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A quelques jours d'intervalle, plusieurs articles de presse ont
fait récemment référence à la « guerre
des monnaies ».
Le
quotidien Le Monde
en est même arrivé à titrer un article du 8 octobre 2010
« Dominique Strauss-Kahn redoute 'une guerre des
monnaies'".
1. « La
guerre des monnaies » ?
Eh bien non, l'expression "la guerre des monnaies" n'est pas qu'une
contrepèterie, dernière frasque involontaire du directeur
général du Fonds monétaire international (F.M.I.)
destinée à faire de l'institution qu'il est censé
diriger l'alpha et l'oméga des négociations internationales sur
ce qu'il est convenu de dénommer "système monétaire
international".
Certes, depuis le temps où l'institution a été
créée (1944-45) ou bien celui où elle aurait dû
être abandonnée (1971), les négociations en question sont
permanentes et vont bon train entre les autorités monétaires
nationales - aux frais des contribuables bien sûr
-, avec les succès qu'on sait.
Et depuis le temps où l'idée d'une institution type F.M.I.
n'effleurait pas encore l'esprit de qui que ce soit mais où les
premières négociations internationales voyaient le jour –
décennie 1920 -, le pire est toujours survenu.
Certains comme Jacques Rueff mettait en garde contre le principe de ces
institutions internationales (cf. par exemple Le capitalisme, son propre ennemi... )
« La guerre des monnaies » est un leitmotiv
résultant sinon de l'ignorance ou de l'oubli de ce qu'est la monnaie,
phénomène économique rationnel et tangible, au moins
d'une méconnaissance de ce que peuvent être l'influence de la
monnaie sur l'économie – mondiale – ou celle de telle ou
telle monnaie nationale ou régionale - étant données les
réglementations actuelles... – sur l'économie du
territoire de juridiction de son autorité et, ce faisant,
indirectement, sur les autres économies du monde.
1.A. La monnaie.
Qu'on le veuille ou non, la monnaie est une mise au point progressive d'une
découverte des êtres humains il y a bien longtemps.
De même qu'une pelle donne la capacité de creuser un trou au
cultivateur ou à quiconque qui vise cet objectif, de même, la
monnaie donne à quiconque qui veut échanger un bien qu'il
possède en propriété contre un autre qu'il désire
davantage, la capacité de faire l'échange non plus directement,
mais indirectement.
En d'autres termes, la monnaie divise le facteur praxéologique qu'est
le temps de l'échange en deux temps, celui de l'offre ou de la vente
du bien en propriété contre monnaie et celui de la demande ou
de l'achat du bien désiré avec de la monnaie.
D'un point de vue purement économique, la monnaie réduit le
coût de l'échange, rien d'autre mais c'est beaucoup, surtout
quand on s'en moque et qu'on parle de monnaie comme le font beaucoup de
théories.
Voilà en fait implicitement les trois façons d'exprimer la
vérité analytique qui définit la monnaie.
Tout le reste n'est que littérature sur la monnaie.
Quand elle est bien écrite, on ne peut que s'en délecter, mais
c'est rarement le cas.
1.B. Les formes de monnaie.
De même que la pelle du cultivateur de l'Antiquité a peu de
choses à voir avec les pelles mécaniques dont peuvent se servir
les entreprises du bâtiment et des travaux publics aujourd'hui ou avec
les pelles de la nanotechnologie, de même, la monnaie sous forme de
coquillage ou de tête de bétail de la nuit des temps a peu de
choses à voir avec la « monnaie électronique »
apparue ces dernières décennies, malgré tout.
1.C. Les monnaies
réglementées
Etant données les réglementations nationales en vigueur –
en relation avec, par exemple, la monnaie dénommée
"dollar", celle dénommée "livre
anglaise", la nouvelle en vogue dénommée " yuan renminbi " par exemple - ou
régionales – en relation avec la monnaie dénommée
euro d'une partie des pays de l'Union européenne – qui
interdisent à vous et moi d'émettre une forme de monnaie et
obligent à employer dans les paiements des échanges des
« substituts de monnaie » des types pièce,
billet ou tirage sur un dépôt bancaire, on peut bien sûr
mettre l'accent sur le second temps de l'échange indirect.
Dans ce cas, on parle du droit, de la puissance ou surtout du pouvoir d'achat
généralisé dont on dispose en détenant une
« quantité de monnaie » pièces, billets
ou dépôts à vue ou autre dans une banque.
1.D. Le "marché aux
voleurs".
