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Cours Or & Argent

Libertarianisme, politique, philosophie: une entrevue avec Martin Masse

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Publié le 24 septembre 2006
3472 mots - Temps de lecture : 8 - 13 minutes
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Rubrique : Fondamental




Dans votre article « Cinq attitudes libertariennes essentielles », vous attribuez aux libertariens d’être: indépendants, optimistes, individualistes, conscients de l’avenir et tolérants. Que répondez-vous à ceux qui parlent d’une conscience collective et de progrès social comme étant le produit d’efforts collectifs?

          D’un point de vue scientifique, il est illogique de parler de « conscience collective ». Les collectivités ne réfléchissent pas, n’ont pas de conscience, de volonté, ni aucun autre attribut qui pourraient en faire des entités autonomes. Seuls les individus possèdent ces attributs. Selon moi, il s’agit d’un concept non seulement faux, mais qui découle d’une vision mystique, quasi religieuse de la collectivité.

En sociologie, il y a cent ans, il y avait deux courants méthodologiques. L’un, représenté par Émile Durkheim, soutenait que la société existait en soi et qu’il existait une telle chose que la conscience collective. L’autre, représenté par Gabriel de Tarde, partait de l’idée que tout phénomène social devait être expliqué par des actions et des pensées individuelles, et résultait de l’interaction entre les individus. C’est Durkheim qui a fini par s’imposer dans la sociologie française, et Tarde est aujourd’hui malheureusement complètement oublié.

          Mais tout comme le marxisme, le nationalisme, le féminisme radical, et toutes les idéologies qui se fondent sur des identités collectives mythifiées, la sociologie durkheimienne n’a rien de scientifique. Il est complètement absurde de parler de la société et de phénomènes sociaux en faisant abstraction des individus qui la composent. Seul l’individualisme méthodologique permet une explication rationnelle de ces phénomènes.

          On peut parler d’« efforts collectifs » si on réfère aux efforts entrepris par des individus qui collaborent entre eux pour atteindre un objectif commun, tout en cherchant à avancer leur intérêt individuel. La civilisation (et donc le progrès social) est fondée sur les échanges et la coopération volontaire entre les individus, et les libertariens n’ont aucun problème avec ça. Ils ne font pas la promotion de l’égoïsme et du chacun-pour-soi, mais bien de la liberté. La différence fondamentale avec les partisans des idéologies collectivistes est que lorsqu’eux parlent d’efforts collectifs, ils comprennent les efforts entrepris sous l’effet de la coercition de l’État, ou dans le but d’atteindre des objectifs collectivistes qui s’imposeront à tous. Dans ce cas, il n’y a pas de progrès social selon les libertariens, mais plutôt l’imposition des intérêts de certains aux autres. Tous ce qui est réalisé avec des fonds publics – c’est-à-dire avec de l’argent enlevé de force aux individus – entre dans cette dernière catégorie.

Vous mentionnez dans votre article « Les libertariens sont-ils à droite? » que les libertariens sont ni à droite, ni à gauche. Or, très souvent, les libertariens sont associés avec le conservatisme ou une politique de droite. Pensez-vous que les gens ont tort de faire cette association? Est-ce que les libertariens ont tort de s’allier à la droite?

          Les gens n’ont pas tort de faire cette association, puisque depuis quelques décennies, les libertariens ont en effet eu plus tendance à collaborer avec des conservateurs qu’avec des socialistes. Les gens de droite semblent mieux comprendre et apprécier les vertus du libre marché, alors que les gens de gauche le combattent et souhaitent toujours plus d’intervention étatique.

          Mais les libertariens ont aussi beaucoup d’affinités avec les gens de gauche. Ils défendant par exemple la légalisation totale des drogues, de la prostitution, et la liberté de faire ce qu’on veut avec son corps, à partir de la notion de base de « propriété de soi ». Si on ne fait de mal à personne, on devrait faire ce qu’on veut, c’est aussi simple que cela. Les conservateurs ont au contraire tendance à vouloir imposer leurs valeurs morales à tous.

          D’un autre côté, le puritanisme et l’intolérance ne se retrouvent pas uniquement à droite. Les gauchistes de nos jours mettent de l’avant plusieurs valeurs « politiquement correctes » qu’ils cherchent eux aussi à imposer à tous en se servant de l’État. Et les conservateurs, même s’ils défendent en théorie plus de libre marché, sont souvent aussi interventionnistes que les gouvernements de gauche lorsqu’ils sont au pouvoir. George W. Bush a par exemple fait croître considérablement l’État fédéral américain – et pas seulement à cause des dépenses militaires – alors que sous Clinton, il avait un peu diminué en termes relatifs.

