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1. Le
marché financier.
Aujourd'hui, le marché financier donne une capacité aux hommes
de l’Etat d’endetter par la force les contribuables de leur pays,
d’emprunter des montants de monnaie sans commune mesure avec ceux
qu’ils pouvaient emprunter hier.
La cause du changement se trouve d’abord dans les innovations des
dernières décennies : l’innovation technique en relation
avec les nouvelles techniques d’informations et de communications et
l’innovation financière en relation avec la recherche
économique en matière de gestion de patrimoine ou de
portefeuille.
2. Choix politiques
et imposture…
La cause du changement se situe aussi dans les choix politiques que font - et
ont faits ces dernières décennies - les hommes de l’Etat.
Aux termes de ces choix, ils ne réduisent pas ou
n’infléchissent pas comme ils le devraient la tendance
croissante des dépenses publiques, ils n’augmentent pas les
recettes fiscales à due concurrence, mais s’accommodent de la
différence entre le montant des dépenses publiques et celui des
recettes de la fiscalité, à savoir du montant du déficit
du budget de l’Etat.
Les hommes de l’Etat s’en accommodent d’autant plus que le
marché financier « leur sert la soupe » - si on puit dire
- : ils peuvent en effet y emprunter les montants de monnaie dont ils ont
besoin, aussi importants soient-ils, pour couvrir le montant du
déficit périodique.
Et tous ces emprunts en circulation concrétisent l’endettement
des Etats à rembourser dans l’avenir.
2.A. Des pourcentages de
P.I.B. sans signification.
Mais, à entendre les propos tenus ces derniers temps – et d’autres moins récents
… - par le « ministre du budget, des comptes publics et de
la fonction publique » en exercice en France, les dépenses
publiques, les recettes de fiscalité, le déficit
budgétaire, l’emprunt périodique et l’endettement
étatiques seraient cinq notions indépendantes les unes des
autres
Une preuve chiffrée de cette aberration, s’il faut n’en
citer qu’une, est donnée par la démarche officielle tant
française qu’étrangère qui consiste à
exprimer le déficit de l’Etat non pas par rapport aux recettes
de la fiscalité ou aux dépenses publiques comme
l’exigerait la simple logique comptable, mais par rapport au produit
intérieur brut (P.I.B.).
2.B. L’objet
frontière.
Déjà, et à supposer que faire le rapport ait un sens, il
y aurait beaucoup à dire sur cet agrégat de la
comptabilité nationale dénommée P.I.B. qui
résulte en particulier de l’évaluation des services des
agents de l’Etat « au coût des facteurs », i.e.
d’une évaluation purement arbitraire !
On dira seulement qu’il s’agit d’un « objet
frontière »:
« Les objets frontières sont ces objets qui
“habitent“ plusieurs communautés de pratiques et satisfont
les besoins informationnels de chacune d’entre elles.
Ils sont ainsi assez plastiques pour s’adapter aux besoins locaux et
aux contraintes des différentes parties qui les utilisent, et
cependant assez robustes pour maintenir une identité commune à
travers ces différents sites.
Ils sont faiblement structurés pour ce qui est de leur usage commun,
mais deviennent fortement structurés quand ils sont utilisés
dans un site particulier.
Ils peuvent être aussi bien abstraits que concrets. » [Bowker et
Star, 1999 p. 297].
Les promoteurs du concept insistent sur le caractère souvent flou, non
exhaustivement défini, de ces objets frontières, qui leur
permet précisément de servir à la fois dans plusieurs
univers qui auparavant s’ignoraient.
Ceci suggère de rapprocher cette idée de celle de «
langage commun » […].
Le langage naturel a des propriétés analogues : c’est
parce que les locuteurs ne passent pas leur temps à expliciter le sens
et le contenu des mots prononcés que la communication est possible.
Les objets produits par la statistique publique (le taux de chômage,
l’indice des prix, le P.I.B. ....) sont dans le même cas.
