1. La géométrie d’Euclide.
En 1838, dans un livre intitulé Recherche sur
les principes mathématiques de la théorie des richesses , Antoine
Augustin Cournot a expliqué, à l'aide d'une mathématique (à savoir la
"géométrie euclidienne"), deux relations supposées exister entre une quantité
de marchandises et un prix en monnaie.
L'une est la loi d'offre qui varie dans le sens du prix, l'autre la loi de
demande qui varie en sens contraire.
L'idée a fait florès avec la déduction de ces lois qu'a été la notion de
"marché" que certains ont identifiée malencontreusement à un lieu...
Le marché est un concept, rien d'autres.
Dans le langage commun, la "bourse des valeurs" est certes un lieu que beaucoup
prennent pour synonyme ou représentatif du marché.
Mais, avant d'être telle, la "bourse des valeurs" n'est qu'une
organisation, un "marché organisé", bref une firme bien délimitée dans
l'espace, dont un des produits est de permettre aux gens d'échanger des
valeurs.
De ce point de vue, firme et marché font deux.
2. La « courbe de préférence pour la
liquidité ».
Près d'un siècle plus tard, en 1936, John Maynard Keynes a introduit la notion
de "préférence pour la liquidité" dans son ouvrage intitulé
Théorie de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, comme une
relation, une courbe supposée exister entre la "quantité de liquidité" et
le "taux d'intérêt".
William Hutt (1956) s'est intéressé dans le chapitre d'un livre sur ce que
pouvait bien vouloir dire le mot "liquidité" (1)
(1)
Hutt, W.H. (1956) “The
Yield from Money Held”, dans Sennholz, M. ed., On Freedom and Free
Enterprise: Essays in Honor of Ludwig von Mises, Mises
Institute.
Le mot "liquidité" remplaçait, certes, d'autres "mauvais" mots du type "monnaie
naturelle ou artificielle", "bonne ou mauvaise monnaie", "vraie ou fausse
monnaie", "monnaie saine ou insane", "monnaie forte ou faible", etc.
Mais il faisait dériver la théorie économique vers des lieux d'ignorance d'où
elle ne sortira plus jamais, au moins jusqu'à présent...
3. La courbe « LM ».
Bien avant un texte de
1962 cherchant à cerner ce que pouvait bien vouloir dire le
mot "liquidité", John Hicks (dans un
article de 1937) avait proposé une représentation de géométrie euclidienne
de la relation de Keynes pour en rendre compte.
Et elle a fait flores, elle aussi, via la trop fameuse courbe
"LM" qui s'en déduit et caractérise le "marché de la monnaie" dans le plan
géométrique "revenu national"-"taux d'intérêt" où les hommes de l'état peuvent
fixer la quantité de monnaie au niveau qu'ils jugent bon...
Aujourd'hui, les premières années, les étudiants d'économie politique doivent
la supporter et s'en accommoder.
La théorie monétariste qui a été développée dans les décennies 1950-1980
"contre la théorie keynésienne", n'a jamais été qu'une combinaison
modifiée de la Théorie du
pouvoir d'achat de la monnaie d'Irving Fisher (1911) et de la théorie
de Keynes (cf. ce billet de mai
2015).
Elle a tendu a expliquer précisément la loi de demande de monnaie par le taux
d'intérêt (voire la structure des taux d'intérêt).
4. Les mêmes idées fausses.
A son invention, la "quantité de liquidité" de la "courbe de préférence
pour la liquidité" a été envisagée comme une composante de la demande de
monnaie, notion récente alors de la théorie économique.
Mais la "liquidité" est en vérité une façon de parler des "créances/dettes"
tout comme s'y appliquait le mot "devise" auparavant.
La monnaie n’a rien à voir avec les notions de « temps » ou de
« durée » que cachent les "créances/dettes" et autres devises.
Elle a, au contraire, tout à voir avec celle d'"intermédiaire des
échanges" (comme l’avait expliqué Jean Baptiste Say, par exemple dans cet
ouvrage de 1815).
La monnaie est, en effet, l'invention humaine qui a permis de contribuer à
amoindrir le coût des échanges de marchandises.
Malheureusement, au prétexte de protéger contre les malfaisants les gens qui se
servaient des premières monnaies, les hommes de l'état se sont donnés le
privilège de monopole de la production et ont obligé à les accepter.
On sait la suite...
Le coût des échanges a été amoindri mais moins que ce qui aurait pu se faire à
cause des malversations des hommes de l'état.
Aujourd'hui, avec les "cybermonnaies", le processus est exactement le même, on
retrouve le processus d'hier.
On agite le vol possible des Bitcoin, des Ethereum, etc. et de leur plate-forme
ici ou là, plutôt que de se satisfaire de cette nouvelle invention qui
amoindrit encore un peu le coût des échanges.
Et, bien évidemment, les hommes de l'état s'en inquiètent avant
que....
5. Autre erreur.
Reste que rien n’a jamais justifié de mettre en relation ce qu'on dénomme
« monnaie » et "taux d'intérêt " sinon la "théorie de la sélection de
portefeuille" et une situation économique extrême où la monnaie est prise à
tort pour un "actif" (cf. Claassen,
1970).
Par définition de ce qu'elle est, ce qu'on dénomme abusivement "monnaie"
aujourd'hui n' a rien à voir avec le temps ou la durée, mais tout avec les
échanges de marchandises.
On peut dénommer "chat" un chien, mais le chat et le chien font deux, tout
comme la "monnaie" et la "liquidité".