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Les conditions du libéralisme (2)

Ludwig von Mises Extrait des Archives : publié le 29 décembre 2013
2843 mots - Temps de lecture : 7 - 11 minutes
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Ludwig von Mises.

3. Propriété et gouvernement Les hommes au pouvoir, les gouvernements, les rois et les autorités républicaines ont toujours été mal disposés à l'égard de la propriété privée. Il est inhérent à tout pouvoir politique de ne fixer aucune borne à son action et d'étendre le plus possible sa sphère d'influence. Tout dominer, ne laisser aucune latitude permettant aux choses d'évoluer librement et sans l'intervention des autorités, c'est à quoi tend en secret tout homme au pouvoir. Mais la propriété privée contrecarre ce désir. Elle crée pour l'individu une sphère qui échappe à l'État, elle fixe des limites aux pouvoirs publics, elle fait naître, à côté de et contre la puissance politique, d'autres puissances. La propriété privée devient ainsi le fondement de toute manifestation libre de la vie, de toute manifestation affranchie de l'État et du Pouvoir, le terrain nourricier de la liberté, de l'autonomie de l'individu et, à plus long terme, de tout progrès intellectuel et matériel. C'est en ce sens qu'on a qualifié la propriété de condition fondamentale de l'évolution de l'individu. On ne peut admettre cette formulation que sous les plus grandes réserves, car l'opposition habituelle entre l'individu et la collectivité, entre les idées et les fins individualistes et les idées et les fins collectivistes, ou même entre la science individualiste et la science universaliste est une expression vide de sens. Il n'a jamais existé de pouvoir politique qui ait volontairement renoncé à freiner le libre et plein épanouissement de la propriété privée des moyens de production. Les gouvernements ne tolèrent la propriété privée que lorsqu'ils y sont obligés, mais ils ne la reconnaissent pas volontiers du fait de sa nécessité. Même les hommes politiques libéraux une fois qu'ils furent au pouvoir ont mis en veilleuse plus ou moins les principes libéraux. La tendance à opprimer la propriété privée, à abuser du pouvoir politique et à refuser de respecter toutes les sphères affranchies de l'État est trop profondément enracinée dans l'âme des hommes au pouvoir pour qu'ils puissent s'en défaire de leur plein gré. Un gouvernement libéral est une contradiction in adjecto. Les gouvernements doivent être forcés à adopter le libéralisme par la puissance de persuasion d'un peuple unanime; on ne peut compter qu'ils puissent être libéraux de leur propre volonté. On comprend aisément ce qui, dans une société constituée de paysans également riches, oblige les hommes au pouvoir à reconnaître les droits de propriété. Toute tentative pour diminuer le droit de propriété dans un tel ordre social se heurterait aussitôt à un front uni de tous les sujets décidés à provoquer la chute du gouvernement. Il en va tout autrement dans une société qui n'est pas purement agricole mais où existent, à côté de l'agriculture, des industries et notamment des grandes entreprises et des grandes propriétés industrielles, minières et de transport. Les pouvoirs publics sont, dans une telle société, parfaitement en mesure de s'en prendre à la propriété privée. Rien n'est en effet, politiquement parlant, plus avantageux pour un gouvernement que la lutte contre la propriété privée, puisque les masses peuvent être facilement montées contre les possédants. C'est pourquoi l'idée chère à tous les monarques absolus, à tous les despotes et tyrans fut toujours de s'allier avec le « peuple » contre les couches des possédants. L'idée de césarisme ne fut pas le fondement du seul deuxième Empire napoléonien. L'État autoritaire prussien des Hohenzollern a lui aussi repris dans la politique allemande l'idée (exprimée par Lassalle dans la discussion constitutionnelle) de gagner à sa cause, dans la lutte contre la bourgeoisie libérale, la masse des travailleurs par une politique étatique et interventionniste. Ce fut l'idée fondamentale de la « royauté sociale » vantée par Schmoller et son école. Mais en dépit de toutes les attaques, l'institution de la propriété privée s'est conservée. L'hostilité de tous les hommes politiques puissants, la lutte que lui ont livrée les littéraires et les moralistes, les Églises et religions, l'inimitié profondément enracinée dans les instincts d'envie des masses n'ont pas réussi à supprimer la propriété privée. Chaque tentative visant à remplacer la propriété privée par un autre ordre de production et de distribution s'est toujours révélée rapidement absurde. Force fut de reconnaître qu'on ne peut se passer de la propriété privée, et l'on en est, encore qu'à contrecoeur, revenu à elle. Mais l'on n'a ce faisant jamais...
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