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Les idées mènent le monde, mais les fantaisies la France.

Georges Lane Publié le 17 avril 2007
4992 mots - Temps de lecture : 12 - 19 minutes
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Les idées ne menant pas la France aujourd'hui, la France ne saurait mener le monde comme certains l'aimeraient. Les idées sont en effet en France une considération qui semble dérisoire à beaucoup si j’en juge par les fantaisies et l'insipidité du débat politique actuel, à l'occasion des futures élections présidentielles puis législatives : il y aurait l'économique et le social, l'économique ne serait pas social ; il faudrait vouer aux gémonies la finance et les "maudits spéculateurs qui la font croître et embellir" ; les règles de droit sont immergées dans la législation et seule la réglementation tous azimuts de la puissance publique surnage. Pour cette raison, je ne peux que répéter que le marché politique est verrouillé et ne fonctionne pas. Peut-on d'ailleurs parler, sans faire preuve de fantaisies additionnelles, d'un débat esquissé, d'échanges d'idées abordés ? Les protagonistes ne semblent-ils pas s'escrimer à faire croire que, primo, faire référence à des idées serait de la théorie dans le meilleur des cas, et dans le pire de ... l'idéologie, - même quand elles permettent à l'évidence d’expliquer l’actualité -, secundo, qu’à ce titre, elles ne seraient pas opérationnelles, une “arme” pour capturer les "voix des électeurs" et, tertio, qu’il faut trouver autre chose pour en définitive leurrer ces derniers. Pour sortir de la tourbière, je vous propose d'abord ci-dessous un extrait d'un texte de Ludwig von Mises (1881-1973) écrit en 1938 et intitulé "La lutte des idées". Il permet de comprendre pourquoi les protagonistes du marché politique devraient penser le contraire, pourquoi les idées et la “lutte des idées” sont finalement des objets bien réels et, pour employer une expression à la mode, pourquoi les idées elles-mêmes sont une remarquable "arme de destruction massive" … de l’erreur et du mensonge. Mais depuis 1938, beaucoup d'événements se sont produits et une analyse du raisonnement de Mises - sous jacent en particulier à ce texte - fait apparaître des difficultés. On les évoquera très brièvement dans une deuxième section. Le fait pour quoi j'écris le présent texte est surtout que toutes les connaissances précédentes devraient être des connaissances de base de chaque opérateur du marché politique (électeur ou autre) alors qu'elles sont exclues de l’organisation médiatico-politique et de l’éducation nationales. Qui sait d'ailleurs en France qui était Ludwig von Mises ? La grande majorité "sachante" préfère la référence ressassée - encore cette semaine de mi février 2007, la revue "Challenge" ... - à Marx, Hegel, Keynes, Sartre, Althusser plutôt qu’à Bastiat, Poincaré, Mises, Hayek, Rueff, etc. Pourquoi cette situation française ? Pourquoi cette exception française ? Une réponse se trouve dans un texte que Friedrich von Hayek (1899-1992) - autre grand ignoré des sachants - a écrit en 1949 et intitulé "Les intellectuels et le socialisme". Je vous livre un extrait du texte dans une troisième section. Si la réponse ne vous convainc pas complètement, j'espère qu'y parviendra celle à quoi donne lieu le texte qu'a écrit Gustave de Molinari (1819-1912), il y a près de 125 ans, intitulé "Année 1881" et que je reproduis en section 4. 1. La lutte des idées. "C’est une erreur de croire que les expériences malheureuses qu’on a faites du socialisme peuvent aider à les vaincre. Les faits en eux-mêmes ne suffisent pas à rien prouver ou réfuter ; tout dépend de l’interprétation qu’on en donne, c’est-à-dire des idées et des théories. Les partisans du socialisme continueront à attribuer à la propriété privée tous les maux de ce monde et à attendre le salut du socialisme. Les échecs du bolchevisme russe [1] sont attribués par les socialistes à toutes les causes possibles, excepté à l’insuffisance du système. A leur point de vue le capitalisme seul est responsable de