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Pourquoi l'état fragilise l'économie en prétendant la réguler ?

Vincent Bénard Publié le 25 mai 2010
5266 mots - Temps de lecture : 13 - 21 minutes
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Objectif Liberté

Régulation de l'économie : qu'est-ce que cela veut dire ? La semaine dernière, nous examinions le rôle de l'état régalien dans la société en général et dans la "régulation" de l'économie et de la finance en particulier. Mais, comme nous l'avons entrevu, il y a bien d'autres raisons que l'état s'est donné pour intervenir dans l'économie. Et le moins que l'on puisse dire est que les hommes de l'état ne manquent pas d'imagination pour s'en inventer de nouvelles. Quels sont les principes qui guident l'état en matière de régulation économique ? Sont ils complémentaires de l'action privée ? Ou antagonistes ? Peut-il exister plusieurs philosophies de la régulation ? Les politiques de l'état en la matière sont elles cohérentes ? Quels effets en attendre ? Quels sont les sortes de "régulations" existantes de l'économie ? Le terme "régulation" fait partie de ces mots qui sont répétés dans maints articles sans être jamais explicités, mais qui peuvent avoir des sens différents selon le contexte. En outre, le mot français et le mot anglais sont de faux amis, le terme français suggérant une action physique de maintient d'un flux constant, alors que le terme anglais suggère une législation. Cependant, et de plus en plus, "régulation" en français est utilisé comme un terme législatif à la place de réglementation. Enfin et plus rarement, l'intervention directe de l'état dans un domaine peut être qualifiée de "régulation" par certains auteurs. A l'opposé, les libéraux évoquent souvent la "régulation" par le marché, parfois l'auto-régulation, lesquels évoquent plutôt des ajustements entre offre et demande, ou l'élimination des mauvais acteurs de marché. Il convient de mettre un peu d'ordre et de grouper en familles logiques ces différentes "régulations", sans comparaison ni jugement de valeur pour le moment. Régulations étatiques Lorsque l'état (au sens large. Comprendre: "les pouvoirs publics") intervient dans un domaine d'activité, il peut le faire de différentes façons : - Curative: traditionnellement, cela recouvre la litigation des conflits et des violations de la loi par la justice, ou encore l'injection d'argent pour réparer des dégâts causés par une suite d'événements non désirables et mal prévus. - Préventive (législative, réglementaire, normative...): de par la loi, la norme ou le règlement, l'état peut autoriser ou interdire à l'action individuelle de sortir d'un cadre prédéfini antérieurement à la survenance de désordres. L'état peut en outre être partie prenante du contrôle de la bonne application des lois par des services d'inspection. Les autorités de marché (tels que la SEC aux USA, ou l'AMF en France) et leur action se situent clairement dans cette famille d'interventions. - Comportementale: par la subvention ou l'impôt, l'état peut tenter de favoriser certains comportements des agents économiques. Ces subventions et taxes peuvent être parfois visibles, parfois plus sournoises. - Protectrice: l'état peut "protéger" certains acteurs de l'économie, soit en renchérissant le coût des produits concurrents (douanes, normalisation "orientée"), soit en garantissant des monopoles ou des oligopoles privés, avec ou sans contrepartie. Les agences de notation, véritable oligopole de fait, obéissent à ce schéma. Fannie Mae ou la caisse des dépôts aussi. Sans parler de la FED, monstre juridique privé à la base mais sous totale protection des pouvoirs publics. - Monopolistique : l'état peut se substituer à l'initiative privée en opérant lui même certaines activités. Plutôt que de "régulation", il faut ici parler d'éviction de l'activité privée. Régulations privées, régulations par le marché La prévention des désordres ou risques de désordres consubstantiels à l'activité privée est confiée à plusieurs mécanismes distincts, de nature préventive ou curative. Si l'on s'en tient au coeur de sujet de cet article, à savoir la régulation de la sphère financière, on peut distinguer : - L'éducation, l'apprentissage: les essais et erreurs individuelles, et la publicité qui leur est faite, contribuent à développer un savoir permettant de déterminer de bonnes et moins bonnes pratiques dans la conduite des affaires. - La standardisation permet de comparer