L'économie mondiale meurt des fausses idées sur la monnaie qu'ont créées, au XXè siècle, de prétendus savants et qui ont été
colportées depuis lors.
Ces idées ont tendu à soutenir des décisions prises par les hommes de l'Etat
comme les conséquences de la conférence de Gènes (1922) et les
réglementations à partir de la décennie 1930 sur l'interdiction de la
convertibilité des substituts de monnaie bancaires en monnaie or.
Elles sont ignorées ou oubliées aujourd'hui.
Soit dit en passant, étant donné ces réglementations, c'est une absurdité de
parler aujourd'hui de monnaie - d'argent en France - comme cela a été le cas
jusqu'en 1930.
Depuis lors, la "monnaie" désigne des "substituts de rien bancaires"
comparés aux "substituts de monnaie bancaires" d'hier qui étaient
assis sur une contrepartie monnaie-or, librement échangeable.
Il faut mettre l'accent sur toutes ces fausses considérations juridiques que
l'économie politique majoritaire a mis, pour sa part, de côté.
Au nombre de celles-ci doit être mis un terme, en particulier, au Fonds
monétaire international qui n'a plus de raison d'être, si tant est qu'il en
avait une auparavant, depuis 1971 (cf. ce texte de mars 2009).
L'€uro qui n'est qu'un succédané de tout cela, n'aurait plus lieu d'être et
disparaîtrait dans la foulée (cf. ce texte de mai 2014).
1. L'équation des échanges d'Irving Fisher.
Le
titre du livre d'Irving Fisher (1911) intitulé The
Purchasing Power of Money cache
l'important de l'ouvrage, à savoir l'équation des échanges économiques, une
équation du premier degré à une inconnue, la vitesse de circulation de la
quantité de monnaie.
Il développe la notion qu'il a déduite, à savoir le pouvoir d'achat de
la quantité de monnaie, et qui a amené à mettre définitivement la
quantité de monnaie au départ du raisonnement économique.
Poursuivi à sa façon par John Maynard Keynes et ses amis à partir de la
décennie 1930 et revigoré par Milton Friedman et les monétaristes, les
décennies 1950-1980, l'ouvrage domine encore aujourd'hui les esprits, étant
donné ses multiples formes.
2.
Les doctrines monétaires catallactique et a catallactique de Ludwig von Mises.
Un
an après Fisher, Ludwig von Mises avait écrit un
livre intitulé The Theory of Money and Credit
qui avait peu de choses en commun avec l'ouvrage précédent.
Un de ses points importants était qu'il avait mis en relation la
quantité de monnaie et la quantité de crédit bancaire et en avait déduit la
"théorie du cycle économique".
Autre point important, il avait rétabli le lien étroit de la monnaie et de
l'échange perdu par beaucoup, les dernières décennies, et mis ainsi, au
premier plan, l'échange économique et non plus la monnaie (cf. annexe
intitulé "Doctrine monétaire catallactique et a catallactique").
3.
La rhétorique de la monnaie, au mauvais sens du mot.
A
la différence de Fisher, Mises s'était opposé, en particulier, à l'idée
des fonctions de la monnaie, hormis l'idée de la fonction de moyen
d'échange/paiement qu'il prônait.
On ne peut que regretter sa démarche.
Comment Mises n'avait-il pas vu que les fonctions évoquées, y compris celle
qu'il admettait, n'étaient jamais qu'une façon rhétorique de parler du
"coût de l'échange", la méthode rhétorique étant un mal qu'il
n'avait de cesse de dénoncer dans ses propos?
4.
L'économie politique est une science praxéologique.
Lui
qui avait compris que tout acte mené par la personne juridique physique
n'était jamais qu'une façon pour elle de changer de situation économique - quand
il ne tendait pas à identifier toute activité humaine à un échange économique
-, que n'a-t-il insisté sur le coût de l'action ?
Pourquoi
n'a-t-il pas enfoncé le clou et insisté sur le fait
que ce qu'on dénommait "monnaie" n'était jamais qu'une diminution
du coût de l'échange, aspect de l'action, bénéficiant à tout un chacun?
Il savait que l'économie politique n'était pas une science des fonctions des
choses, qu'elle n'avait pas pour objet les fonctions des choses, quelles
qu'elles fussent.
Comme l'avait écrit Vilfredo Pareto dans la
décennie 1890 dans son Cours
d'économie politique, il savait que l'économie politique
s'intéressait aux phénomènes économiques qui résultaient de l'action humaine.
Et à la différence de Pareto, il avait pris soin de ne pas limiter sa
démarche aux phénomènes économiques pour s'intéresser à l'action elle-même,
c'est-à-dire à la praxéologie.
5.
La loi de l'économie.
L'échange économique, c'est-à-dire l'échange des marchandises par vous et
moi, est un acte à la fois profitable et coûteux dès lors qu'il est mené (cf.
ce texte de mai
2014).
A cet égard, l'économie politique est aussi la science dont la grande méthode
est sa loi éponyme, celle des coûts de l'action humaine toujours réduits.