Mais les autorités monétaires nationales ou régionales,
elles, – il n'existe pas jusqu'à preuve du contraire une
autorité mondiale - n'ont aucune interdiction ni obligation les unes
vis à vis des autres de ces types.
Elles ont seulement, le cas échéant, des soucis.
Et, par exemple, ces soucis ont conduit depuis la décennie 1920
à des négociations internationales et à des engagements
du même tabac un temps … jusqu'au jour où une ou plusieurs
d'entre elles les ont dénoncés unilatéralement...
Une chose est certaine : les engagements se sont faits alors sur le dos de la
– vraie – monnaie – la monnaie mondiale de fait -, à
savoir l'or.
2. La politique
monétaire.
A défaut de mettre l'accent sur la monnaie et les dernières
innovations la concernant – la "monnaie électronique"
-, la vulgate conditionne l'attention sur la « politique
monétaire ».
Rappelons en effet en passant que la politique monétaire est
aujourd'hui la voie de principe par laquelle les gouvernements des Etats des
pays croient influencer la macroéconomie ou l'
« équilibre macroéconomique ».
La politique monétaire est le fait de l' « autorité
monétaire ».
Pour la mettre en oeuvre, en plus des
réglementations qu'on vient d'évoquer, cette autorité
utilise des "instruments" dits de politique monétaire (taux
d'intérêt à - très - court terme ou
« base monétaire ») pour réaliser le
double but qu'elle désire atteindre, à savoir celui de l'
« inflation » basse et de la production réelle
proche de la « production potentielle calculée »
(chaque expression entre guillemets mériterait à elle toute
seule un long développement).
Certains diront qu'au cours des siècles passés, la politique
monétaire s'est développée avec le développement
de l'économie monétaire.
Appelons un chat un chat, la politique monétaire a fait florès
au XXème siècle.
2.A. Un peu d'histoire de la monnaie.
La politique monétaire procède de la monnaie. Il n'est
pas inutile de le rappeler car certains tendent à faire croire le
contraire ces derniers temps : il y aurait une politique monétaire
sans monnaie !
Le débat sur les origines de la monnaie tourbillonne entre des
historiens, des économistes, des anthropologues et des numismates.
En Occident, on croit savoir que les pièces de monnaie sont d'abord
apparues en Lydie au VIIIème siècle avant J.-C.
Mais certains situent leurs origines en Chine.
Et on fait valoir aussi que la monnaie s'est développée comme
moyen d'échange, réserve de valeur et unité de compte.
Selon Hicks (1969) qui a repris Menger (1892), le développement des
pièces a été associé à la croissance de
commerce.
* Hicks, John, R. (1969). A Theory of Economic History.
Oxford: Clarendon Press.
*
Menger, Karl (1992). “On the Origins of
Money”. Economic Journal 2, 238-258.
Les commerçants, en plus des marchandises qu'ils échangeaient,
détenaient des stocks d'un autre bien qui était facilement
stocké, largement reconnu, et divisible, le meilleur exemple est celui
des métaux précieux.
Ce bien a servi d'unité de compte puis de moyen d'échange.
Selon cette histoire, la monnaie est ainsi résulté
d'abord de l'activité du marché, de rien d'autres.
2.B. Le seigneuriage.
Les gouvernements sont entrés dans le « jeu » de
la monnaie quand le monarque s'est rendu compte qu'il était plus
facile de payer ses soldats en « pouvoir d'achat
généralisé » qu'avec des marchandises
particulières.
Cela a mené à l'origine du seigneuriage ou du privilège
du gouvernement de « battre monnaie ».
Le seigneuriage représentait ainsi le prix que l'
« hôtel des monnaies » royal demandait aux gens
pour convertir leurs avoirs en lingot, en pièces.
Les gouvernements se sont aussi donnés un monopole sur
l'émission des pièces de monnaie (soit ils accordaient des
franchises de production soit ils produisaient directement).
2.C. La dépréciation de
la monnaie.
En relation avec la pièce de monnaie, la première politique
monétaire semble avoir tenu dans la dépréciation
où le gouvernement rappelait les pièces de monnaie en
circulation, les fondrait et les mélangeait avec des métaux
moins chers.
Ils changeaient soit le poids soit la qualité des pièces de
monnaie (le titre, la finesse).
Une autre méthode utilisée a consisté à changer
l'unité de compte (voir Redish 2000, Sussman 1993 et Sargent et Velde 2003).
* Redish, Angela (2000) Bimetallism: An Economic and
Historical Analysis. Cambridge: Cambridge University Press.
* Sussman, Nathan (1993). “Debasement, Royal
Reviews and Inflation in France During the Second Stage of the Hundred Years
War”. Journal of
Economic History, Vol. 56, No. 4, pp. 789-808.
