Les économistes du courant de pensée majoritaire, ceux qui conseillent les
hommes de l'Etat, voire les hommes de l'Etat eux-mêmes, sont parvenus à faire
oublier au XXè siècle que les règles de droit en
général et, en particulier, la règle de droit qu'est la garantie de n'importe
quelle quantité de monnaie, étaient des points de départ de l'économie
politique.
Ils n'ont pas hésité à faire intervenir en complément une mathématique de
leur choix pour que l'oubli soit total et réussir ainsi leur entreprise...
provisoirement.
1. Des règles de droit à la contrefaçon publique.
En conséquence de l'oubli des règles de droit, ils ont mis de côté des
éléments essentiels de celles-ci qui s'en déduisaient logiquement comme, par
exemple, les contrefaçons de la monnaie et de sa quantité, ainsi que la
pénalisation - avec incertitude - des contrefacteurs (cf. ce texte
de juin 2013).
Leur démarche rompait ainsi avec celle d'un passé plus ancien qui avait
conduit les hommes de l'Etat à accaparer, directement ou indirectement, la
monnaie et sa quantité.
Dans ce passé, les hommes de l'Etat - défini d'une façon ou d'une autre -
avaient en effet insisté sur la question de la contrefaçon... privée.
Et ils avaient fait valoir leur solution, à savoir, dans le cadre
national, donner
- à quelqu'un le privilège de monopole de production de la monnaie et
celui d'émission de substituts de monnaie bancaires et,
- aux autres, l'obligation d'effectuer les paiements en (substituts de)
monnaie (bancaires).
Dans le cadre mondial, sans le savoir, ils ouvraient la voie à la
destruction de l'étalon-or, l'ancre des monnaies nationales historiques, qui
surviendra au XXè siècle.
Cette solution avait été vivement critiquée par beaucoup, par exemple, par Vilfredo Pareto à la fin du XIXè
siècle qui écrivait:
" La facilité avec laquelle les
personnes préposées à la "production" de la monnaie abusent de
l'autorité qui leur est confiée, si elles ne sont pas contenues par la
concurrence, est un de ces faits révélés par l'histoire" (Pareto,
1896-97, §345)
Et l'histoire a continué jusqu'à aujourd'hui inclus.
Avec cette démarche, le grand contrefacteur était donc désormais public.
Rien n'a justifié les décisions prises sinon de conduire les gens à
séparer la monnaie et la banque comme si l'une était indépendante de l'autre,
comme si elles n'étaient pas indissociables.
Ces décisions n'ont eu aucune base doctrinale au moment où elles ont été
prises.
Par la suite, des efforts ont été faits pour qu'elles en acquièrent une.
2. Les désastres.
La contrefaçon publique va s'avérer beaucoup plus désastreuse que pouvait
l'être telle ou telle contrefaçon privée.
Deux exemples seulement tant ils seraient trop nombreux à citer tous.
A l'échelon national, la démarche a contribué, en particulier, à faire
confondre politique budgétaire et politique monétaire.
"L'arithmétique de la contrainte budgétaire du gouvernement dicte que la
politique budgétaire et la politique monétaire sont inévitablement
interdépendants (Sargent, 1999).
Avec des budgets équilibrés, la politique budgétaire redistribue la
monnaie;
avec le déficit budgétaire monétisée, elle a l'effet
supplémentaire d'augmenter la quantité de monnaie.
Ainsi Boulding (1962) affirme que
la politique monétaire a à voir avec la réglementation des marchés
financiers, tandis que
la politique budgétaire a à voir avec la réglementation de la quantité de
monnaie. "(Cheng et
Angus, 2012)
"The arithmetic of the government’s budget constraint dictates that
fiscal policy and monetary policy are inescapably
interdependent (Sargent, 1999).
With balanced budgets,
fiscal policy redistributes money;
with monetised deficit spending, it has an
additional effect of increasing the money supply.
Thus Boulding
(1962) argues that
monetary policy has to do with the regulation of financial markets, while
fiscal policy has to do with the regulation of the quantity of money." (Cheng
et Angus, 2012)
A l'échelon mondial, elle a amené les hommes de l'Etat de plusieurs
pays à chercher à s'entendre.
Le XXè siècle a été exemplaire.
Désormais, sont en jeu les hommes de l'Etat de divers pays qui ont passé
entre eux des accords qu'ils respectent moins que plus.
Double conséquence actuelle :
- depuis 1971-73, perdure l'interdiction de la convertibilité des substituts
de monnaie bancaires nationaux en monnaie or (cf. ce texte de septembre 2011) et,
- depuis 1999-2002, c'est la transformation de monnaies nationales
historiques en quelque chose de régionale dénommée "€uro",
sous tutelle d'une Banque centrale européenne et obligatoire en grande partie
pour les gens des pays concernés (cf. ce texte de janvier 2013).
Bref, aujourd'hui, il n'existe plus de monnaie dans le monde sauf à
dénommer "chat" un chien.
Il n'existe plus non plus de substitut de monnaie bancaire mais des
substituts de rien bancaires - que Jacques Rueff avait eu l'occasion de
dénommer "néant habillé en monnaie" - dénommés "monnaie",
sous le couperet de l'action que choisit de mener telle ou telle banque
centrale nationale ou régionale, voire tel ou tel fonds ou mécanisme, à
n'importe quel moment.
Les décisions des hommes de l'Etat du XXè siècle
n'ont pas amené nos économistes à s'interroger sur ces résultats.
Et leur point de départ méthodologique a été mis de côté.
3. De la comptabilité en droits constatés à la comptabilité en
faux droits.
En conséquence de la mathématique choisie qu'était la comptabilité
générale en droits constatés et qui n'existait qu'en conséquence des règles
convenues avec autrui - la comptabilité générale constituant une véritable
méthode mathématique alliant les règles de droit et celles de l'arithmétique
-, nos économistes n'ont pas hésité à procéder à sa modification.
Ils ont fait admettre, en partie, le principe des règles de l'arithmétique
et avancé non pas les résultats observés par les actes d'échange de chacun et
la monnaie nécessaire, mais ceux qu'inventaient leurs imaginations.
Ce furent, à partir de la décennie 1930, la macroéconomie ou, depuis plus
récemment, la macroéconométrie, l'une et l'autre
fondées sur la nouvelle comptabilité nationale qui n'avait que faire de
l'acte d'échange de vous et moi et des substituts de monnaie bancaires
convertibles en monnaie or.
Et, en conséquence des réglementations monétaires intervenues depuis lors,
la comptabilité nationale, aux "principes" variables d'un pays à un
autre, s'est cru obligée de considérer marginalement les "néants
habillés en monnaie".
Pour autant, les faux droits des comptabilités nationales ne sauraient
harmoniser ces dernières, mais, au contraire, contribuer à les faire
dissoner.