Etonnante est la démarche majoritaire actuelle qui laisse de côté la question
du coût de l'action de vous et moi, hormis de rares fois, quand on sait que
les savants d'autres sciences la prenaient pour point de départ et
l'appliquaient à la nature, depuis au moins le XVIIIè
siècle, pour admettre encore aujourd'hui qu'elle est au cœur de la mécanique
quantique (sous la forme "loi
de la moindre action").
6. L'économie politique modélisée.
Quitte à préciser la praxéologie, l'économie politique devrait avoir aujourd'hui
pour objets les incitations d'action de vous et moi en relation avec les
profits et les coûts, dans le cadre des règles de droit, de justice
naturelle.
Au lieu de cela, grande absurdité persistante, les modèles économiques
laissent de côté les règles de droit et incluent dans leur développement
rendu mathématique, des "signaux" ou des "chocs", autant
d'irrationnels présentés comme rationnels, au nombre de quoi se trouvent des
réglementations tirées de nulle part.
7. L'inversion de la causalité à remettre dans le bon ordre.
L'échange économique est la condition nécessaire de la monnaie.
Ce n'est pas l'inverse comme a tendu à le sous-entendre la théorie de la
quantité de monnaie depuis l'origine, obsédée qu'elle était par les résultats
de l'action humaine plutôt que par l'action humaine soi-même.
Cette inversion de la causalité, rationalisée par Fisher en 1911 et modélisée
par la suite de multiples fois (cf. par exemple Haavelmo, 1978), est le point de départ des
absurdités qui ont débouché sur les réglementations évoquées ci-dessus.
Et on ne peut que s'étonner que Milton Friedman et ses amis monétaristes
aient été muets, cinquante ans plus tard, dans la décennie 1960, sur les
destructions de diverse nature qu'elles occasionnaient.
Leur mutisme serait-il éloquent néanmoins ?
8. Rueff ou Friedman?
Le fait est que Jacques Rueff et Milton Friedman se sont différenciés
fondamentalement sur ce point de la réglementation de la monnaie.
Jacques Rueff voulait revenir sur les réglementations imposées évoquées
ci-dessus (cf. Le
péché monétaire de l'Occident, 1971 par exemple) tandis que
Milton Friedman les acceptait, mais désirait qu'un prix qu'il jugeait
essentiel fût libéré des tentacules des hommes de l'Etat, à savoir les taux
de change des prétendues "monnaies".
Il y a près de cinquante ans, en 1965, Friedman écrivait ainsi:
"Je suis parfaitement d'accord avec Jacques Rueff sur le fait que, tout
comme maintenant, la situation était aggravée par l'étalon de change or, et
que, si un système de cours nationaux liés par des taux de change fixes doit
exister, il est de beaucoup préférable que toutes les réserves officielles
soient constituées en or plutôt qu'en devises provenant des monnaies de
certains pays.
Cependant, je ne m'accorde pas avec lui pour soutenir qu'il est actuellement
souhaitable d'évoluer vers une situation par le moyen d'une augmentation
substantielle du prix de l'or.
La raison de mon opposition réside dans le fait que la situation ne
serait pas fondamentalement transformée, mais seulement rendue un peu
moins instable, si l'on remplaçait par de l'or la fraction des réserves
officielles actuellement détenues sous forme métallique [...]
Le retour à un véritable étalon-or pourrait donc être souhaitable, mais il
est pratiquement impossible. Il exigerait que tous les pays
renoncent à utiliser la politique monétaire aux fins d'influencer le marché
intérieur, l'emploi et le niveau des prix.
La substitution d'un pseudo gold standard au pseudo gold exchange standard
serait un gain positif mais minime.
Tout comme l'étalon actuel, il impliquerait un interventionnisme politique
sur le commerce et les paiements internationaux, ainsi que de grandes crises
temporaires, et entraverait toute tentative réelle de libéralisation des
échanges.
L'autre alternative libérale souhaitable est un système de taux de change
fluctuant librement, où l'or n'aurait aucun rôle officiel particulier [...]
il est paradoxalement plus aisé de favoriser un véritable gold standard en
suivant cette direction qu'en s'attachant délibérément à la forme du gold
standard, au mépris de son esprit." (Friedman,
1968, 1976, pp.315-322)
Friedman a gagné quelques années plus tard, les taux de change des monnaies
ont été déclarés libres, au moins en apparence.
Mais, cinquante ans plus tard, aujourd'hui, il faut reconnaître qu'en dépit
de ce qu'il imaginait, tout n'a fait qu'empirer, à commencer par ce qu'il est
convenu de dénommer "crise" (cf. ce texte de septembre
2012).
Rien ne s'est amélioré dans le sens qu'il avait souhaité avec, en
particulier, la nouvelle machine dénommée "banque centrale
européenne" et son cortège de réglementations "Théodule"
dénommées "mécanismes" et tirées, elles aussi, malgré ce qu'on veut
faire croire, de nulle part (cf. ce texte de juillet 2013).
Les idées de l'étalon-or, socle de la vraie monnaie, ont aujourd'hui
disparu de l'économie politique majoritaire malgré les efforts de Rueff pour
qu'il en soit différemment et il convient de les y restaurer (cf. ce texte d'avril 2014),
sans oublier le principe des concurrences entre les monnaies.