* Sargent, Thomas et Velde,
Francois (2002). The Big
Problem of Small Change. Princeton: Princeton University Press.
La
pratique de la dépréciation a été largement
utilisée dans les dernières années de l'empire romain
(Schwartz 1973) mais a atteint sa perfection vers la fin du Moyen Âge
en Europe occidentale.
* Schwartz Anna J. (1973) "Secular Price Change
in Historical Perspective", Journal of Money, Credit and Banking,
Vol. 5, No. 1, Part 2: The
Universities--National Bureau Conference on Secular Inflation.
pp. 243-269.
Sussman (1993)
décrit comment, au quinzième siècle, les monarques
français incapables de faire rentrer des formes « plus
normales » d'impôts, utilisèrent la
dépréciation comme une forme d'impôt d'inflation pour
financer la Guerre de Cent Ans – en cours - avec les Anglais.
La dépréciation était en fait une forme de politique
fiscale plutôt que de politique monétaire mais elle a
été l'étape pour le développement
postérieur de la politique monétaire reposant sur la monnaie
« fiduciaire ».
2.D. Quid de la monnaie de papier ?
La monnaie « fiduciaire » ou « de papier »
émergea des opérations des premières banques
commerciales d'Italie (Cipolla 1967) pour
économiser les métaux précieux utilisés dans des
pièces de monnaie.
Cipolla, C.M. (1967) Money,
Prices, and Civilization in the Mediterranean World, Fifth to Seventeenth
Century, New York: Gordian Press.
Bien
qu'il y ait la preuve que la monnaie de papier a été
émise par décret impérial dans la Chine des premiers
siècles (Chown 1994), on fait remonter son
développement aux orfèvres qui émettaient des
certificats de dépôt comme preuve de leur stockage de
pièces de monnaie d'or et de lingot d'or pour leurs clients.
Chown, John F. (1994). The
History of Money from AD 800, London: Routledge,
pp. 249.
Finalement
ces certificats ont circulé comme moyens de l'échange.
Une fois que les orfèvres ont appris que les certificats
n'étaient pas tous rachetés en même temps, ils ont eu la
capacité de faire circuler des certificats d'une valeur globale plus
grande que leurs réserves d'espèces en or.
Ainsi sont nées la monnaie fiduciaire (la monnaie non
entièrement couverte par des espèces, i.e. de la monnaie
métal), - ce que Mises dénomme « substitut de
monnaie » -, la banque à réserve fractionnaire
– à couverture partielle - et les erreurs sur cette réserve.
Les orfèvres et les premiers banquiers commerciaux ont appris, par
expérience, à détenir une réserve de
précaution suffisante pour satisfaire les demandes de remboursement
dans le cours normal des affaires.
Les gouvernements ont seulement commencé à émettre de la
monnaie papier en Europe au XVIIIème siècle.
Un premier exemple est fourni par la Suède pour financer sa
participation dans la Guerre de Sept Ans (Eagly
1969).
Eagly, Robert, U. (1969). “Monetary Policy and
Politics in Mid-Eighteenth Century Sweden” Journal of Economic History. Vol. 29, No. 4 (Dec.) pp. 739-757.
La monnaie de papier a atteint sa maturité pendant les guerres
révolutionnaires américaines quand le Congrès a
émis des « continentals »
pour financer les dépenses militaires.
C'étaient des billets à ordre susceptibles d'être
convertibles en espèces, mais la promesse n'a pas été
tenue.
Ils ont été émis en quantités massives (un taux
d'émission et un taux d'inflation moyen de 65 % par an selon Rockoff 1984)
Rockoff, Hugh (1984). Drastic Measures: A History of Wage and Price Controls in the United
States. New York: Cambridge University
Press.
Pendant la révolution française, la surémission de la
monnaie de papier, l'assignat, couvert au départ par la valeur des
biens volés à l'église, a conduit à une hyper-inflation (1995 Blanc).
En relation avec la monnaie billet, une première forme de politique
monétaire a été le Système de John Law.
Law a persuadé le Régent de France de convertir la dette
nationale française en actions de sa "Compagnie des Indes"
en 1719.
Il a alors utilisé les actions pour couvrir l'émission de
billets à ordre de la Banque Royale.
L'émission de billets à ordre pouvait alors couvrir et financer
l'émission de nouvelles actions.
Law a alors mené une proto forme typique de politique monétaire
en 1719 pour sauver son système quand il a essayé à la
fois de fixer le taux de change des billets en termes d'espèces, or ou
argent, et de fournir un prix de support pour arrêter
l'écroulement du prix des actions (Bordo
1987).
