit » de celui-ci (allié jusqu'au troisième degré de parenté) y est obligatoirement affilié, sans être nécessairement assujetti aux cotisations. Elle tient, d'un côté, dans une faillite de la connaissance en matière économique et politique et, de l'autre, dans une destruction orchestrée de la connaissance en matière d'assurance. 1. A. La faillite de la connaissance en matière économique et politique. La protection sociale que nous connaissons aujourd'hui en France plonge ses racines dans une faillite de la connaissance économique et politique. Les États-providence ont été construits à partir d'un constat: la société est un tout qui a toujours présenté des maux (pauvreté des individus, inégalité des revenus ou des patrimoines, déséquilibre ou instabilité économique, injustice sociale et enfin insécurité ou, si on préfère l'expression, risque social) ; mais la situation est extrême depuis le XIXe siècle. Ce constat a donné lieu à deux grandes interprétations : - ces maux ne sont rien d'autres que des échecs du marché ; - ces maux ne sont rien d'autres que des abus de pouvoir du capitalisme. Bien que distinctes, ces interprétations ont le point commun de conclure que maux, échecs et abus seront perpétuels. Ils sont à attendre dans l'avenir, cette attente, c'est en définitive ce qui est dénommé « risque social » et contre quoi les promoteurs de la sécurité sociale dans la décennie 1940 prétendent avoir trouvé les moyens de faire quelque chose. Le constat a conduit aussi à deux grandes solutions, de nature politique: - l'intervention des hommes de l'État dans le marché pour faire disparaître les échecs, c'est-à-dire le « non-marché », thèse keynésienne ou planiste ; - la disparition des capitalistes ou, si on préfère, la venue des syndicats (représentatifs de la classe ouvrière) pour faire disparaître les abus de pouvoir dont sont victimes les travailleurs, bref le « non-capitalisme », thèse marxiste. Le risque social va permettre, à la fois, l'application de thèses marxistes (le sens de l'histoire et les syndicats ouvriers pour mettre fin aux abus de pouvoir de la classe capitaliste sur la classe ouvrière) et l'application de thèses keynésiennes ou planistes (l'État pour corriger les échecs du marché) ; des applications qui ont en commun une optique matérialiste ou un point de vue d'ingénieur ou de mécanicien. Et il est un fait que les promoteurs de la sécurité sociale se sont abreuvés aux deux sources, sans insister sur leurs différences ou sur celle qu'ils préfèrent - ce qui leur a permis de « ratisser large » -, pour créer l'« organisation de la sécurité sociale » - en abrégé, la « Sécurité sociale » - avec les ordonnances de 1945. Véritables « non-marché » et « non-capitalisme », la « Sécurité sociale » chargera le service public de faire disparaître les maux, échecs ou abus stigmatisés, de produire le « non-risque social ». En pratique, le service public tiendra dans des R.I.R.ES., à savoir : - des Remboursements en monnaie, - des Indemnisations en monnaie, - des Réparations en monnaie ou en nature, et - d'autres Expérimentations Sociales (du type « prestations sociales » et aides diverses). Je ne m'étendrai pas davantage sur la faillite intellectuelle que représente une telle démarche, mais je vais, en revanche, insister sur les conséquences à en attendre, celles que certains prédisaient à l'époque, et celles qui se sont réalisées et se réalisent sous nos yeux, après avoir rappelé un autre aspect de la façon dont la protection sociale a été construite. 1. B. La destruction orchestrée de la connaissance en matière d'assurance. La protection sociale a été construite à partir de 1945 d'une façon diffuse. Elle l'a été, d'une part, sur les débris de l'organisation spontanée ajustée au fil des siècles (qui faisait intervenir propriété, liberté, charité, responsabilité, prévoyance et assurance), mais que le législateur a détruite en un jour ou presque. D'autre part, elle a été construite avec certains débris dont ce même législateur avait pris soin d'exproprier les propriétaires ou responsables (sociétés d'assurance ou mutuelles). A cet égard, la protection sociale plonge ses racines dans une destruction de la connaissance — accumulée et à venir — en matière d'assurance (cf. tout ce qu'ont pu écrire les juristes, « spécialistes » ou non de la sécurité sociale, sur la question à commencer par Gaston Jéze -- qui a certes écrit avant que celle-ci ne soit créée — et à finir par J.