Une explicitation complète de leur mode de construction et de leur
contenu risquerait de ruiner leur efficacité argumentative,
non pas seulement parce qu’elle « dévoilerait » des
conventions ou des approximations non soupçonnées par
l’utilisateur,
mais tout simplement pour des raisons d’« économie »
du cours des échanges, des débats, des démonstrations
dans lesquels les arguments statistiques trouvent place.
[Je ne saurais trop insister sur le fait que c'est un statisticien - donc
"coupable" - qui écrit ces mots : ceux-ci ont d'autant plus
de "valeur" et doivent d'autant plus faire frémir...]
Plus profondément même, le travail statistique suppose
l’addition et donc l’agrégation de choses dont
l’incommensurabilité éventuelle ne peut être
surmontée qu’au prix de conventions d’équivalence.
Ainsi formulée, la démarche est (ou semble) consciente, voulue,
assumée.
Mais l’idée d’objet frontière suppose une forme de
« naturalisation » de l’objet résultant de la mise
en équivalence, qui fait disparaître son caractère conventionnel,
ce qui lui permet de circuler d’une communauté de pratiques
à une autre, en oubliant ces conventions originelles.
L’analyse fine de l’histoire d’un système
statistique montre les opérations concrètes, souvent lourdes et
coûteuses, qu’implique la mise en place d’une telle
machinerie administrative et cognitive.
La notion d’objet frontière s’applique bien aux outils
techniques et juridiques, conçus et façonnés dans les
années 1940 et 1950 en vue, notamment mais non uniquement, de
sous-tendre un système d’information statistique.
En effet, plusieurs d’entre eux (le Plan comptable
général, le fichier des entreprises, la loi de 1951, la
nomenclature des CSP, l’indice des prix...) servent à des usages
nombreux, sont mis en avant dans des contextes différents par des
acteurs qui n’ont rien en commun sinon la référence
à ces objets. D’une certaine façon, la
«planification à la française», concertée et
indicative, débattue dès les années 1950 dans des
«commissions de modernisation» rassemblant des «
représentants des partenaires sociaux », est une sorte
d’orchestration de ces objets frontières [Hickman 1965,
Desrosières 1999].
La comptabilité nationale est, de ce point de vue, un "super
objet frontière", dont certains ont pensé à un
certain moment (des années 1950 à 1970) qu’il pouvait
potentiellement englober tous les autres. » (cf. A.
Desrosières, 2003)
2.C. Bref…
Bref, et malgré ce qu’en disent ou n’en disent pas notre
ministre et les officiels nationaux ou étrangers (y compris les
organisations internationales), rapporter l’une ou l’autre des
notions citées, et en particulier le déficit budgétaire,
au P.I.B. ne veut strictement rien dire !
Et
il en est de même de l’endettement de l’Etat exprimé
en pourcentage du P.I.B.
Pardonnez-moi ces mots, Monsieur le Ministre, mais, au mieux, « vous
pédalez dans la crème Chantilly…» (ci-contre) - que
vous devez bien connaître...-, au pire, vous tendez à abuser le
citoyen…
3. Quelques
dissonances exemplaires supplémentaires.
La rhétorique mise de côté, on peut se demander si le
choix politique du déficit budgétaire périodique et de
tout ce dont il procède peut durer encore longtemps.
Pour répondre à l’interrogation, plusieurs
éclairages complémentaires sont à combiner.
3.A. Les
déficits budgétaires de l’Etat de la France.
Si on prend l’exemple de l’Etat de la France, force est de
constater que le déficit budgétaire s’est creusé
sans arrêt depuis la décennie 1970 et le soi disant «
premier choc pétrolier » (cf. http://blog.georgeslane.fr/category/Finances-publiques
).
Il s’est approfondi dans le même sens malgré des
gouvernements successifs prétendument politiquement différents,
voire diamétralement opposés.