          Bref, les libertariens ont certaines choses en commun, et beaucoup de positions divergentes, autant avec la droite qu’avec la gauche. Pour des raisons stratégiques, ils ont plutôt tendance à s’allier avec des conservateurs en ce moment, et je crois que cela est inévitable. Mais à plus long terme, je pense qu’il faudra développer une plus grande autonomie comme mouvement et prendre nos distances avec toutes les tendances étatistes. Cela sera probablement plus facile à réaliser si nous devenons un courant philosophique et politique majeur.

Pourquoi croyez-vous qu’il n’existe pas de parti politique représentatif de la position libertarienne au Canada?

          En fait, il en existe un, le Parti libertarien du Canada. Mais il est minuscule, désorganisé, et ne compte qu’une poignée de militants. Cela est dû en partie au fait que les libertariens qui veulent s’impliquer en politique ont justement eu tendance à se joindre à des partis de droite plus influents, le Parti réformiste, l’Alliance canadienne ou le Parti conservateur par exemple. On peut au moins avoir une influence sur la politique canadienne en joignant ces partis, même en étant une faction parmi d’autres.

          Une autre raison est qu’il est extrêmement difficile de faire de la politique, dans un système démocratique, sans faire des promesses à tout un chacun. Les partis qui ont du succès sont ceux qui réussissent à « acheter », de façon crédible, des « clientèles électorales », en leur promettant des subventions, des privilèges, des programmes, des protections, des transferts, etc. Comme les libertariens s’opposent à tout cela, parce qu’ils croient en un État minimal qui ne redistribue rien et qui offre la même liberté et les mêmes droits pour tous, ils ne sont pas très compétitifs dans le jeu électoral. Ou bien ils tiennent un discours qui apparaît négatif parce qu’il vise uniquement à démanteler l’État, ou bien ils font des compromis et alors ils contredisent leur philosophie. Même aux États-Unis, le Parti libertarien est le 3e parti en importance mais ne recueille que 2 ou 3% des voix.

Vous dites dans « La démocratie, c’est le socialisme »: « Ce qu’il nous faut, c’est plus d’entrepreneurs libertariens, pas plus de politiciens libertariens. » Faut-il entendre par ce propos qu’une société ne change pas vraiment par le biais de la politique?

          Dans un régime démocratique, les politiciens doivent répondre aux demandes des électeurs s’ils veulent être populaires et se faire élire. La meilleure stratégie est de faire des promesses à des groupes d’intérêt qui sont bien organisés et qui se font entendre (les syndicats, les grosses entreprises, les lobbys divers), et de faire payer la note par la masse des contribuables qui n’est représentée par aucun groupe de pression. Cela engendre une tendance à la croissance de l’État, comme on l’a vu tout au long du 20e siècle.

          S’opposer à cette tendance et à cette dynamique démocratique n’est possible que si l’opinion publique est prête à l’accepter. Si les idées libertariennes étaient bien comprises et largement répandues au sein de la population, si des groupes de pression défendant les contribuables étaient influents, il serait plus facile pour un politicien de défendre ces idées et de connaître le succès. Il faut changer la nature des débats, influencer le « climat d’opinion », avant que les politiciens puissent changer leur discours.

          Voilà pourquoi avant de penser faire de la politique, il faut faire comprendre aux élites, puis à la population en général, que l’étatisme est néfaste alors que la liberté est le fondement de la prospérité et de la civilisation. Il faut plus de journalistes, de penseurs, de professeurs, de commentateurs, d’artistes, d’avocats, de gens dans tous les milieux pour défendre ces idées.

          Les socialistes font leur propagande dans les médias et les milieux académiques depuis 150 ans, et ils ont bien réussi à imposer leurs idées un peu partout. Les libertariens doivent faire la même chose s’ils veulent réussir à influencer la politique à plus long terme. Ils doivent créer des publications, des think tanks. Je pense que c’est rapidement en train de se produire. La tournure des débats a beaucoup changé par exemple au Québec au cours des dernières années. Plus les idées libertariennes seront influentes, plus les politiciens pourront se permettre de les défendre et de les mettre en oeuvre, sans risquer d’être trop impopulaires.

