L’année 2016 a
été porteuse de lourdes pertes pour les marchés des obligations, bien que les
prix se soient stabilisés ces derniers jours.
Le graphique ci-dessus
représente les rendements à dix ans des obligations porteuses des risques d’investissement
les plus faibles. Une majorité des autres obligations à dix ans ont
enregistré une hausse plus importante encore de leurs rendements (c’est-à-dire
un déclin plus important de leurs prix). C’est important, parce que le
système bancaire est grandement investi sur les obligations souveraines non
seulement de court terme, mais aussi sur les obligations à cinq et dix ans.
Les banques centrales se sont exposées aux mêmes risques au travers de leurs
achats d’obligations, ce qui représente évidemment de gros risques pour la
stabilité de leurs devises.
La raison principale de la durée
de non-appariement excessive entre les dépôts de court terme et les
obligations à maturité de plus long terme est la faiblesse des taux d’intérêt.
Les banques ne peuvent simplement pas enregistrer de rendements raisonnables
en achetant des obligations à court terme, et sont encouragées par les
régulations bancaires à rechercher de plus importants rendements et à acheter
des obligations gouvernementales de plus long terme plutôt que de prêter de l’argent
à des clients à risque. En conséquence, les banques ont souffert de pertes
substantielles ces derniers mois, et notamment depuis le début du trimestre
en cours.
Le tableau ci-dessous présente
les pertes enregistrées par les plus gros marchés d’obligations souveraines
la semaine dernière. Les obligations des gouvernements de la zone euro ont
été particulièrement touchées.
Le cas de la Grèce est particulièrement
inquiétant, parce que les annulations de dette qu’engendrerait un défaut du
pays excèderaient le capital des actionnaires de la BCE.
Il est nécessaire de garder à l’esprit
que les banques de la zone euro sont liées de très près à leurs gouvernements
nationaux, et devraient devenir leur source primaire de financements. De
plus, les régulations du Comité de Bâle facilitent la situation en traitant
les obligations souveraines comme les meilleures formes d’investissement qui soient.
Imaginez les pertes auxquelles ont eu à faire face les banques italiennes ou
espagnoles quand leurs obligations nationales se sont effondrées en l’espace
de six semaines – notamment celles dont les réserves d’obligations excèdent
de loin les fonds tangibles de leurs actionnaires. Même les banques
allemandes, sans parler des banques françaises et du reste de la zone euro,
sont en difficulté. A moins que la reprise actuelle des prix des obligations
se maintienne jusqu’à la fin du mois, ces banques pourraient enregistrer des
pertes systémiquement déstabilisantes en fin de trimestre.
Et ce n’est pas tout. L’idée est
généralement qu’en l’absence d’inflation des prix, les banques centrales
contrôlent les marchés des obligations. Ces pertes n’étaient pas supposées
arriver. Il devient donc apparent que les banques centrales se trouvent
aujourd’hui coincées par leur propres politiques monétaires, et ne peuvent
plus rien faire sans déstabiliser les marchés. En plus de cela, comme je l’ai
expliqué récemment, parce que l’inflation est sous-estimée dans les
statistiques officielles, et parce que les prix des obligations ont tendance
à y être surestimés, des déclins supplémentaires peuvent être attendus.
Les marchés nous indiquent que
la bulle sur les obligations a peut-être commencé à imploser. Nous pouvons
considérer le silence des médias comme une indication que les investisseurs
ont été pris de court. Les banques centrales devraient cependant être conscientes
du danger. Les récentes déclarations concernant la normalisation des taux d’intérêt
ont été inspirées par un besoin de contrôler les évaluations excessives, qui
devrait maintenant être remplacé par des tentatives de soutenir les prix des
obligations. Les discussions autour d’une nouvelle hausse des taux par la Fed
devraient donc se dissiper. Et bien que le FOMC* n’ait pas pu l’admettre
ouvertement hier, Yellen l’a effectivement confirmé en soulignant sa
neutralité.
L’Histoire nous apprend deux
choses. Les banques centrales finissent toujours par être vaincues par les
marchés, et les banquiers centraux croient toujours pouvoir conserver leur
pouvoir sur les marchés. Nous ne devrions pas nous montrer complaisants face
aux risques systémiques du système financier. Nous pouvons aller encore plus
loin, et dire que de tous les risques qui pourront déclencher une nouvelle
crise financière, ce sera certainement un bon vieux marché baissier des
obligations qui le fera.
*Federal Open Market Committee