toutes les misères dont le monde a souffert au cours de ces dernières années. Ils ne voient que ce qu’ils veulent voir et feignent d’ignorer tout ce qui pourrait contredire leur théorie. On ne peut vaincre des idées que par des idées. Seules les idées du capitalisme et du libéralisme peuvent triompher du socialisme. Seule la lutte des idées peut permettre d’aboutir à une décision. Le libéralisme et le capitalisme s’adressent à la froide raison, et progressent selon la stricte logique, en écartant délibérément tout appel au sentiment. Le socialisme, au contraire, cherche à agir en suscitant des passions ; il essaie de faire violence à la réflexion logique en excitant le sens de l’intérêt personnel et de couvrir la voix de la raison en éveillant les instincts les plus primitifs. Cette méthode semble déjà donner l’avantage au socialisme en ce qui concerne les hommes d’un niveau intellectuel supérieur, la minorité capable de réflexion personnelle. Vis-à-vis des autres, des masses incapables de pensée, sa position paraît inattaquable. L’orateur qui excite les passions des masses semble avoir plus de chances de succès que celui qui tente de s’adresser à leur raison. Aussi le libéralisme paraît-il avoir bien peu d’espoir de triompher dans la lutte contre le socialisme. Mais ce point de vue pessimiste méconnaît entièrement l’influence que la réflexion calme et raisonnable peut exercer sur les masses ; il exagère énormément la part qui revient aux masses et par là même à la psychologie des foules dans la naissance et la formation des idées dominantes d’une époque. C’est un fait exact que les masses ne pensent pas. Mais c’est là précisément la raison pour laquelle elles suivent ceux qui pensent. La direction spirituelle de l’humanité appartient au petit nombre d’hommes qui pensent par eux-mêmes ; ces hommes exercent d’abord leur action sur le cercle capable d’accueillir et de comprendre la pensée élaborée par d’autres ; par cette voie les idées se répandent dans les masses où elles se condensent peu à peu pour former l’opinion publique du temps. Le socialisme n’est pas devenu l’idée dominante de notre époque parce que les masses ont élaboré puis transmis aux couches intellectuelles supérieures l’idée de la socialisation des moyens de production ; le matérialisme historique lui-même, quelque imprégné qu’il soit de “l’esprit populaire” du romantisme et de l’école historique du droit, n’a jamais osé avancer une telle affirmation. L’âme des foules n’a jamais produit d’elle-même autre chose que des massacres collectifs, des actes de dévastation et de destruction. Or l’idée socialiste a beau n’aboutir dans ses effets qu’à la destruction, il n’en demeure pas moins que c’est une idée. Il a donc fallu que quelqu’un la conçoive, et ce n’a pu être l’oeuvre que de penseurs isolés. Comme toute autre grande idée, le socialisme a pénétré dans les masses par l’intermédiaire de la classe intellectuelle moyenne. Ce n’est pas le peuple, ce ne sont pas le masses qui ont été gagnées les premières au socialisme et d’ailleurs même aujourd’hui les masses ne sont pas à proprement parler socialistes, elles sont socialistes agraires et syndicalistes. - : ce sont les intellectuels. Ce sont eux, et non les masses, qui sont les supports du socialisme. La puissance du socialisme est, comme toute autre puissance, d’ordre spirituel, et elle trouve son soutien dans des idées ; or les idées viennent toujours des chefs spirituels et ce sont ces derniers qui les transmettent au peuple. Si les intellectuels se détournaient du socialisme, cela en serait fait de sa puissance. Les masses sont incapables à la longue de résister aux idées des chefs. Il est certes des démagogues qui pour se pousser en avant sont prêts contrairement à leur propre conviction à présenter au peuple des idées qui flattent ses bas instincts et qui sont susceptibles par cela même d’être bien accueillies. Mais à la longue les prophètes qui au fond d’eux-mêmes sont conscients de leur fausseté sont incapables de résister aux a...
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