Etant donné les échanges de choses menés dans le passé par les
personnes juridiques physiques et, surtout, leurs coûts évalués, il est arrivé
que ces dernières aient cherché à amoindrir les coûts qu'ils avaient
supportés à cette fin (cf. ce texte de
février 2015 ou celui-ci de juillet
2014).
Ils ont inventé deux grands intermédiaires, à savoir
- ce qu'on dénomme la "monnaie" et
- l'institution (ou l'organisation).
N.B. Je laisse de côté
l'intermédiaire "institution" (cf. par exemple, sur
l'institution, Morris
Perlman, "The Roles of Money in an Economy and the Optimum Quantity of
Money, Economica, 1971, pp. 233-252) pour m'intéresser
uniquement à ce qu'on dénomme "monnaie".
Sont allés de pair avec ce qu'on dénomme "monnaie", les
"échanges indirects" de choses, d'une part, et, d'autre part,
l'"équilibre économique intermédiaire", résultat des échanges
indirects.
Le fait est qu'en majorité, les économistes ont laissé de côté ces deux
expressions et tout ce qui se cachait derrière leurs notions.
Ils ont continué à parler, à la place, de l'échange et de l'équilibre
économique comme si de rien n'était, comme si les intermédiaires, pourtant
innovations essentielles, n'avaient pas profondément modifié la réalité
économique.
Certes, à d'autres moments, les mêmes introduisent, pour faire imaginer ou
rêver ..., des expressions biaisées du type "intérêt général"
ou "justice sociale", où, de fait, le qualificatif détruit le
nom.
Tout cela ne doit pas cacher l'amoindrissement réussi des coûts de
l'échange de choses même s'il a été contrecarré en grande partie par des
réglementations étatiques.
1. L'échange indirect.
Hier, avant que la monnaie existât, les marchandises s'échangeaient contre
des marchandises.
Les échanges donnaient lieu, chacun, quand ils aboutissaient, à des
"marchés conclus", c'est-à-dire à des taux d'échange de choses
convenus, à des offres et des demandes égalisées, à des prix des quantités de
marchandises exprimés dans une autre marchandise et à des quantités de
marchandises.
Quand ils n'aboutissaient pas, quand il n'y avait pas de "marché
conclu", c'était que les personnes avaient jugé les coûts des échanges
trop élevés, les profits attendus avec incertitude trop bas.
Et s'il en était ainsi, c'était à cause de capacités juridiques,
techniques et économiques dont elles ne disposaient pas.
Mais de tout cela, là encore, la majorité des économistes n'a dit mot.
Force est de constater que des marchandises récurrentes ont vu le jour,
progressivement, à l'initiative des personnes.
Elles se sont trouvées interposées dans des échanges d'autres
marchandises et ont donné lieu à deux grands types de taux d'échange de
choses potentiels au lieu du seul d'hier.
L'échange de choses est devenu ainsi indirect, en principe, pour
chaque personne alors qu'auparavant, rétrospectivement, il était direct.
Au lieu de rechercher une double coïncidence de besoins/désirs, chacune a
recherché quelqu'un "à monnaie" pour lui offrir sa marchandise, et
pour, ensuite, rechercher quelqu'un d'autre disposant de la marchandise
qu'elle désirait.
Soit la démarche était "synallagmatique", soit elle était
"non personnalisée" (cf. Douglas
North), "multilatéral ou multiangulaire" (Hayek, op.cit.).
Dans les deux cas, quand les échanges aboutissaient, elle donnait lieu à
deux taux d'échange convenus,
- l'un liait la personne - qu'on prend implicitement pour référence
- soit à une autre personne (cas de la synallagmatie et de l'échange
"offre de marchandise" pour la "demande de monnaie") soit
à une demande de marchandise (cas du marché),
- l'autre échange la liait à une seconde personne (cas de la synallagmatie
et de l'échange "offre de monnaie" pour "demande de
marchandise") ou à une nouvelle offre de marchandise (cf. ce texte de juin 2015).
La marchandise en question, à la fois récurrente
et intermédiaire, à l'initiative des personnes, a reçu la dénomination
de "monnaie".
Par la suite, elle a évolué soit à l'initiative des personnes, soit à
celle des hommes de l'état.
