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La philosophie sociale de l'homme ordinaire

Ludwig von Mises Extrait des Archives : publié le 17 février 2013
3379 mots - Temps de lecture : 8 - 13 minutes
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Ludwig von Mises.

1. Le capitalisme tel qu'il est et tel qu'il est vu par l'homme ordinaire L'émergence de l'économie comme nouvelle branche de la connaissance fut l'un des événements les plus prodigieux de l'histoire de l'humanité. En ouvrant la voie à l'entreprise capitaliste privée, elle transforma en quelques générations toutes les affaires humaines de façon plus radicale que ne l'avaient fait les dix mille années précédentes. À partir du jour de leur naissance et jusqu'à leur mort, les habitants d'un pays capitaliste tirent bénéfice à chaque minute des merveilleuses réalisations des méthodes capitalistes de pensée et d'action. La chose la plus étrange concernant le changement sans précédent des conditions matérielles auquel a conduit le capitalisme, c'est qu'il fut accompli par un petit nombre d'auteurs et un nombre à peine plus grand d'hommes d'État qui assimilèrent leurs enseignements. Non seulement les masses apathiques, mais aussi la plupart des industriels qui mettaient en oeuvre les principes du laissez-faire dans leurs affaires commerciales, n'arrivaient pas à comprendre les caractéristiques essentielles de leur action. Même aux beaux jours du libéralisme, seules quelques personnes comprenaient pleinement le fonctionnement d'une économie de marché. La civilisation occidentale a adopté le capitalisme sur la recommandation d'une petite élite. Il y avait, dans les premières décennies du XIXe siècle, de nombreuses personnes qui considéraient leur propre manque de familiarité avec les problèmes en jeu comme un sérieux défaut et qui souhaitaient ardemment y remédier. Dans les années qui séparent Waterloo de Sébastopol, il n'y avait en Grande-Bretagne pas de livres dans lesquels on se plongeait avec plus d'ardeur que les traités d'économie. Mais la mode tomba rapidement. Le sujet était trop dur pour le lecteur moyen. L'économie est tellement différente des sciences naturelles et de la technique d'une part, de l'histoire et de la jurisprudence de l'autre, qu'elle semble étrange et repoussante au débutant. Sa singularité heuristique est regardée avec suspicion par ceux dont le travail de recherche est effectué en laboratoire ou dans les archives et les bibliothèques. Sa singularité épistémologique apparaît comme un non-sens aux doctrinaires à l'esprit étroit du positivisme. Les gens voudraient trouver dans un livre d'économie une connaissance qui corresponde parfaitement à leur image préconçue de ce que devrait être l'économie, à savoir une discipline modelée selon la structure logique de la physique ou de la biologie. Ils sont désorientés et cessent d'affronter sérieusement les problèmes dont l'analyse nécessite un effort mental inaccoutumé. Le résultat de cette ignorance est que les gens attribuent toutes les améliorations des conditions économiques aux progrès des sciences naturelles et de la technique. D'après eux, il prévaudrait dans le cours de l'histoire humaine une tendance automatique au progrès continuel des sciences expérimentales de la nature et de leur application pour ce qui est de résoudre les problèmes techniques. Cette tendance serait irrésistible, elle serait inhérente à la destinée de l'humanité et son action se manifesterait quelle que puisse être l'organisation économique et politique de la société. Selon eux, les améliorations techniques sans précédent des deux cents dernières années ne furent pas causées ou favorisées par les politiques économiques de l'époque. Elles ne furent pas une réussite du libéralisme classique, du libre échange, du laissez-faire et du capitalisme. Elles continueront par conséquent avec tout autre système d'organisation économique de la société. Les doctrines de Marx n'ont reçu l'assentiment que parce qu'elles avaient adopté cette interprétation populaire des événements et qu'elles l'ont recouvert d'un voile pseudo-philosophique la rendant agréable à la fois au spiritualisme hégélien et au matérialisme sommaire. Dans la construction de Marx, les « forces matérielles de production » sont une entité surhumaine indépendante de la volonté et des actions des hommes. Elles suivent leur propre chemin, qui est prescrit par les lois inévitables et insondables d'une puissance supérieure. Elles changent mystérieusement et obligent l'humanité à ajuster son organisation sociale à ces changements; car les forces matérielles de production évitent une chose: rester enchaînées par l'organisation sociale de l'humanité. Le contenu essentiel de l'histoire se situe dans la lutte des forces matérielles de production pour se libérer des liens sociaux qui les maintiennent prisonnières. Autrefois, enseigne Marx, les forces matérielles de production prenaient la forme du moulin à bras, et elles ont arrangé les affaires humaines selon le modèle du féodalisme. Quand, plus tard, les lois impénétrables déterminant l'évolution des forces matérielles de production ont remplacé le moulin à bras par le moulin à vapeur, le féodalisme dut faire place au capitalisme. Depuis, les forces matérielles de production se sont encore développées, et leur forme actuelle réclame impérativement de substituer le socialisme au capitalisme. Ceux qui essaient d'empêcher la révolution socialiste se sont engagés dans une tâche sans espoir. Il est impossible d'endiguer la vague du progrès historique. Les idées des partis dits de gauche diffèrent entre elles de bien des façons. Mais elles sont toutes d'accord sur un point. Elles considèrent toutes l'amélioration continue des conditions matérielles comme un processus automatique. Le syndicaliste américain considère son niv...
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