Mes chères contrariées, mes chers contrariens,
Il est difficile d'expliquer aux gens qu'il n'y a pas de bonnes
solutions pour sortir de la crise. Non pas que ce soit technique, ou que les
gens ne comprennent pas les explications. Non, ce qui est incroyable,
après cinq ans de crise, c'est que nous soyons toujours
confrontés à du déni. Ce n'est pas possible, il doit y
avoir une solution.
La réponse est non. Il n'y a, et il n'y aura, aucune solution
facile ou confortable.
La preuve nous vient aujourd'hui du Royaume-Uni qui pourtant dispose
de sa propre souveraineté monétaire, de sa propre planche
à billets, qu'il ne se prive pas d'ailleurs d'utiliser.
Dans mon précédent article intitulé
« Que faire », l'un des lecteurs faisait remarquer que
je n'évoquais pas l'essentiel, à savoir posséder notre
propre monnaie nationale. En réalité, ce n'est justement pas
l'essentiel. Pourquoi ? Si posséder sa propre souveraineté
monétaire confère à un état une
indépendance indéniable, cela ne règlera en rien le
stock de dettes existant.
Si retrouver notre propre monnaie peut, en cas de désaccord
persistant avec nos partenaires européens, être une solution
parfaitement viable de sortie, il n'en demeure pas moins que cela ne
règlera pas le problème des dettes.
Pour être plus précis, sortir de l'euro peut bien
sûr permettre de retrouver de la compétitivité, et in
fine de sortir d'une partie de la crise, mais il faut être
honnête : cela s'accompagnerait au mieux de dévaluations
compétitives, au pire de création monétaire d'une telle
importance que cela amènerait de l'hyperinflation.
En disant cela, je ne dis pas que l'euro doit être sauvé
à tout prix, ni qu'une sortie de l'euro serait une horreur. Je dis
juste qu'il ne faut en aucun cas idéaliser cette option. Ce peut
être une partie de la réponse, en aucun cas LA réponse
à la crise multifactorielle que nous traversons.
C'est d'ailleurs à mon sens ce que prouve aujourd'hui l'exemple
du Royaume-Uni. Que la perfide Albion connaisse des difficultés économiques
majeures malgré son indépendance monétaire
démontre bien qu'une politique monétaire aussi essentielle
soit-elle n'est pas l'alpha et l'oméga dans la crise actuelle.
Grande-Bretagne
: David Cameron annonce une austérité accrue
Les propos du Premier ministre britannique David Cameron ne sont pas
anodins. Loin de là. Il a préparé mercredi ses
compatriotes à de nouvelles mesures d'austérité,
cruciales selon lui, pour que la Grande-Bretagne ne
« coule » pas.
Rien que ça. Remarquez, pour un pays qui a gagné la
bataille de Trafalgar, cela me remonte le moral. Ce ne serait après
tout qu'un juste retour des choses.
Voici les meilleurs moments de son intervention :
« Si nous n'agissons pas, si nous ne prenons pas des
décisions difficiles et douloureuses, si nous ne faisons pas preuve de
détermination et d'imagination, la Grande-Bretagne ne sera
peut-être pas dans l'avenir ce qu'elle a été par le
passé. »
« Parce que la vérité est la suivante, nous
sommes aujourd'hui dans une course mondiale, l'heure de vérité
a sonné pour des pays comme le nôtre. Allons-nous nager ou
couler, agir ou décliner », a-t-il déclaré,
sur un ton grave.
Son discours fait suite aux annonces faites lundi par le ministre
britannique des Finances, George Osborne, de nouvelles coupes relativement
importantes de 10 milliards de livres dans les dépenses sociales et qui
toucheront notamment les allocations familiales ou les aides aux logements
des jeunes chômeurs. Elles s'ajoutent aux coupes de 18 milliards de
livres déjà prévues d'ici à 2015 par le
gouvernement.
Et David Cameron de rajouter :
« Comment allons-nous nous en sortir ? Ce n'est pas
compliqué. En travaillant dur. En donnant la priorité à
la famille. En prenant nos responsabilités. En servant les
autres », a-t-il énuméré, reprenant les
valeurs traditionnelles des Conservateurs.
Sauf qu’objectivement, il me semble difficile de parler de
famille lorsque justement les familles sont les premières
touchées par les plans d'austérité du gouvernement
britannique. Il est difficile de travailler plus si ce n'est de supprimer
purement et simplement tout droit à la retraite puisque, compte tenu
des niveaux de pension au Royaume-Uni, les « vrais »
seniors sont de plus en plus nombreux à travailler au-delà de
70 ans... Encore faut-il pouvoir trouver un travail !
Quant au fait de servir les autres, j'imagine qu'il faut comprendre
que les Britanniques doivent continuer à payer pour les gentils
banquiers de la City, et les sympathiques lords propriétaires de
l'Angleterre et dont la rente de situation explique le prix intouchable de
l'immobilier anglais.
On peut donc dire que le tapis rouge anglais semble quelque peu
percé. Encore un effort David, et nos amis britanniques traverseront
en masse la Manche pour venir vivre dans notre douce France !