3.B. Le passage
à l’euro.
Il s’est renforcé dans le même sens, d’une part,
malgré le remplacement de la monnaie nationale « franc
français » par une monnaie nouvelle, régionale,
dénommée « euro », créée de toutes pièces,
sortie de l’imagination de certains hommes de l’Etat, à
partir du 1er janvier 1999.
D'autre part, … malgré aussi l’objectif que
s’étaient donnés les hommes de l'Etat des pays de
l’euro qu’en 2002, les Etats devraient avoir des budgets en
équilibre.
En d’autres termes, l’euro devait être l’image
monétaire de l’équilibre budgétaire des pays de
l’euro et il s’est avéré à
l’expérience celle d’une véritable peau de
panthère de déficits budgétaires.
3.C. Le prix du DM en
FF.
Reste que le remplacement de la monnaie - il faut le souligner -, s’est
fait en 1998 sur la base de taux de change pour le moins discutables.
En particulier, il a été convenu que :
1 € = FF
6,55957 = DM 1,95583
soit :
DM 1 000 = FF 3
353,86
d’où :
1 € = U.S. $
1,18
Mais, depuis la grande réforme monétaire de 1948 en
République fédérale allemande (R.F.A.) instituant le
Deutsche Mark (DM), jamais le franc français (FF) et le DM
n’avaient évolué en harmonie et, périodiquement,
le FF avait été dévalué par rapport au DM ou
bien, si on préfère, le DM avait été
réévalué par rapport au FF.
Le DM était ainsi passé en seulement cinquante années :
de FF 0,74 à
FF 3,35,
soit une multiplication par plus de 4,5 !
Et certain a eu le culot de parler, certes en 1979, vingt ans avant l'euro,
des "Trente
glorieuses" !
Et que serait-il advenu si, au début de la décennie 1990,
l'Allemagne n'avait pas été réunifiée et si le DM
de la R.F.A. n'avait pas été tout simplement instauré
dans feue la République "démocratique" allemande ?
L'addition n'aurait-elle pas été plus salée encore pour
le FF?
3.D.
L’étonnement.
Quand on savait ou n’oubliait pas ces faits, quand on se
remémorait en particulier l'évolution précédente,
il y avait de quoi être interloqué par la décision de
remplacement, toutes
choses égales par ailleurs.
Il y avait d’autant plus lieu de l’être
qu’après 1998,
- les hommes de l’Etat de la France ne laissaient pas présager
qu’ils changeraient leurs choix politiques pour les harmoniser avec
ceux de leurs homologues d’Allemagne – la France était
alors en pleine cohabitation politique, Jacques Chirac, président de la
République dit "de droite", Lionel Jospin, Premier ministre
dit "de gauche" -,
- et les hommes de l’Etat de l’Allemagne ne laissaient pas
davantage espérer qu'ils changeraient leurs choix politiques pour les
harmoniser avec ceux des Français – la réunification
allemande qui ne datait que du début de la décennie 1990,
était en cours et loin d'être achevée -.
3.E. Un flash de
théorie économique.
Arrivé à ce point, il convient de faire remarquer - en passant
- que, d’une façon générale, dans le passé,
la monnaie a réduit progressivement le coût de
l’échange en desserrant la contrainte de la double
coïncidence des besoins, en divisant le temps de l’échange
en deux temps – le temps de la vente du bien non préféré
contre monnaie et le temps de l’achat du bien désiré avec
la monnaie – et, avouons-le, les économistes ont
été longs à s’en apercevoir et à en donner
l’explication – encore aujourd’hui, certains
économistes…-.
La raison d'être de la monnaie est la réduction du coût de l'échange et,
à ce titre, elle est à envisager comme un processus
d'innovation majeur de l’humanité. Rien d'autre, mais
c'est déjà beaucoup.
Et le coût de l’échange n’a pas été
encore réduit à zéro.