Si ce n’est un parti politique qui changera le système actuel, selon vous, comment arriverons-nous à une société libertarienne?

          Comme je viens de le mentionner, il faut d’abord faire un travail d’éducation auprès du public et des décideurs et faire avancer ces idées dans tous les domaines. Ce n’est pas nécessairement un parti libertarien qui changera le système actuel, mais sous la pression de l’opinion publique, n’importe quel parti pourrait adopter des mesures visant à réduire le rôle de l’État. Dans certains pays comme la Nouvelle-Zélande ou les Pays-Bas, des partis sociaux-démocrates ont fait des réformes bien plus ambitieuses que celles de partis conservateurs ou libéraux ailleurs.

          À plus long terme, je pense que c’est l’évolution économique et technologique qui fera la différence et nous rapprochera d’une société libertarienne. Internet est ainsi en train de créer un monde où le contrôle de l’information devient pratiquement impossible, alors qu’il y a à peine quelques décennies, un gouvernement pouvait museler tous les médias sur son territoire en empêchant à sa population d’avoir accès à d’autres sources. L’avancement des moyens de transport et de la technologie médicale aura un impact similaire. Lorsqu’on pourra facilement, rapidement et à un coût raisonnable aller se faire soigner dans un autre pays (le « tourisme médical » est un phénomène qui a déjà fait son apparition), le monopole public sur la santé ne pourra plus être maintenu. Il s’effondrera devant la concurrence étrangère, qui était impossible jusqu’à récemment à cause des coûts et des difficultés que cela pose. Et que dire d’avoir accès, par des réseaux de communication ultrasophistiqués, à n’importe quel service d’éducation dans le monde? Nos écoles et universités publiques ne pourront plus maintenir leur monopole non plus.

La mondialisation met les produits et services du monde entier de plus en plus à notre portée. Je pense que nous allons rapidement vers un monde où le choix ira en augmentant, et où il sera de plus en plus difficile pour les États de contrôler leur population comme ils pouvaient le faire auparavant. À moins de se mettre à l’écart de l’économie mondiale et d’accepter de devenir une société pauvre et arriérée, aucun pays ne pourra éviter ces changements. Graduellement, les États vont devenir de moins en moins importants et pertinents dans la vie des gens, un marché global répondra à la plupart de leurs besoins. C’est ainsi je pense que nous nous rapprocherons de plus en plus d’une société libertarienne. Le processus est déjà bien enclenché, et à moins d’une catastrophe épouvantable à l’échelle mondiale, je ne vois pas ce qui pourra l’arrêter.

Vous avez déjà été favorable au Parti réformiste, maintenant fusionné dans le Parti conservateur du Canada. Est-ce que vous les appuyez toujours?

          Le parcours de Stephen Harper illustre bien la difficulté de défendre des idées libertariennes en politique. Alors qu’il partageait en grande partie les idées libertariennes quand il était député réformiste, puis ensuite quand il a quitté la politique, il est devenu un politicien opportuniste plus ou moins comme les autres depuis qu’il est revenu en politique. Il défend par ailleurs une politique étrangère militariste et interventionniste (en Afghanistan) qui n’a rien de libertarien.

          Je n’appuie pas le Parti conservateur et je n’ai pas voté aux élections de janvier 2006. Je n’ai pas beaucoup d’illusion que ce gouvernement fera quoi que ce soit de significatif pour réduire la taille de l’État. Par contre, je connais des libertariens au sein de ce parti, y compris dans le gouvernement, et j’espère qu’ils pourront mettre de l’avant des réformes visant à réduire le rôle de l’État, même de façon partielle dans un ou deux ministères. Toute réforme qui va dans ce sens est utile.

Dans votre article « La démocratie, c’est le socialisme », vous dénoncez la démocratie actuelle qui selon vous favorise le socialisme et confère trop de pouvoir à l’État. Selon vous, quel genre de démocratie serait acceptable et quel rôle devrait jouer l’État?