Il faut donc retenir qu'il n'y a aucune idée neuve, de ce
côté-ci ou de l'autre du Channel. Le peuple anglais sera
saigné à blanc, avec ou sans la livre sterling, au même
titre que les Espagnols, les Italiens, les Portugais... ou bien sûr les
Français, avec ou sans l'euro.
Mais il y a une bonne nouvelle tout de même, sachez-le :
Malgré
la crise, l'Union européenne veut poursuivre sa politique
d'élargissement
Malgré la crise qui affecte durement les économies de
nombreux pays européens, Bruxelles souhaite que la politique
d'élargissement se poursuive, tout en reconnaissant que la plupart des
pays candidats doivent encore faire des progrès avant de rejoindre
l'UE.
Huit pays sont candidats ou candidats potentiels à l'UE, dont
six dans les Balkans : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo,
Macédoine, Monténégro et Serbie, ainsi que l'Islande et
la Turquie.
« Renforcer l'État de droit et la gouvernance
démocratique est crucial pour le processus
d'élargissement », a estimé mercredi la Commission
européenne dans son rapport de suivi annuel sur le processus
d'élargissement aux Balkans occidentaux, à la Turquie et
à l'Islande.
« Le rythme auquel chaque pays évolue vers
l'adhésion dépend de ses performances » dans le
domaine du droit, et notamment des progrès enregistrés dans la
lutte contre la criminalité organisée et la corruption,
souligne le rapport présenté par le commissaire chargé
de l'Élargissement, Stefan Füle.
En revanche, la commission note de façon
« surprenante » que les progrès de la Turquie sont
insuffisants. « Le nombre élevé d'affaires
juridiques et d'enquêtes concernant des journalistes ainsi que la
pression indue à l'encontre des médias » continuent
d'être une source de « préoccupation
grave », affirme le rapport qui déplore en outre le litige
non réglé entre la Turquie et Chypre.
La Commission compte dépenser 14,1 milliards d'euros de 2014
à 2020 pour aider les pays sur la voie de l'adhésion.
Que l'on soit pro ou anti-européen, peu importe. Factuellement, l'Europe a atteint un stade de son
développement où elle est fragile. Fragile de par des
institutions qui doivent s'adapter. Fragilisée par une crise
économique mondiale et d'ampleur historique. Bref, avant de nous
« élargir », il conviendrait plutôt de se
« consolider » !
D'ailleurs, à propos de se consolider, nos amis allemands ne
sont guère les amis des Grecs...
Croix
gammées à Athènes : l'Allemagne sous le choc
Un excellent article du Figaro
revient sur cette affaire.
« L'accueil réservé à la
chancelière mardi à Athènes pour sa visite officielle a
choqué les Allemands. Ils jugent les slogans hostiles
"ingrats", alors que l'Allemagne reste le premier créancier
de la Grèce.
L'Allemagne est sous le choc après l'accueil
réservé à sa chancelière par la rue grecque. Les
images des manifestations d'opposants à la venue d'Angela Merkel, mardi en Grèce, avec force symboles nazis
et slogans de rejet, s'étalaient dans presque tous les journaux
mercredi. Soutenue par les sociaux-démocrates, la coalition de centre
droit de la chancelière a cloué au pilori le patron de Die
Linke, le parti de la gauche radicale, qui a cautionné les
dérapages en défilant à Athènes.
"L'Allemagne n'a pas mérité ça : des
protestations nauséabondes contre Merkel
à Athènes ! Et nous payons encore plus", s'exclamait en
une le quotidien populaire Bild qui qualifie la visite
d'"erreur politique", "en dépit des bonnes intentions"
qui ont présidé à son organisation. "On ne peut pas
être plus ingrat. Ça suffit ", écrit le journal, qui
avait suggéré aux Grecs de vendre leurs îles ou encore
l'Acropole pour rembourser leurs dettes en 2010.
"Ce n'est pas le IVe Reich !", écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung, qui rappelle que
jamais la chancelière n'a été ainsi reçue avec
à la fois les honneurs militaires et les croix gammées des
manifestants. "On peut ouvertement se demander si les témoignages
de sympathie à mots couverts de la chancelière ont atteint les
oreilles des manifestants", écrit le journal, pour lequel seul
"un petit cadeau" chiffrable en milliards d'euros aurait pu changer
quelque chose. »
Voilà qui ne va pas aider Angela à vendre à son
opinion publique déjà excédée l'idée d'une
activation du MES et de transfert de fonds massifs pour sauver
Athènes, alors que l'attitude du peuple a été prise par
les Allemands comme une véritable insulte.
La crise européenne, loin d'être finie, ne va pas tarder
à rebondir. Pour le moment, les gouvernements tentent
désespérément de cacher toute la poussière sous
le tapis, au moins jusqu'à l'élection américaine du 6
novembre.
Il est fort probable que nous connaîtrons une nouvelle
période de grande tension à l'issue des élections aux
USA. D'ici là, les autorités feront tout pour maintenir les
marchés en état de lévitation et la crise
européenne en sourdine.
Mais il ne faut pas s'y tromper. La tension monte dans les plaques
tectoniques. Lorsque tout lâchera, le tremblement de terre sera
terrible.
Charles
SANNAT
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