Et on peut seulement espérer qu’il deviendra asymptotiquement
nul dans l’avenir grâce à
l’ingéniosité de l’esprit humain.
A l’opposé, l’institution de l’euro a provisoirement
interrompu le processus dans l'aire des pays qui l’ont adopté
comme monnaie ou, tout au moins, l'a fortement entravé.
Qu’on le veuille ou non, l’euro a augmenté le coût
de l’échange en instaurant une nouvelle contrainte qui
n'existait pas auparavant, à savoir celle de la coïncidence multiple
des choix politiques des hommes de l’Etat (cf.
http://blog.georgeslane.fr/category/Economie-europeenne/page/6
).
Cette coïncidence multiple est une contrainte qu’ont passée
sous silence les hommes de l’Etat et qu’ils effleurent de temps
à autre quand ils parlent de « coordination des politiques économiques
» à défaut de faire allusion à son spectre, le
"pacte de stabilité et de croissance".
3.F. Le pacte de
stabilité et de croissance.
A l'initiative - en 1995 - de Theo Waigel, le ministre des finances de l'Etat
de l'Allemagne en exercice alors, les hommes de l'Etat des pays du futur euro
en étaient en effet arrivés à convenir d'adopter un
"pacte de stabilité et de croissance" à la
réunion des Chefs d'Etat et de gouvernement de décembre 1996,
à Dublin.
Point phare : ils s'engageaient à appliquer rigoureusement des dispositions
relatives à la stabilité budgétaire
("prévenir tout déficit excessif dans la zone
euro").
L'esprit du pacte était avant tout d'être dissuasif grâce
à ... toute une batterie de sanctions en cas de non respect de cet
engagement.
Ils le signeront le 17 juin 1997 à l'occasion d'une réunion
analogue à Amsterdam. Et, selon certains observateurs, "la
signature vaudra traité"!
3.G. Un exemple
d'irresponsabilité institutionnelle.
Ce pacte, comme il fallait s’y attendre, rapidement, des Etats dont celui
de la France ne l'ont pas respecté (cf. graphique ci-dessous pour les
années 2004 et 2005).
Graphique
C’est, entre autres, dans cette conjoncture, que la Commission de
Bruxelles a préconisé le renforcement de la "coordination
des politiques économiques et budgétaires" :
« Romano Prodi, président de la Commission, a déclaré
:
"Je suis fermement convaincu que ces propositions permettront de
renforcer le pacte et de le rendre plus crédible.
Je suis heureux de constater que les travaux réalisés par cette
Commission ont porté leurs fruits, aboutissant à un projet de
propositions qui contribuera à promouvoir la croissance en
Europe".
Joaquín Almunia, membre de la Commission chargé des affaires
économiques et monétaires, a ajouté :
"La Commission souhaite faire avancer ce débat d'une
manière ouverte et transparente et en coopération
étroite avec les États membres.
Nos propositions introduisent une plus grande logique économique dans
la mise en œuvre du pacte de stabilité et de croissance, tout en
renforçant la surveillance et l'application effective.
Elles visent à étayer la stabilité
macroéconomique et à garantir des finances publiques viables,
tout en contribuant à améliorer le potentiel de croissance de
l'U.E. et à réaliser les objectifs de l'agenda de
Lisbonne».(3 septembre 2004)
Plus
précisément :
"Dans
une communication adoptée ce jour, la Commission européenne
recommande de mieux coordonner les instruments de gouvernance
économique de l'U.E. afin d'accroître la contribution de la
politique budgétaire à la croissance économique.
Elle est également d'avis qu'il serait bénéfique, pour
le pacte de stabilité et de croissance (P.S.C.), d'accorder une plus
grande attention à la viabilité des finances publiques et de
prendre davantage en considération la diversité des situations
économiques dans une Union à 25 élargie.
