Si
l’objectif est bel bien de parvenir à des baisses de
dépenses, toutes les méthodes ne se valent pas si on veut
garantir le retour à l’équilibre budgétaire. En
effet, dans un cas, la baisse des dépenses passe par des coupes
budgétaires qui ne sont rien d’autre que des rabotages. Elles
risquent alors d’être perçues comme arbitraires et donc
illégitimes. Dans l’autre, elles sont l’instrument
d’une vision plus globale, concernant ce que l’État doit
continuer à faire et ce qu’il doit rendre, au contraire,
à l’initiative privée.
C’est
tout le contraire des rabotages envisagés au cours des derniers mois
dans le budget de la défense.
Le mois dernier, la question a encore
été posée de réduire le budget de la
défense. Or, cela a évidemment suscité
d’importantes tensions et se révèle emblématique
de la situation actuelle.
Car réduire les moyens de la
Défense, c’est toucher aux fonctions régaliennes de
l’État français. C’est évidemment une
possibilité à envisager mais cela suppose d’avoir et de
partager une vision claire de ce qu’on attend de l’État
français. Or, cette coupe budgétaire est plus apparue comme une
variable d’ajustement que comme la mise en œuvre d’une
stratégie visant à réformer l’État.
D’ailleurs, d’autres pays
sont passés par là. Le Canada est ainsi un pays qui pourrait
inspirer la France car les canadiens semblent avoir expérimenté
un certain nombre de stratégies, notamment celle des rabotages budgétaires
pour réduire le déficit. Entre 1984 et 1993, dans les 10
années précédant la grande réforme canadienne,
pas moins de 22 coupes budgétaires furent mises en œuvre par le
gouvernement fédéral.
Chaque nouvelle coupe fut plus
difficile que la précédente et plus démoralisante pour
la fonction publique. Et en dépit de ces efforts importants, le
déficit budgétaire est reparti à la hausse en 1992-1993
pour atteindre 5,6% du PIB. Autant dire que ce furent beaucoup d’efforts
pour rien.
Pourtant, le pays a ensuite su inverser
la tendance. Quand la baisse des dépenses est devenue un
véritable projet de société impliquant toute la
population, le déficit a disparu, la dette a considérable
diminué et la croissance est repartie à la hausse.
De fait, les coupes budgétaires
affectant de façon indifférenciée tous les programmes et
tous les services publics ne sont pas une solution efficace car elles
érodent la qualité des services publics tout en
démoralisant la fonction publique. Finalement, le public finit par
perdre confiance dans la capacité du gouvernement à mener des
réformes.
La remise à plat de la
fiscalité doit se comprendre dans ce cadre. Elle devrait
faire partie intégrante d’une réflexion plus large sur
l’importance relative de l’ensemble des programmes gouvernementaux.
Il s’agit de décider clairement de ce qui doit être
maintenu et ce qui ne peut pas l’être.
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