Bordo, Michael, D. (1987). “John Law”. The New Palgrave: A Dictionary of
Economic Theory and Doctrine. London: Macmillan.
2.E. Les banques centrales.
De nos jours, la politique monétaire est conduite par l'
« autorité monétaire ». C'est elle qui
est l'émetteur de la monnaie nationale et la source de la base
monétaire.
Le plus souvent, les banques centrales accomplissent cette fonction.
Mais dans beaucoup de pays, jusqu'au coeur du
vingtième siècle, du fait de l'absence d'une banque centrale,
elle a été remplie par le Trésor ou dans quelques cas
(l'Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande) par une grande banque
commerciale chargée des revenus fiscaux du gouvernement (Goodhart 1989).
Goodhart, Charles (1989). The
Evolution of Central Banks, Cambridge, MIT Press.
Les
premières banques centrales ont été établies au
XVIIème siècle : Riksbank, la banque
de Suéde, a été fondée
en 1664, la Banque d'Angleterre en 1694 ; le Banque de France en 1800 et la
Banque des Pays-Bas (1814) l'ont été pour aider le fisc des
États-nations nouvellement émergés.
Dans le cas de la Banque d'Angleterre, on a accordé à un groupe
d'investisseurs privés un privilège royal pour fonder une
banque pour acheter et aider à échanger la dette
gouvernementale.
L'établissement de la Banque a permis de promouvoir la création
d'un marché profond et liquide de dettes du gouvernement qui a servi
de base pour développer le système financier (Dickson 1969,
Rousseau et Sylla 2003).
* Dickson, Peter, M. (1969). The Financial Revolution in
England: A Study in the Development of Public Credit, 1688-1756.
London: Macmillan.
* Sylla, Richard et Rousseau, Peter (2003).
“Financial Systems, Economic Growth and Globalization”, in Michael
D. Bordo, Alan Taylor et Jeffrey Williamson (eds.) Globalisation in Historical Perspective Chicago: University of Chicago Press.
La Banque s'est finalement développée comme une banque de
banquiers en prenant des dépôts d'autres banques commerciales naissantes.
Aux yeux de certains, ses grandes réserves d'or et le privilège
de monopole lui ont permis de devenir un « prêteur de
dernier ressort », c'est-à-dire de fournir de la monnaie
à ses correspondants alors qu'était en cas de panique bancaire.
La vraie origine de l'idée de la politique monétaire moderne se
trouve dans l'étalon or classique qui a prévalu de 1880
à 1914.
La politique monétaire telle que nous la connaissons aujourd'hui a
commencé par la Banque qui escomptait le papier d'autres institutions
financières, autant dette gouvernementale qu'effet de commerce.
Le taux d'intérêt auquel la Banque prêtait, fondé
sur ce nantissement, est devenu connu comme le « taux de la
Banque» (dans d'autres pays comme le taux d'escompte).
En changeant ce taux, la Banque pourrait influencer les conditions de
crédit dans l'économie britannique. Il pouvait aussi influencer
des conditions de crédit dans le reste du monde en attirant ou faisant
fuir des fonds à court terme (Sayers 1957).
* Sayers, Richard S. (1957). Central Banking after Bagehot.
Oxford: Oxford University Press.
Une
deuxième vague de banques centrales s'est formée à la
fin du XIXème siècle.
Elle n'avait pas pour souche explicite le motif du revenu fiscal comme cela
avait été le cas avec la première vague, mais davantage
celle de suivre les règles de l'étalon or et d'éviter
des oscillations des taux d'intérêt induites par des forces
saisonnières et par le cycle économique.
A inclure dans ce groupe sont la Banque nationale
suisse en 1907 (Bordo et James 2007) et la
Réserve fédérale des Etats Unis en 1913 (Meltzer 2005).
* Bordo, Michael, D. and
James, H. (2007). “The SNB 1907-1946: A Happy Childhood or a Troubled
Adolescence?” in Swiss National Bank. Centenary Conference Volume,
* Meltzer, Allan H. (2005). A
History of the Federal Reserve, Vol. 3. Chicago: University of Chicago Press.
D'autres vagues de nouvelles banques centrales ont suivi dans la
période de l'entre deux guerres comme les pays dans l'Empire
britannique, les nouveaux états de l'Europe centrale et de
l'Amérique Latine essayaient d'imiter les expériences des pays
avancés (Capie et alii, 1994).