Cette communication fait suite à l'appel lancé à la
Commission par le Conseil européen de juin à soumettre des
propositions en vue de renforcer et de clarifier la mise en œuvre du
P.S.C.
Elle s'inspire d'idées contenues dans la communication du 24 juin 2004
intitulée «Les finances publiques dans l'UEM –
2004».
La Commission est d'avis que le renforcement de la coordination des
politiques économiques devrait passer par un recours accru aux grandes
orientations de politique économique.
Il pourrait être fait davantage appel à la pression
collégiale et aux alertes rapides aux fins de la surveillance dans ce
cadre.
En ce qui concerne la coordination et la surveillance des politiques
budgétaires, l'objectif est de consolider les fondements
économiques du P.S.C., tout en améliorant son application
effective et sa crédibilité.
Les principales mesures qui pourraient être prises pour clarifier et
améliorer la mise en œuvre du P.S.C. sont les suivantes:
i) mettre davantage l'accent, dans le cadre de la surveillance des positions
budgétaires, sur la viabilité de la dette. Cristalliser
l'attention sur le critère de la dette et la viabilité à
moyen et long terme suppose de surveiller de plus près
l'évolution actuelle de la dette, de même que les facteurs
susceptibles d'influer sur sa dynamique à moyen et long terme;
ii) tenir davantage compte de la situation de chaque pays dans la
définition de l'objectif à moyen terme de positions
budgétaires «proches de l'équilibre ou
excédentaires»;
(iii) prendre en considération les conditions économiques et
leur évolution dans la mise en œuvre de la procédure
concernant les déficits excessifs. Lors de la constatation de
l'existence d'un «déficit excessif» et de l'adoption de
recommandations et de délais en vue de sa correction, il serait sans
doute utile de tenir davantage compte de l'impact sur le budget de
périodes de croissance économique exceptionnellement faible;
iv) agir plus rapidement afin de corriger les évolutions
budgétaires inadéquates. Le processus de surveillance
budgétaire devrait permettre de dégager des excédents en
période de conjoncture favorable afin de pouvoir faire face aux
conséquences du vieillissement démographique, de ménager
une marge de manœuvre suffisante pour résister aux
ralentissements de l’activité et, enfin, d’assurer un
dosage approprié des politiques économiques au cours du cycle.
Enfin, la Commission insiste sur la nécessité d'une forte
cohérence entre les objectifs de politique économique et
budgétaire de l'Union et, partant, d'une coordination étroite
entre les G.O.P.E. et le P.S.C."
Une semaine plus tard, le 10 septembre 2004 :
Scheveningen (Pays-Bas) (A.F.P.) -
Les ministres européens des Finances ont accepté vendredi le
plan de la Commission européenne comme un point de part pour une
réforme du pacte de stabilité mais sans qu'un réel
consensus se dégage sur les modalités précises.
Les grands argentiers ont par ailleurs au cours de leurs réunions
à Scheveningen confié au Premier ministre luxembourgeois
Jean-Claude Juncker le soin de représenter la zone euro.
Les propositions de Bruxelles, pour assouplir le pacte qui lie les pays
européens, ont suscité l'enthousiasme des pays en
déficit et la méfiance des partisans de la rigueur, qui
souhaitent le moins de changement possible.
Les ministres sont convenus que la proposition de la Commission était
"une bonne base", a affirmé le ministre néerlandais
Gerrit Zalm, qui présidait les réunions. "Les ministres
sont convenus aussi que le traité ne devait pas être
changé et que les modification apportées à ses
règlements, si elles s'avèrent nécessaires, devaient
être réduites au minimum", a-t-il assuré.
Mais sur les mesures précises, il n'y a pas encore d'accord à
ce stade, a reconnu M. Zalm.
Ainsi, "il n'y a pas eu d'accord" sur la définition des
circonstances exceptionnelles qui peuvent permettre à un pays
d'échapper à des sanctions.
"On en peut pas tout régler en une seule réunion",
a-t-il dit.