-J. Dupeyroux, ou des économistes comme Dupuy, Ray et Gazier ou Strauss-Kahn). "Quelques exemples...", me demanderez-vous. J'en vois trois types : les premiers tiennent dans les éléments d'un constat erroné sur l'assurance, les deuxièmes dans ceux d'une assurance imaginée et les troisièmes dans les moyens à utiliser pour que l'assurance imaginée devienne réalité. i) L'assurance présente des insuffisances (cf. Jèze, 1932, par exemple). - Complainte de certains assurés : les firmes d'assurance s'enrichissent avec le malheur des gens ou n'assurent pas les individus qui en ont le plus besoin, il n'y a pas d'assurance sociale. - Complainte de certains assureurs : C'est la question du risque moral ; les assurés sont des délinquants potentiels ou des irresponsables qui changent de comportement sitôt le contrat signé, l'assurance sociale est impossible a cause du risque moral ; - Diagnostic des hommes de l'État : « vous avez tous raison, nous allons nous en occuper personnellement. » ii) Ce que devrait être l'assurance. En raison des économies d'échelle, il faut un monopole réglementaire, iii) Comment y parvenir. Jèze est flou sur la question bien qu'il donne des éléments de réponse. La réalité sera un coup d'État avec l'instauration d'un monopole bureaucraticosyndical! Ces exemples de destruction de la connaissance en matière d'assurance, qu'on pourrait conforter par maints autres et auxquels on pourrait répondre en long et en large, ne tombent pas du ciel, ils sont le résultat de l'emploi d'une véritable tactique de destruction de la connaissance ou, si on préfère, d'une véritable tactique d'entretien de l'ignorance (ou de l'obscurantisme). La tactique n'est pas nouvelle, même si elle dissimule son vrai visage sous de nombreux masques. Elle a été stigmatisée par des auteurs du XIXe siècle comme Bastiat ou Tocqueville : c'est la tactique habituelle des Socialistes. Alors, elle était utilisée pour porter atteinte à la propriété, à la liberté, à la responsabilité, au Droit (avec un "D") en général, à la charité (au don), à l'épargne, à la prévoyance ou encore à l'instruction. Je tiens à votre disposition les exemples. Je ne prendrai pas l'exemple caractéristique de la responsabilité qui a été développé en 1992 par une conférence d'Euro 92 et à quoi j'avais participé (cf. ce billet). 1. C. Le risque politique Si on juge les mots « faillite », « destruction » ou « construction » trop forts pour caractériser le point de départ de la protection sociale, on pourra dire, pour reprendre un mot de Bastiat, qu'il tient de la « malice ». Cela bien sûr jusqu'en 1945 car, depuis cette année-là, force est de reconnaître que la « faillite » et la « destruction » sont devenues concrètes avec l'organisation par le législateur de la protection sociale forcée et centralisée. Comment, en effet, évoquer autrement les obligations nouvelles édictées aux individus travaillant en France ? N'est-ce pas une destruction de leurs « liberté, responsabilité et propriété » ? Comment évoquer autrement les cotisations en monnaie que doivent verser obligatoirement (sous peine d'amendes) aux organismes de sécurité sociale les travailleurs ? Ceux-ci n'ont-ils pas perdu liberté, responsabilité et propriété ? Comment évoquer autrement l'étatisation dont ont été victimes un grand nombre de sociétés d'assurance ? En vérité, il y a une façon qui n'est pas originale, même si elle est méconnue aujourd'hui. Elle a été utilisée au XVIIIe siècle par les économistes et consistait à parler de l'abus de pouvoir des hommes de l'État. A l'époque, ils proposaient un remède contre le risque d'abus d...
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