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Rapport Balladur sur les collectivités, beaucoup de bruit pour pas grand chose

Vincent Bénard Publié le 18 mars 2009
3745 mots - Temps de lecture : 9 - 14 minutes
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Objectif Liberté

L'intelligence la plus avérée ne peut rien produire de bon si les matériaux de base de son raisonnement, les principes qui alimentent son travail, sont biaisés. Un tel constat s'applique totalement au rapport de la commission dite "Balladur" sur la réforme des collectivités locales. Un produit intelligent, intelligible, même pas trop ennuyeux, mais au final mauvais, voire très mauvais, parce que les auteurs ont cantonné leur raisonnement dans la gangue d'un préjugé de type étatiste dont ils n'arriveront sans doute jamais à se défaire. Les questions de base posées par le rapport sont pertinentes : n'y a-t-il pas trop de collectivités locales ? Leurs champs de compétences respectifs ne sont ils pas redondants, occasionnant des dépenses inutiles ? La fiscalité locale ne pousse-t-elle pas elle même à la dépense, et n'est elle pas pénalisante pour l'économie ? La question oubliée Malheureusement, le rapport omet, biais étatiste oblige, de poser "la" question importante qui aurait pu orienter très différemment ses conclusions: "L'intervention publique, dans son principe comme dans ses modalités, est elle justifiée sur chacun des champs de compétence aujourd'hui investi par l'état et les différents niveaux de collectivités locales ?" Le rapport Balladur propose principalement d'une part de créer de grandes métropoles gérées par un super-maire élu au suffrage universel, et d'autre part de dissoudre très progressivement les départements, mais sans le dire, au sein de grandes régions, dont, affirme-t-il, la "masse critique" serait suffisante pour mener de "grandes politiques publiques locales". D'autre part, la réduction du nombre d'entités amènerait, selon le rapport, des espoirs d'économie sur le coût de la bureaucratie. Bref, le rapport Balladur propose de rebattre les cartes des attributions publiques. Il ne pose pas la question pourtant cruciale de leur périmètre global. Tactiquement, du point de vue de ceux qui ne jurent que par la régionalisation, c'est intelligent. Maintenir en survie artificielle les départements comme sous-chambre de la région, pour amadouer les conseils généraux, et réduire l'opposition à la fusion: très bonne approche politicienne. Mais du point de vue de l'intérêt pour le citoyen, la réforme Balladur frise le zéro absolu. Smaller is better ! J'ai déjà eu l'occasion de démonter les préjugés véhiculés par le rapport Balladur lorsque des propositions assez proches avaient été formulées par un autre rapport d'énarque, Jacques Attali. Par pure paresse, je copie colle des extraits de ce que j'écrivais alors: Face à cette profusion, la réponse la plus courante est qu'il faudrait fusionner les échelons les plus petits au profit d'entités institutionnelles plus grandes: 36 000 communes ? C'est bien plus que nos voisins, nombreux sont ceux qui pensent qu'il faudrait les supprimer au profit des intercommunalités, aujourd'hui répandues, mais qui font doublon. De même, 100 départements, je vous demande un peu ? Sûr qu'une vingtaine de grandes régions, capables de "rivaliser avec les länder allemands", capables de "lancer de grandes politiques", seraient bien préférables, il faudrait donc leur transférer les ressources des départements et supprimer ces derniers. (...) Le problème réside moins dans la taille des divisions administratives que dans les compétences qui leurs sont données, et dans la répartition des compétences entre structures publiques et initiative privée. Transférer plus de pouvoir à des entités plus grandes ne fait que recréer à l'échelon inférieur de petits états. "Lancer de grandes politiques publiques" ? la belle affaire, c'est sans doute ce dont nous avons le moins besoin aujourd'hui. Il faut donc étudier à la fois la problématique "verticale" de la répartition des compétences entre échelons institutionnels, mais aussi la question "horizontale" de la répartition des différents secteurs d'activité de la société française entre secteurs public et privé, ce qui oblige à se sortir de la tête les grands stéréotypes de l'action politique Française. Arguments des partisans de la fusion Les arguments des "fusionnistes" sont donc, nous l'avons vu, de quatre ordres: 1 – Des entités plus grandes aboutissent à moins de bureaucratie 2 – 26 régions coûteraient moins cher que 100 départements 3 – Des grandes régions peuvent mener de grandes politiques 4 – Une plus grande unité aboutit à un développement plus harmonieux de l'espace. Moins de bureaucratie: un raisonnement surprenant ! Alors que tout le monde s'accorde pour dire que l'hyper-centralisation des pouvoirs aux mains de l'état avant 1982 était préjudiciable à la bonne marche des affaires du pays, il est curieux que l'on puisse affirmer que 26 régions seraient moins bureaucratiques que 100 départements. Dans ce cas, pourquoi ne pas considérer qu'un Etat serait moins bureaucratique que 26 régions, et qu'il faille supprimer ces dernières ? En fait, ceux qui avancent de telles propositions n'ont sans doute qu'une idée très vague du fonctionnement des administrations "de terrain", parce qu'ils ne la connaissent pas, ou n'ont fréquenté que les hautes administrations centrales, qui sont un milieu plutôt à part. Tous ceux qui ont fréquenté différentes échelles d'administration le savent: plus une administration gagne en volume, plus elle tend à perdre en réactivité et en pertinence. Alors que l'élu de Jonzac est très proche de ses citoyens, le bureaucrate de La Rochelle l'est un peu moins. Quant à celui de Poitiers, il n'est guère plus proche du responsable de l'entretien des routes de Surgères que son collègue de Paris ne l'est lui-même. Qui sait mieux si la création d'une déviation autour de sa commune est d'un intérêt supérieur: le maire de la petite commune locale, ou l'expert routier désincarné qui dirige un service "planification territoriale" au sein de la capitale régionale ? (...) Si, par exemple, les quatre départements de Poitou-Charente venaient à être absorbés par la région, les effectifs dédiés à la réalisation de des tâches de proximité n'évolueraient pas (les structures passent, les missions restent), et il est probable que la bureaucratie ...
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