De son côté, le commissaire européen aux Affaires
économiques Joaquin Almunia, s'est réjoui que "les
ministres ont entériné" ses propositions "comme point
de part" pour un aménagement du texte.
Mais il a reconnu que la réforme serait un "travail
difficile". "Il s'agit d'un processus politique et les ministres
doivent faire des choix difficiles pour restaurer la crédibilité
du pacte", selon le commissaire.
Le chemin de la réforme du pacte semble long: Bruxelles espère
pouvoir faire des "propositions techniques "d'ici à la fin
de l'année ou l'an prochain".
Les deux grands pays de la région, la France et l'Allemagne, en
déficits persistants et qui ont obtenu l'an dernier le gel du pacte
pour échapper à des sanctions, semblaient les plus satisfaits
du plan de Bruxelles.
Ces propositions "vont dans le bon sens", a affirmé le
ministre français Nicolas Sarkozy. Les suggestions de Bruxelles
"ne sont pas un affaiblissement du pacte", a renchéri son
homologue allemand Hans Eichel.
Bruxelles suggère notamment une meilleure prise en compte des
conditions spécifiques de chaque pays, du niveau de sa dette publique,
et propose un assouplissement des procédures en déficits
excessifs.
En revanche, le ministre autrichien Karl-Heinz Grasser, qui a
été l'un des farouches opposants au traitement de faveur
accordé l'an dernier aux grands pays s'est dit nettement opposé
à une réforme qui enlèverait son tranchant au texte.
"L'Autriche ne s'associera jamais à un affaiblissement du
pacte", a-t-il asséné.
Le ministre belge Didier Reynders s'est prononcée pour une
réforme a minima.
Le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet,
présent à la réunion, s'est également
"prononcé pour qu'il y ait le moins de changement possible au
texte", selon un participant.
3.H. "Vogue
la galère".
L’euro était donc alors dans sa cinquième année
d’existence!
Et vogua la galère sur une mer parfois très
démontée jusqu'à aujourd'hui ...
Le pacte avait été dénoncé de fait en novembre
2003 pour être réécrit en 2005.
Mais en février 2006, la "question allemande" et la
"question française" s'étaient de nouveau
profilées. La Commission de Bruxelles avait envisagé de
lancer des procédures pour "déficit excessif", une
mesure destinée à convaincre que la règle s'applique
avec la même rigueur aux Etats des "grands pays" de l'euro
comme des "petits".
4. « Les
économies malades de l’euro».
Dans ces conditions, il faut être conscient que la monnaie
dénommée « euro » cache des variations –
certains diront des « transferts » - qui auraient
été aisément observables si, entre autres, le DM et le
FF étaient restés en circulation… car elles seraient passées,
en particulier, par le canal du prix relatif des monnaies, par exemple par
celui du taux de change DM/FF.
Le taux de change aurait plus ou moins varié : on aurait dit alors
vraisemblablement que le DM s’appréciait par rapport au FF ou
que le FF se dépréciait par rapport au DM.
Au lieu de cela, les variations, les « transferts » sont
cachés, mais ils existent et, tels des termites, ils sapent les
économies et occasionnent des effondrements inaperçus ou encore
mal perçus.
En vérité, les sapeurs sont présents non seulement en
France et en Allemagne, mais aussi dans les autres pays de l’euro et,
par exemple, des méfaits sensibles viennent d’émerger ou
de se faire sentir en Grèce.
Il y a quelques mois, l'Irlande avait été en ligne de mire,
mais le cas est oublié aujourd'hui - au moins provisoirement... - car
les Irlandais ont finalement voté pour le projet de traité
constitutionnel en octobre 2009.
Ces méfaits proviennent donc des fondements arbitraires de
l’euro qui ont été convenus par les hommes de
l’Etat dans la décennie 1990.