l'action ou la production de divers agents économiques selon des critères communs, et aussi plusieurs productions d'entreprises différentes d'interagir. Les normes comptables appartiennent à cette famille d'interventions. - L'information économique permet aux différents acteurs susceptible de contractualiser une relation de déterminer l'opportunité et les conditions de gestion des risques liés à chaque contrat. Ainsi, une entreprise qui se fragilise, si elle ne peut le dissimuler, obtiendra de moins bonnes conditions de paiement de ses fournisseurs, de moins bon taux d'intérêts de la part des banquiers... - La litigation peut, éventuellement, être le fait d'arbitrages privés. Les conditions du succès de tels arbitrages sont multiples. - Les procédures de faillite et de liquidation sont l'outil ultime de reconnaissance d'éventuels échecs de l'initiative privée. Ce dernier point aurait pu également être inclus dans les régulations d'ordre public, l'insolvabilité impliquant souvent le non respect d'engagements induisant la possibilité d'une intervention d'un tribunal. Naturellement, la barrière entre régulations publiques et privées n'est pas toujours claire. Une activité économique libre, au sens de la relative présence de concurrence, peut n'en être pas moins encadrée par des lois. Une norme définie par certains professionnels peut être rendue obligatoire par le législateur. Et ainsi de suite. A ce stade, et si nous acceptons la prémisse que nous nous situons dans une économie de marché, où la base du fonctionnement de la société est une économie fondée sur l'initiative individuelle et l'échange librement consenti, alors nous pouvons poser le principe que les modes de régulation privés sont toujours possibles, puisqu'ils relèvent d'une logique de marché, et la question qui se pose à nous est de savoir quel est leur domaine d'efficacité, si certaines régulations étatiques peuvent améliorer le fonctionnement global de l'économie, ou si au contraire certaines interventions publiques peuvent nuire au bon fonctionnement des instruments de régulation privée. ------ L'objet régulé : l'échange La base de l'économie a de tout temps été l'échange. Dès que les humains ont compris qu'il était de leur intérêt de diviser les tâches productives au sein d'un groupe pour améliorer les conditions de vie du groupe, la nécessité de l'échange s'est imposée. Même dans les économies les moins libérales, l'échange a toujours joué un rôle. Selon les sociétés, l'échange a oscillé du plus libre au plus encadré par les pouvoirs en place. Mais la base de la survie, de la vie et de l'accomplissement des êtres humains repose sur leurs capacités à échanger. Aujourd'hui, il n'est plus guère d'économiste sérieux ou de politicien qui ose encore affirmer que des échanges totalement planifiés par la puissance publique soient une bonne chose. En revanche, nombreux sont ceux qui pensent qu'un certain niveau d'intervention de l'état - "état" au sens large, pris comme l'ensemble des pouvoirs publics locaux, nationaux, et pourquoi pas, demain, mondiaux - est nécessaire, pour corriger certains dysfonctionnement résultants, selon eux, des échanges libres. Réguler l'économie signifie donc, à la base, intervenir dans les échanges, c'est à dire modifier le périmètre et le résultat final qui aurait résulté d'échanges sans la moindre intervention. Une notion importante : l'équilibre dynamique de l'échange La caractéristique de l'échange libre est d'être perçu comme gagnant pour les deux parties au moment de l'échange, sans quoi au moins une des deux parties ne l'entreprendrait pas. Lorsque vous échangez, par exemple, une automobile contre une certaine somme d'argent, vous estimez que la mobilité - et l'affichage d'un certain statut social - que vous donnera l'automobile pendant une certaine durée a plus de valeur que l'argent que vous lâchez dans la transaction, alors que le concessionnaire automobile, qui à titre personnel n'a pas d'usage valable des cinquante voitures sur son parking, est à l'évidence plus intéressé par l'argent qu'il en retire, qui lui permettra de réaliser d'autres échanges qui lui seront utiles. Il est à première vue délicat d'employer le terme d'équilibre pour qualifier ces échanges, le terme d'échange "équilibré" ayant été déjà utilisé dans un autre sens et un autre contexte par d'autres économistes, et étant souvent utilisé à tort par les adeptes d'un fort interve...
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