1. Le pouvoir d'achat de la monnaie.
Au début du XXè siècle, Irving Fisher a installé
dans l'économie politique la notion de "pouvoir d'achat de la
monnaie" (cf. ce texte d'octobre
dernier ).’’
La notion, en définitive "rhétorique au mauvais sens du mot", ne
procédait plus d'une analogie avec les sciences physiques, comme elle pouvait
l'avoir été auparavant par la "théorie de la quantité de monnaie",
mais de l'application d'une mathématique particulière, l'analyse matricielle,
pour y introduire les notions de "niveau de prix en monnaie" des
marchandises échangées et de "volume des échanges".
En effet, dans son livre de 1911, intitulé The Purchasing Power of Money, Fisher a fait
intervenir le pouvoir d'achat de la monnaie en relation avec les prix en
monnaie passés des marchandises échangées exprimés sous la forme d'un
"niveau de prix" et leurs échanges en volume.
L'inverse du concept de "niveau des prix" à quoi a été donnée
l'expression "pouvoir d'achat de l'unité de monnaie", était ainsi
d'abord une notion mathématique.’
Le pouvoir d'achat de l'unité de monnaie a fait florès par la suite pour
mettre en relation les taux de change des monnaies les unes avec les autres
(par l'intermédiaire des travaux de Gustav
Cassel).
Dernier méfait en date : la création de ce qu'on dénomme "€uro" depuis 1998 sur la base des taux de change spot
des "monnaies nationales" d'un certain nombre de pays (cf. ce
texte). » »
2. L’équation des
échanges écornée.
On ne peut que regretter que Murray Rothbard (1962) ne se soit pas appesanti
davantage sur la mathématique qui avait permis à Fisher d'introduire le
concept de "niveau de prix en monnaie des échanges" (cf. le
texte), de prolonger la théorie absurde de Marx au terme de quoi la
quantité de la monnaie est un obstacle pour les échanges et de s'acoquiner
avec la théorie de la quantité de monnaie en la déformant.
A sa façon, il a surtout rationalisé la vieille théorie qui voulait que les
variations de la quantité de la monnaie dans un sens entraînassent des
variations des prix en monnaie dans le même sens (dans un temps plus ou moins
long, cf. "effets
Cantillon").
L'analyse matricielle que
Fisher a adoptée, peut-être sans le savoir lui-même, l'a amené à proposer une
"équation des échanges" à la fois simple et particulière pour celui
qui n'est pas fermé à la démarche.
L'inconnue qu'il a montée en épingle, à savoir la "vitesse de
circulation de la monnaie", se calculait sans difficulté mathématique.
Elle pouvait même faire en sorte qu'au gré du savant, l'"équation des
échanges" restât "équation" ou devînt "égalité",
"identité" ou "tautologie".
Mais, en aucun cas, elle ne justifiait de transformer l'équation, l'égalité
ou la tautologie en une causalité.
3. Le péché monétaire
de l’Occident.
En outre, en introduisant par
la même occasion le concept de "volume des échanges", elle ouvrait
la porte à une "fausse porte de sortie", à un
trompe l'oeil qui était celui qui voulait que
la quantité de monnaie limitât le volume des échanges (antienne marxiste).
Salvador Dali : "Trompe l'œil".
Et les gouvernements des pays s'en sont saisis et servis pour - croire -
justifier que les quantités de monnaie nationales, telles qu'elles étaient
définies alors, constituaient un obstacle sur le chemin de la restauration
des économies européennes détruites par leur guerre de 1914-18.
C'est ainsi qu'au terme d'une conférence monétaire internationale (Gènes, 1922), il
fut décidé par un grand nombre de gouvernements de pays que désormais les
"substituts de monnaie bancaires" (billets et dépôts bancaires)
échangeables en monnaie or, à la demande, pourraient être détenus en dehors
de leurs frontières à la suite d'échanges internationaux de marchandises
alors que, jusqu'à présent, ils ne pouvaient pas l'être.
Le "péché
monétaire de l'Occident" venait d'être commis.
4. Des réglementations
ultérieures absurdes.
Malgré les réglementations intervenues entre temps, les gouvernements des
pays se sont retrouvés en 1944 pour "améliorer" ce qu'ils avaient
pris l'habitude de dénommer "système monétaire international".
Comme pour "solder" les destructions considérables à quoi allait
donner lieu la guerre de 1939-45 en cours, ils sont convenus de créer un
organisme particulier, à savoir le Fonds monétaire international (en sigle
F.M.I. cf. texte de mars
2009), qui aiderait les pays qui le lui demanderaient, à rétablir
l'équilibre de leur balance des paiements, nouvelle donnée politique.
Plus de trente ans plus tard, les gouvernements des pays membres du F.M.I.
ont dû se rendre à l'évidence, à savoir l'inefficacité totale des
règlementations dont ils étaient convenus depuis 1944, F.M.I. compris.
Faute de trouver de nouvelles réglementations, ils en sont arrivés à
abandonner d'un commun accord le principe qui gouvernait le système monétaire
international, jusqu'alors à savoir celui des substituts de monnaie
bancaires convertibles en monnaie or.
En conséquence de quoi, les taux de change des prétendus substituts de
monnaie bancaires sont devenus "flottants" pour ne pas dire
"variables". »
Et le F.M.I. a perduré sans aucune raison malgré tout.
5. L’équation du
revenu/dépense erronée.
Suite aux travaux de Milton
Friedman et des monétaristes (décennies 1960-70) menés dans l'intervalle pour
modifier le "niveau de prix en monnaie des échanges " en
"niveau de prix du revenu/dépense" et le "volume des
échanges" en "revenu réel" - représenté en pratique par le
produit intérieur brut en volume des comptabilités nationales toutes nouvelles
-, la "quantité de monnaie" a été jugée, à son tour, être le grand
obstacle à la variation du revenu réel dans le bon sens.
Et, par exemple, aujourd'hui, les gouvernements s'efforcent d'augmenter la
quantité de monnaie de façon à augmenter le revenu réel, par l'intermédiaire
de ce qu'ils dénomment "quantitative easing"
(cf. ce texte
d'octobre 2012) .
6. Le néant habillé en
monnaie.
Reste que la "quantité de
monnaie" d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec la quantité de monnaie
de 1911.
La France, par exemple, n'a plus de quantité de monnaie nationale, mais une
quantité qu'elle partage avec d'autres pays sous la dénomination "€uro".
A l'échelle du monde, la "quantité de monnaie" n'est plus qu'un
ensemble de quantités de substituts de monnaie bancaires sans ancre, un
ensemble de "néants habillés en monnaie" (pour reprendre
l'expression de Jacques Rueff, cf. le texte
de janvier 2014) que des taux de change relient les uns avec les autres
grâce aux marchés.