Capie, F., Goodhart, C.,
Fischer, S. et Schnadt, N. (1994). The Future of Central Banking,
Cambridge: Cambridge University Press.
Il
reste qu'en étalon-or, tous les pays définissent leurs monnaie en termes d'un poids d'or de sorte que
toutes les « monnaies fiduciaires » sont convertibles
en or.
Le rôle clé des banques centrales est alors de maintenir la
convertibilité en or de la monnaie.
La théorie monétaire explique que les banques centrales
utilisent leur taux d'escompte pour accélérer l'ajustement des
déséquilibres de balance de paiements, i.e. pour respecter les
règles du jeu.
Le pays en déficit de la balance des paiements avec l'étranger
voit l'or qui s'y trouve partir à l'étranger et en particulier
les réserves en or de la Banque centrale se réduire.
Pour empêcher le mouvement, la banque centrale augmente son taux
d'escompte.
Et inversement en cas d'excédent de la balance des paiements.
Avec la déliquescence organisée de l'étalon or par les
gouvernements ou autres autorités monétaires nationales au
XXème siècle et avec le développement de la monnaie non
convertible en or que ceux-ci ont infligé, chacun de son
côté, aux gouvernés, la banque centrale s'est
donnée ou a reçu soit la fonction de réaliser la
« stabilité des prix », soit la fonction de
réaliser l' « équilibre
macroéconomique », soit celle de réaliser la
« production de plein emploi », soit l'une ou l'autre,
… voire les trois.
L'idée de ces fonctions est résulté,
dans le meilleur des cas, d'apparatchiks du pouvoir, dans le pire, de travaux
d'économistes...
3. Jeux de mass...
âcres.
La vulgate tonitruante actuelle monte surtout en épingle de
prétendus problèmes économiques que pourrait
résoudre une politique monétaire "mondiale" convenue
entre les autorités monétaires nationales.
Et elle les présente à la mode d'une mathématique
appliquée aux sciences sociales (de sigle universitaire M.A.S.S.) en
général, et en particulier, à l'économie
politique ou à la science économique, depuis le milieu de la
décennie 1940, à savoir la « théorie des
jeux ».
La théorie des jeux distingue deux grands types de jeux : les jeux
d'intérêts diamétralement opposés – de
conflit ou de guerre - et les jeux de coopération.
Soit dit en passant, « la guerre des monnaies » n'est
jamais que la dénomination donnée à un « jeu
de conflit ».
Cette dénomination rivalise avec celle de « crise des
monnaies » bien qu'elle devrait davantage rivaliser avec celle de
« guerre des boutons »
étant donné ce que sont les formes de monnaie aujourd'hui et
tout ce qui tourne autour.
Malheureusement, nos gens oublient que « la monnaie est
serve » comme s'est escrimé à l'expliquer toute sa
vie Jacques Rueff (1896-1978).
Ne soyons pas dupes de la méthode qu'ils utilisent.
Y est inhérent que, pour résoudre le jeu, il faut qu'ils
trouvent un théorème, un « deus ex machina ».
Et ils arrivent toujours à en trouver un.
Et celui-ci prend, par exemple, la forme d'une institution
créée pour l'occasion qui ne procèdera donc pas des
actions des êtres humains concernés – puisque le problème
posé est faux et qu'il n'y en a pas -, mais de celles de ceux qui ont
posé le problème en toute impunité, les autorités
monétaires nationales.
La dernière en date est la "facilité européenne de
stabilité financière" - dénommée
par la vulgate le "fonds européen" -.
Le cas échéant, comme c'est le cas aujourd'hui avec les
privilèges supplémentaires de toutes natures qu'ils veulent
donner au F.M.I., ils font plus que rationaliser un coup de baguette magique
d'hier.
4. Un dernier mot.
Bref, « la guerre des monnaies » n'est pas qu'une
contrepèterie en relation avec les négociations internationales
en matière de monnaie et avec un rôle du F.M.I. encore accru dans le
futur système monétaire international.
Elle est une expression "leurre" qui tend à faire perdre de
vue, encore un peu plus, la réalité de la monnaie et tous les
bienfaits à tirer de la monnaie libre aujourd'hui abandonnés
car les monnaies en jeu ont été réglementées par
les législateurs nationaux à la fois progressivement et abusivement dans
le passé, le comble revenant à la monnaie
dénommée "euro".
Georges Lane
Principes de science économique
Georges Lane enseigne
l’économie à l’Université de Paris-Dauphine.
Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du séminaire
J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi les très
rares intellectuels libéraux authentiques en France.
Publié avec
l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous
droits réservés par l’auteur
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