Mercredi, la FED a relevé son taux directeur d’un quart de point à
2-2,25 %. Il n’a jamais été aussi élevé depuis avril 2008. Alors que les taux
continuent de grimper pour s’éloigner des plus bas historiques que l’on a
connus après la crise de 2008, les investisseurs et les commentateurs ne
montrent quasiment aucun signe de peur alors que les marchés actions battent
record sur record et que l’autosatisfaction règne.
Malheureusement, les atterrissages en douceur après une hausse des taux
sont aussi rares que les licornes. Tous les cycles de relèvement des taux ou
presque ont débouché sur une récession, une crise financière ou bancaire. Il
n’y a aucune raison de croire que, cette fois, il pourrait en aller
différemment.
Comme je l’ai déjà expliqué, les périodes de taux planchers favorisent le
crédit et la hausse des prix des actifs des façons suivantes :
- En encourageant les consommateurs, le privé et le public
à recourir au crédit ;
- En décourageant l’épargne, ce qui favorise les dépenses
et la spéculation ;
- Les investisseurs peuvent emprunter à bon marché pour
spéculer (par exemple en contractant un crédit hypothécaire pour
spéculer sur l’immobilier, ou une marge de crédit pour investir dans les
actions) ;
- En facilitant les rachats d’actions, l’augmentation des
dividendes et les opérations de fusions et acquisitions ;
- En dopant l’inflation, ce qui soutient les prix d’actifs
tels que les actions et l’immobilier.
Lorsque les banques centrales abaissent les taux afin d’initier une
reprise après une récession (comme le fait la FED), elles interfèrent sur le
fonctionnement organique de l’économie et des marchés financiers, ce qui a de
sérieuses conséquences. Notamment au niveau de la création de distorsions et
de déséquilibres. En maintenant les taux à des niveaux artificiellement bas,
la FED lance de faux signaux qui encouragent l’entreprise et d’autres
initiatives économiques qui ne seraient pas viables dans un environnement
normal.
Les initiatives qui sont prises en raison de conditions de crédit
artificielles sont des investissements hasardeux qui échouent habituellement
lorsque les taux sont normalisés. Par exemple, les sociétés Internet de la
fin des années 90 qui ont débouché sur la bulle .com, les gratte-ciel non
achevés de Dubaï ou d’autres marchés émergents après la dernière crise
financière.
S’il peut être compliqué de prédire avec exactitude quels investissements
ou entreprises sont mal avisés en raison des distorsions engendrées par les
banques centrales, une citation de Warren Buffett est très à propos : « Ce
n’est qu’à marée basse que l’on découvre ceux qui n’ont pas de maillot. »
Dans le cadre de cet article, la marée basse, ce sont les taux. Ces
investissements malavisés qui tournent au vinaigre en raison de la
normalisation des taux engendrent souvent des récessions et/ou une crise
bancaire/financière.
Ci-dessous, voici un graphique qui met en exergue les récessions et les
crises engendrées après des cycles de hausse des taux :
(…)
Les investisseurs dans les marchés actions américains sont dangereusement
exposés à l’implosion à venir de secteurs sensibles aux taux, qui contaminera
la Bourse surévaluée. Le S&P 500 a grimpé de près de 300 % depuis 2009 en
raison des manipulations de la FED :
De nombreux indicateurs montrent que les marchés actions américains sont
plus surévalués que jamais, ce qui signifie qu’un nouveau marché baissier est
inévitable. D’après le ratio capitalisation boursière/PIB (aussi connu pour
être l’indicateur préféré de Warren Buffett), les marchés sont aujourd’hui
plus surévalués que durant la bulle Internet :
Le cycle actuel de relèvement des taux n’aura pas d’autres conséquences
que les précédentes. Cela pourrait être même pire alors que les taux ont été
à des niveaux historiquement bas durant une période de longueur inédite. La
récession et la crise à venir seront proportionnelles aux déséquilibres et
aux distorsions qui ont affecté l’économie.
Article de Jesse Colombo, publié sur Forbes le 27 septembre 2018