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Réflexions pour aujourd'hui et pour demain: politiques et idées

Ludwig von Mises Extrait des Archives : publié le 26 février 2012
4032 mots - Temps de lecture : 10 - 16 minutes
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Ludwig von Mises.

Au siècle des Lumières, dans les années où les Nord-Américains fondèrent leur indépendance, et quelques années plus tard quand les colonies espagnoles et portugaises se transformèrent en nations indépendantes, la mentalité dominante dans la civilisation occidentale était empreinte d'optimisme. En ces temps-là, les philosophes et hommes d'État étaient tous pleinement convaincus qu'ils vivaient les débuts d'une ère de prospérité, de progrès et de liberté. Les gens espéraient fermement que les nouvelles institutions politiques – les gouvernements représentatifs établis constitutionnellement en Europe et en Amérique – feraient merveille, et que la liberté économique améliorerait indéfiniment les conditions d'existence de l'humanité. Nous savons bien que certaines de ces perspectives étaient trop optimistes. Il est certainement vrai que nous avons constaté, aux dix-neuvième et vingtième siècles, une amélioration sans précédent de la vie économique, rendant possible, pour une population beaucoup plus nombreuse, un niveau de vie moyen beaucoup plus élevé. Mais nous savons aussi que nombre d'espoirs nourris par les philosophes du dix-huitième siècle ont été fâcheusement dissipés – notamment l'espoir qu'il n'y aurait désormais plus de guerres et que les révolutions seraient inutiles. Ces rêves d'avenir ne se sont pas réalisés. Au cours du dix-neuvième siècle, il y eut une période pendant laquelle les guerres diminuèrent à la fois en nombre et en gravité. Mais le vingtième siècle amena une résurgence de l'esprit belliqueux, et nous pouvons dire sans risque de nous tromper que nous pourrions bien n'être pas au bout des épreuves que l'humanité aura à subir. Le système constitutionnel inauguré à la fin du dix-huitième et au début du dix-neuvième siècles a déçu les espoirs du genre humain. La plupart des gens – et presque tous les écrivains – qui ont étudié ce problème paraissent penser qu'il n'y a pas eu de relation entre les côtés économique et politique du phénomène. Ainsi, ils ont tendance à consacrer beaucoup d'attention au déclin du parlementarisme – au gouvernement par les représentants du peuple – comme si ce phénomène était complètement indépendant de la situation économique et des idées économiques qui gouvernent les activités des gens. Mais cette indépendance n'existe pas. L'homme n'est pas un être qui a d'une part un côté économique, et de l'autre, un côté politique, sans liaison réciproque. En réalité, ce qu'on appelle le déclin de la liberté, du gouvernement constitutionnel et des institutions représentatives, est la conséquence d'un changement radical dans les idées économiques. Les événements politiques sont la répercussion inévitable du changement dans la façon d'orienter la vie économique. Les idées qui inspiraient les hommes d'État, les philosophes et les juristes qui, au dix-huitième et dans les premières décennies du dix-neuvième siècles, ont élaboré les fondements du nouveau système politique, partaient de l'idée qu'au sein d'une nation, tous les citoyens honnêtes ont le même objectif majeur. Ce but ultime auquel tous les gens convenables devraient se vouer, est le bien-être de la nation entière et aussi le bien-être des autres pays – car ces hommes remarquables par leur morale et leur influence politique étaient convaincus qu'une nation libre ne rêve pas de conquêtes. Ils concevaient les affrontements politiques comme quelque chose de parfaitement naturel, car il est normal qu'il y ait des différences d'opinion quant aux meilleurs moyens de conduire les affaires publiques. Les personnes qui partageaient des idées semblables à propos d'un problème travaillaient ensemble à les promouvoir, et cette coopération s'appelait un parti. Mais la structure du parti n'était pas permanente. Elle ne dépendait pas de la position des individus dans l'ensemble de la structure sociale. Elle pouvait changer si les gens se rendaient compte que leur attitude initiale était fondée sur des données fausses, ou sur des idées erronées. De ce point de vue, beaucoup regardaient les discussions pendant les campagnes électorales, et plus tard dans les assemblées législatives, comme de simples déclarations proclamant à la face du monde ce que voulait un certain parti politique. On les considérait comme des plaidoyers s'efforçant de convaincre les groupes opposés que les idées de l'orateur étaient plus justes, plus avantageuses au bien commun, que celles qu'on avait entendu exposer précédemment. Les discours politiques, les éditoriaux des journaux, les brochures polémiques et les livres étaient écrits en vue de persuader. L'on ne voyait pas de raison pour penser que quelqu'un ne pourrait pas convaincre la majorité de la solidité de ses idées, si ces idées étaient vraiment saines. C'était dans cette optique que les règles constitutionnelles furent rédigées dans les assemblées législatives du début du dix-neuvième siècle. Mais cela impliquait que le pouvoir ne s'immiscerait pas dans les aspects économiques du marché. Cela supposait que les citoyens ne visaient qu'un but politique: le bien du pays dans son ensemble, de la nation dans sa totalité. Et c'est là précisément une philosophie sociale et économique qui a été évincée par l'interventionnisme. L'interventionnisme a engendré une philosophie fort différente. Pour la mentalité interventionniste, c'est le devoir du gouvernement de soutenir, de subventionner, d'accorder des privilèges à des groupes définis. L'idée du dix-huitième siècle était que les législateurs avaient diverses opinions concernant le bien commun. Mais ce que nous avons aujourd'hui, ce que nous voyons dans la réalité quotidienne de la vie politique, dans tous les pays du monde où il n'y a pas tout simplement une dictature communiste, c'est un état de choses où il n'y a plus de véritables partis politiques au sens ancien et classique du mot, mais simplement des groupes de pression. Un groupe de pression est un ensemble de gens qui entendent obtenir pour eux-mêmes un privilège spécial aux dépens du reste de la nation. Ce privilège peut consister en un tarif douanier opposé aux importations de concurrents étrangers, il peut consister en une subvention, il peut consister en des lois qui empêchent d'autres gens de faire concurrence aux membres du groupe de pression. De toute façon, il procure aux membres du groupe une position à part. Il leur donne quelque chose qui est refusé aux autres groupes, ou qui devrait leur être refusé de l'avis du groupe intéressé. Aux États-Un...
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