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La troisième voie: mythe et réalité

Jean Louis Caccomo Publié le 19 juillet 2003
4459 mots - Temps de lecture : 11 - 17 minutes
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Chroniques en liberté

La plupart des gens pensent que l'économiste est un être sans valeur humaine, matérialiste et froid, qui ne pense qu'au profit et ne défend que des positions nécessairement anti-sociales, à la solde des patrons. C'est déjà oublier que quand l'économiste s'attache à montrer les vertus de la concurrence, le patron préfère s'abriter derrière toutes sortes d'arguments (techniques, sanitaire ou préférence nationale) pour justifier son refus de la concurrence. Le patron préfère se reposer sur le confortable fauteuil du monopole qui lui évite d'avoir à innover, d'avoir à sans cesse se remettre en cause, d'avoir finalement à répondre aux besoins réels des consommateurs. Pourtant, dans la façon de séparer les informations économiques et les informations sociales, on laisse croire que les décisions économiques se font toujours contre les hommes, contre les salariés, contre la société ou contre l'environnement. Il faut tout de même reconnaître que la formation des économistes, en France, contribue à donner raison à ce cliché tenace. Ceux qui nous parlent d'économie ne donnent pas son meilleur visage à la chose économique. Nous avons le plus souvent à faire soit à des économistes qui ne manipulent que des formules mathématiques sophistiquées pour construire des univers formalisés dont le message échappe au plus grand nombre, soit à des économistes qui déclinent une dialectique virulente dans le but de diaboliser systématiquement le marché, le libéralisme, le profit et le grand Satan américain. La langue de bois peut tout aussi bien se cacher derrière les apparences austères des formules mathématiques que dans les expressions alambiquées des sophistes qui aiment s'écouter parler. Comme je le dis en ironisant dans quelques pamphlets, comme nous n'avons le choix qu'entre les bavards ou les braillards, il est compréhensible que le discours économique ne suscite ni l'engouement des foules, ni les vocations chez les étudiants. Autant se résigner à ne pas étudier l'économie. Au fond, on n'a pas besoin d'être un spécialiste de la physique de l'équilibre dynamique pour faire du vélo. Pareillement, est-il besoin d'être un spécialiste du marché pour créer une entreprise, acheter des actions ou se préoccuper de sa retraite? Non, il faut avant tout être quelqu'un de responsable. Par contre, les responsables politiques qui prétendent contrôler ou réguler les phénomènes économiques devraient faire preuve de plus de modestie par rapport à l'économie. Pour faire un parallèle avec la médecine, quand un homme politique vote une loi du style les 35 heures ou propose une réforme des retraites, c'est comme si un médecin du XVIIe siècle, n'étant pas sûr de faire le bon diagnostic de son patient souffrant d'une fièvre étrange, prend quand même la décision d'ouvrir le ventre en intervenant avec des outils mal adaptés. Si le patient est robuste et de bonne constitution, il survivra à l'expérience; mais si c'est un individu fragile... alors il ne survivra pas à cette épreuve. La France a derrière elle plusieurs siècles d'histoire et d'accumulation. Mais, à force d'expériences ratées et de lois inadaptées qui s'empilent les unes sur les autres, à force de « médecine vaudou » qui se donne l'apparence de politiques économiques rigoureuses, elle est devenue une entité fragile sur laquelle on continue d'intervenir de manière tout à fait empirique. La tragi-comédie de la « réforme » des retraites à la française en est la plus récente illustration. Nous en sommes aujourd'hui arrivés à un point où c'est la survie même de l'économie française qui est en jeu… et donc l'avenir de nos enfants. Les fonctionnaires se demandent aujourd'hui s'ils auront leur retraite demain. Ils se demandent s'ils pourront ne pas travailler. Mais est-on sûr que nos enfants auront tout simplement la possibilité de travailler demain? L'économie est ancrée dans la condition humaine On imagine communément que l'on doit faire des choix à cause de l'existence de l'argent. Si tout était gratuit, pense-t-on, nous ne serions plus obligés de choisir. Alors on en appelle à l'État. Mais avec l'État, non seulement, nous ne sommes plus obligés de choisir, mais nous ne pouvons plus exercer notre liberté de choix du tout. Car, dans les faits, rien n'est gratuit et c'est justement pour cela que nous devons faire des choix, l'existence de la monnaie étant la conséquence de cet état de fait. On ne doit pas faire des choix parce que la monnaie existe; la monnaie existe parce que l'on doit constamment faire des choix. Et pourquoi sommes-nous confrontés à cette nécessité de faire des choix? Parce que notre temps sur cette terre est compté: la première rareté est notre temps et c'est cette rareté primordiale qui conditionne la rareté des moyens à l'origine de tous les comportements et décisions économiques. Les décisions économiques font donc irrémédiablement partie de la condition humaine et reposent sur des considérations humaines. Les animaux n'ont jamais inventé la monnaie, les taux de change ou le commerce: c'est le propre de l'homme. Et comme l'a merveilleusement exprimé Frédéric Bastiat et Adam Smith, ce qui peut être considéré comme un vice au niveau individuel se transforme en une vertu au niveau social: « Il est évident que la Concurrence, c'est la liberté. Détruire la liberté d'agir, c'est détruire la possibilité et par suite la faculté de choisir, de juger, de comparer; c'est tuer l'intelligence, c'est tuer la pensée, c'est tuer l'homme. De quelque coté qu'ils partent, voilà où aboutissent toujours les réformateurs modernes; pour améliorer la société, ils commencent par anéantir l'individu, sous prétexte que tous les maux en viennent, comme si tous les biens n'en venaient pas aussi. » Ou encore « l'intérêt personnel est cette indomptable force individualiste qui nous fait chercher le progrès, qui nous le fait découvrir, qui nous y pousse l'aiguillon dans le flanc, mais qui nous porte aussi à le monopoliser. La Concurrence est cette force humanitaire non moins indomptable qui arrache le progrès, à mesure qu'il se réalise, des mains de l'individualité, pour en faire l'héritage commun de la grande famille humaine. Ces deux forces qu'on peut critiquer, quand on les considère isolément, constituent dans leur ensemble, par le jeu de leurs combinaisons, l'Harmonie sociale. » Donner une image diabolique de l'économie n'est pas innocent. Cela permet de justifier, par contraste, une conception angélique de l'État. Et j'utilise à dessein des termes à connotation religieuse car l'État-providence a voulu se substituer à la Providence. On parle beaucoup de laïcité dans la France d'aujourd'hui, mais l'État est devenu, sinon un Dieu, une « nouvelle idole ». Les gens croient en l'État comme on croyait autrefois au miracle. Il n'y a qu'à constater avec quelle horreur et angoisse les artistes subventionnés, les chercheurs, les fonctionnaires voire mêmes les patrons envisagent le retrait de l'État. À leurs yeux effarouchés, il n'y a jamais « retrait » de l'État mais « démantèlement » de ...
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