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Télécommunications : la séparation fonctionnelle, un remède pire que le mal

Martin Masse Publié le 15 juin 2008
2482 mots - Temps de lecture : 6 - 9 minutes
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Le Quebecois libre

L’époque des monopoles téléphoniques est révolue depuis plus d’une décennie en Europe. Mais certains législateurs considèrent que la transition vers un marché des télécommunications concurrentiel n’est toujours pas achevée, ce qui suscite des interventions de leur part. Ces interventions visent officiellement à susciter davantage de concurrence et de dynamisme dans ce secteur, mais constituent parfois des remèdes inappropriés risquant d’avoir l’effet contraire. C’est le cas d’une des mesures actuellement à l’étude à Bruxelles. La commissaire européenne en charge de la Société de l’information et des Médias, Viviane Reding, a proposé en novembre 2007 une série de réformes de la réglementation des communications électroniques. L’une des propositions vise à donner aux régulateurs nationaux le pouvoir d’imposer une « séparation fonctionnelle » des opérateurs historiques (les anciens monopoles) en deux entités distinctes, l’une étant responsable de gérer les infrastructures de réseau, et l’autre d’offrir les services de détail à ses clients(1). Des monopoles pas si naturels Pour bien comprendre la logique qui sous-tend cette mesure, il faut retourner un peu en arrière, au moment où le marché des télécommunications a été ouvert à la concurrence. Les télécommunications, tout comme les réseaux de transport ou de distribution d’électricité, ont la caractéristique de s’appuyer sur des infrastructures extrêmement coûteuses à déployer qui, pour être rentables, doivent connecter entre eux le plus de points d’accès possible. Ces coûts et les contraintes liées à l’espace physique font en sorte que la dynamique dans ce secteur ne correspond pas à la vision traditionnelle de la concurrence. On peut en effet difficilement imaginer que de nombreux réseaux similaires se superposent pour servir les mêmes clients. La première entreprise à avoir déployé un réseau étendu aura toujours une longueur d’avance sur les autres. Pour cette raison, le point de vue économique conventionnel a longtemps considéré la téléphonie comme un «monopole naturel», c’est-à-dire un secteur dont la nature même fait en sorte qu’il est impossible ou très peu probable que deux producteurs se fassent concurrence. Partout dans le monde, les télécommunications sont ainsi devenues un service public monopolisé par l’État, de façon à ne pas laisser à une seule entreprise privée la possibilité de tirer un profit jugé indu de l’exploitation de ce monopole naturel. Cette perspective a toutefois évolué et l’on s’est rendu compte qu’il est en fait possible pour des concurrents de s’établir en répliquant au moins une partie du réseau existant et/ou en utilisant une technologie différente pour offrir le même service. Ainsi, il est possible de nos jours d’avoir une conversation téléphonique de différentes façons: en transmettant un signal analogique ou numérique (IP) sur le réseau filaire traditionnel; en utilisant un logiciel sur son ordinateur connecté à Internet; par l’entremise du câble; au moyen d’un téléphone mobile, etc. Lorsque le monopole légal des opérateurs historiques sur la téléphonie traditionnelle a été aboli, les régulateurs sont intervenus dans le but de compenser la domination complète du marché dont ils avaient pu bénéficier pendant des décennies et pour rétablir un équilibre entre eux et leurs nouveaux concurrents. Ils ont notamment forcé les anciens monopoles à louer à des tarifs avantageux des parties de leurs réseaux aux nouveaux entrants pour permettre à ceux-ci d’offrir des services de téléphonie et d’Internet sans avoir à répliquer une infrastructure complète sur l’ensemble du territoire. Une compagnie peut ainsi typiquement installer son propre réseau de fibres optiques reliant des villes entre elles et louer la boucle locale, c’est-à-dire le fil de cuivre qui va d’un répartiteur à chaque domicile, pour rejoindre directement des clients. Empêcher la discrimination Les opérateurs historiques se sont donc retrouvés d’une part à vendre des services de détail à des clients individuels et, d’autre part, à louer des services de gros (l’accès à la boucle locale par exemple, une opération que l’on appelle dans le jargon de l’i...
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