Ils nous offrent une nouvelle version de la fable de Jean de La Fontaine
intitulée Les animaux
malades de la peste, version qui a commencé à
se porter à nos oreilles mais sans titre.
Pourquoi ne pas lui donner comme titre « les économies malades
de l’euro » ? A coup sûr, certains diront alors, amers,
qu’au moins l’euro aura conduit à cette «
superproduction » étatique !
En effet, le « baudet » sur qui des hommes de l’Etat et
autres commentateurs stipendiés commencent à crier « haro
», « ce pelé, ce galeux » d'où vient tout le
mal, c’est donc l’Etat de la Grèce.
Cet Etat n’a pourtant fait jusqu’à présent
qu’exprimer ses dépenses, ses recettes fiscales, son
déficit budgétaire, ses emprunts, son endettement en
pourcentage du P.I.B. de la Grèce, des pourcentages longtemps voisins
de ceux des autres pays de l’euro (cf. par exemple graphique ci-dessus
pour 2004-05).
Certes, le déficit budgétaire de l'Etat
héllénique a augmenté ces derniers mois - il
représente à l'heure actuelle plus de 12 % du P.I.B. de la
Grèce - et son endettement est supérieur à 100% du
P.I.B. (cf. ce texte par exemple).
Et alors ?
Cet Etat a un montant de déficit budgétaire
qui tourne en dérision la limite de 3%... comme celui de la France.
A la différence de celui de la France, en revanche, cet Etat n’a
pas un montant de dette de « sécurité sociale vieillesse
» non comptabilisé, voire non comptabilisable car non
échangeable, dans son endettement réel!
Il n'a pas non plus, à ma connaissance, comme l'a celui de la France,
des comptes de la "sécurité sociale vieillesse" que
les commissaires aux comptes ne veulent pas certifier (cf. http://blog.georgeslane.fr/category/Finances-publiques/page/15).
En vérité, l’Etat de la Grèce n’est ni plus
ni moins responsable que l’Etat de la France ou qu'un autre Etat des
pays de l'euro car, dans tous les cas, leurs hommes sont, eux,
institutionnellement irresponsables.
5. "Refusez le
déficit ou acceptez l'esclavage".
"Soyez libéraux, soyez dirigistes, mais ne soyez pas
menteurs", voilà des mots qu’a eu l’occasion
d’écrire Jacques Rueff à plusieurs reprises
dans les décennies 1940-1950 après avoir expliqué que le
déficit est un mensonge, que le mensonge est la porte
d’entrée dans la voie de l’esclavage et la permanence du
déficit, le cheminement dans cette voie... et que, si on ne veut pas
devenir esclaves, il faut refuser le déficit.
Aujourd’hui, les menteurs pensent vraisemblablement avoir trouvé
une échappatoire à l’argument en distinguant un «
déficit structurel » et un « déficit conjoncturel
» ou bien un "bon déficit" et un "mauvais
déficit" ou, mieux encore, un « bon grand emprunt »
et de « mauvais petits emprunts ».
Malheureusement, ils ne font que se vautrer dans une irresponsabilité
institutionnelle qu’ils sur dimensionnent et qui pourrait bien les
anéantir un jour ou l’autre …, et nous avec, s'ils ne font
pas d'autres choix politiques.
Pour rester dans le monde greco-latin d’où venait jadis la
lumière philosophique, on dira que l’euro pourrait bien devenir
le chemin qui les mènera à la Roche Tarpéienne
(ci-contre) alors qu’il n’aura jamais été leur
capitole.
Une chose est certaine : le choix politique du déficit
budgétaire et de tout ce dont il procède ne pourra plus
perdurer très longtemps, ni en Grèce, ni en France, ni ailleurs
.
Georges
Lane
Principes de science économique
Georges Lane
enseigne l’économie à l’Université de
Paris-Dauphine. Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du
séminaire J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi
les très rares intellectuels libéraux authentiques en France.
Publié avec
l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous droits
réservés par l’auteur
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