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À
force de faire traîner en longueur des négociations qui durent
depuis des mois et de jouer la montre, les représentants de la Troïka
et ceux du gouvernement de coalition grec en arrivent à la rencontre
de la dernière chance et ces derniers ne trouvent plus de mots pour
dramatiser la situation, leur vocabulaire épuisé. L’enjeu
est de pouvoir, ou non, rembourser le 16 novembre prochain 6,6 milliards
d’euros de dette, alors que les caisses de l’État sont
vides et que le versement de la tranche de 31,5 milliards d’euros du plan
de sauvetage est toujours suspendue.
Le
gouvernement grec souhaiterait le déblocage consécutif de la
tranche prévue en septembre dernier, d’un montant de 5 milliards
d’euros, car sur les 31,5 milliards d’euros de la
précédente, 23 milliards seront consacrés à la
recapitalisation des banques grecques (à la suite de la
restructuration de la dette publique) et 6,6 milliards au remboursement de la
dette…
Mais
un trou de 1,4 milliards d’euros reste à combler, la Troïka
réclamant un nouveau train de mesures de 9,2 milliards, après
avoir obtenu de nouvelles diminutions de salaire et une augmentation de
l’âge de départ de la retraite, qui représentent
7,8 milliards d’euros d’économies. Elle se comporte comme
en territoire conquis, ne se contentant pas de définir le montant de
l’enveloppe financière mais exigeant des mesures
précises. En l’occurrence une nouvelle diminution des effectifs
de la fonction publique – sans se soucier du niveau atteint par le
chômage, qui a officiellement franchi la barre des 25% de la population
active – et une augmentation de l’âge de départ
à la retraite.
C’est
le prix à payer pour obtenir une rallonge de deux ans du calendrier de
désendettement, au prétexte de ne pas étouffer
l’économie… Un assouplissement on le voit très
relatif que le FMI et la Troïka ont estimé
inévitable, mais sous conditions non négociables. On vient
pourtant d’apprendre que le déficit et la dette grecs à
la fin 2011 ont du être révisés,
désormais établis à 9,4% et 165,3% du PIB,
dégradés par rapport aux précédents chiffres
publiés par Eurostat.
Christos Staikouras,
le ministre des finances, a eu beau faire valoir que le multiplicateur
budgétaire, qui mesure l’impact des mesures de rigueur sur
la croissance, a été de 1 au lieu du 0,5 retenu par
l’Union européenne et le FMI pour établir le plan de
redressement financier du pays. Et que le pays allait entrer dans sa
6ème année consécutive d’une récession
générée par la rigueur, rien n’y a fait !
Poursuivre sur cette voie ne peut qu’accentuer la pente du cercle
vicieux dans lequel se trouve entraîné le pays, mais de
l’eau aura coulé sous les ponts entre temps.
Le
FMI a bien pointé le bout du nez en réclamant une seconde
restructuration de la dette grecque, qui se ferait cette fois-ci au
détriment de la BCE qui la détient. Mais, quoique
réaliste, cette solution n’est pas politiquement acceptable pour
les dirigeants européens. On reparle avec insistance d’un rachat
de la dette grecque par le MES, qui se négocie sur le second
marché à 25% de sa valeur faciale, faisant de celui-ci une bad bank, au lieu
de la BCE qui a déjà beaucoup donné, puisqu’il en
fallait une.
Devant
ses pairs du Parti populaire européen (PPE) réunis à
Bucarest, Antonis Samaras a trouvé les mots
qu’il fallait : « D’une tragédie contemporaine, la
Grèce deviendra une histoire à succès. Du symbole
d’un système qui a échoué, elle deviendra l’exemple
d’un retour spectaculaire ».
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre, Les
CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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