Dans le premier cas, il y a eu "innovation", dans l'autre, il y
a eu "réglementation étatique".
Et, avec le temps, ce temps que Léo Ferré chantait en ces mots:
la
réglementation a tendu à donner des privilèges à l'état dont les effets à
court et à long termes méritent attention quoiqu'ils soient complétement
ignorés.
Rappelons que :
« Il y a une trentaine
d’années [soit 1937], quand on posait la question :
‘qu’est-ce que la monnaie ?’,
il fallait répondre :
‘c’est un bien privilégié, choisi parmi tous les autres, pour briser le
troc ; ce bien remplit en même temps deux fonctions : il est moyen
de paiement et réserve de valeur’.
Les manuels de l’époque s’employaient alors à décrire toutes les formes
que pouvait revêtir ce bien privilégié.» (Guitton,
1967, p.16)
2. L'équilibre économique intermédiaire.
Sans monnaie, tout "marché conclu" peut être dénommé
"équilibre économique", façon de parler plus physique que
littéraire de l'égalité entre deux quantités de marchandises,
l'une offerte et l'autre demandée (cf. ce texte de mars 2015).
Dans ce monde sans monnaie, l'équilibre économique recouvre
- soit ce dont conviennent les deux parties du contrat d'échange
synallagmatique,
- soit l'offre et la demande d'un "marché de choses", concept du
savant économiste ou institution pratique.
Avec la monnaie et son évolution, l'équilibre économique est devenu
lui-même "intermédiaire" - "conjoncturel" - et non pas
... "final" comme beaucoup ont pris l'habitude de le présenter
implicitement.
Parler ainsi de l'équilibre à court terme ou à long terme est, en
fait, une absurdité.
A fortiori, et au prix d'une mathématique, l'est tout autant
l'équilibre en tant que situation envisagée au-delà de l'infini actuel (cf.
ce texte
d'octobre 2014).
L'échange indirect de choses est un maillon de la chaîne perpétuelle
à quoi il donne lieu.
L'équilibre économique et la "loi de l'économie" (cf. ce texte de juillet
2015 ou celui-ci
plus ancien) sont a priori deux considérations de nature
opposée.
A l'équilibre économique, en principe, plus rien ne peut plus se passer tandis
que la loi de l'économie exprime la voie permanente d'un amoindrissement des
coûts économiques, son rythme.
Mais, on l'a dit, dans un monde d'échange indirect, l'équilibre économique
est une absurdité.
Il est à remarquer que l'"équilibre économique intermédiaire" et
l''échange indirect" de choses sont des concepts diamétralement opposés.
L'équilibre économique intermédiaire est un résultat d'actions alors que
l'échange indirect est une action humaine, source de résultats potentiels.
L'équilibre économique intermédiaire cache des offres et des demandes de
marchés qui ont eu lieu ou "doivent avoir lieu" alors que les
échanges indirects donnent lieu à des offres et des demandes potentielles.
A l'opposé, l'équilibre économique intermédiaire et la loi de l'économie
s'harmonisent.
De chaque équilibre économique intermédiaire, dérivent des demandes de
marchandises désirées potentielles et le point d'interrogation de nouvelles
offres de marchandises potentielles.
La loi de l'économie exprime le rythme des maillons de la chaîne
permanente.
3. Les réglementations étatiques.
Les réglementations créées par les hommes de l'état ont fleuri au XXème
siècle tant au niveau national qu'au niveau international, dans des
proportions sans commune mesure avec le passé (cf. ce texte d'octobre 2014).
Henri Guitton en parlait en ces termes, en 1967:
« Mais aujourd’hui les formes exceptionnelles ont pris le pas sur les
formes traditionnelles.
Cette opposition entre l'exception et la norme est même devenue tellement
gênante que les perspectives se sont transformées.
C'est paradoxalement à partir de l'exception que l'on pense désormais
l'essence du phénomène monétaire» (Guitton, op.cit., p.16)
Et les essentiels allaient s'accumuler ...
Nous supportons aujourd'hui leurs effets à court et à long termes.
Aussi bien hier qu'aujourd'hui, ils sont complètement ignorés alors qu'ils
sont dévastateurs (les faits eux-mêmes sont ignorés, cf. texte d'août 2014).