          Le seul type de démocratie qui est acceptable est celui qui se pratique à une petite échelle, dans des communautés auxquelles les individus acceptent de s’intégrer et de participer de façon volontaire et qu’ils ont toujours le choix de quitter. La démocratie devient alors un moyen comme un autre de gérer ce qui doit l’être collectivement. Le rôle de l’« État », si on peut parler d’État (ou d’une administration à petite échelle dans ce cas) est alors un reflet plus représentatif de la volonté de la majorité des participants. Ceux qui n’acceptent plus les règles du jeu peuvent toujours quitter la communauté et aller vivre ailleurs, dans celle d’à côté peut-être. Ou même, si on part de l’idée que les communautés n’ont pas nécessairement une base territoriale continue, continuer d’habiter au même endroit tout en adhérant à une autre association, comme on change de compagnie d’assurance par exemple.

          Plus la communauté en question est large, moins ce principe tient. Dans le contexte politique actuel, on peut changer de ville, mais ce n’est pas là que se prennent les principales décisions politiques. Beaucoup de gens déménagent d’une province à l’autre parce qu’ils préfèrent aller vivre dans un endroit où les impôts sont moins élevés ou bien où il est plus facile de se lancer en affaires. C’est mieux que si le Canada était un pays unitaire, mais tout de même, déménager dans une autre province est un gros changement. Au niveau du pays en entier, les décisions prises de façon démocratique s’appliquent à tout le monde sans qu’on ait le choix de les accepter ou non, à moins d’être prêt à changer complètement de vie en allant dans un autre pays.

          Plus le pouvoir étatique est décentralisé, plus il se rapproche du citoyen, et plus on a de chance que ses décisions reflètent la volonté d’une très grande majorité, sinon de la totalité, des membres d’une communauté. Pour les libertariens, l’idéal serait donc d’avoir une multitude de petites communautés, ou peut-être de pouvoir adhérer simplement à différents services publics exactement comme on achète des services privés, de façon volontaire et en ayant le choix entre différentes options. Dans un tel contexte, la nature coercitive de l’État, même démocratique, serait réduite à sa plus simple expression, et peut-être même entièrement éliminée.

Vous êtes contre la discrimination dite « positive », et les droits collectifs. Que répondez-vous à ceux et celles qui considèrent les droits collectifs comme étant le seul moyen de faire changer les attitudes (souvent négatives) des gens envers des groupes de personnes traditionnellement défavorisées? Par exemple, ne croyez-vous pas que cela fut nécessaire pour promouvoir l’égalité des sexes?

          Le problème avec l’inégalité entre les sexes n’était pas l’attitude des gens, mais plutôt les lois. C’est l’État qui empêchait les femmes de faire ce qu’elles voulaient. Jusqu’à très récemment, les femmes étaient considérées comme des mineures par la loi, et devaient rester sous la tutelle de leur père ou de leur mari. Il est donc étrange de dire que l’intervention de l’État est la solution, alors que l’État était le problème. Si l’État s’était contenté de garantir une égalité formelle entre les hommes et les femmes, chacun et chacune auraient été libres de vivre selon des modèles traditionnels (ce que beaucoup d’hommes et de femmes continuent de vouloir), mais aussi de vivre différemment sans subir de sanction légale.

          La situation est la même pour les homosexuels, dont les actes sexuels étaient criminalisés jusqu’à il y a à peine quelques années encore aux États-Unis. Pourquoi se fier sur l’État interventionniste comme s’il était la source de la justice et de l’équité, alors qu’il est habituellement au contraire la source de la discrimination et de l’injustice? Aujourd’hui, ce sont les fumeurs qu’on persécute. On interdit de fumer dans tous les bars, alors qu’un bar est un endroit privé, propriété d’une personne en particulier, qui devrait pouvoir inviter qui elle veut dans son commerce. Personne n’est obligé d’y aller de toute façon. La protection des non-fumeurs doit-elle aller jusqu’à piétiner la liberté des commerçants et des fumeurs? Certainement pas, mais on voit là encore l’arbitraire des lois, comme dans le temps où les femmes, les homosexuels et d’autres groupes étaient victimes de discrimination.

          Dans une société fondée sur le principe de l’égalité et de la liberté de chacun (toujours dans la mesure où il n’agresse personne), chacun peut s’associer avec qui il veut et discriminer contre qui il veut. La discrimination privée n’est pas un problème; si quelqu’un ne veut pas faire affaire avec moi pour une raison ou une autre, je peux toujours aller ailleurs. Les gens de religions et croyances différentes ont de toute façon intérêt à commercer et échanger, malgré leurs différences, et l’ont toujours fait à travers l’histoire lorsque les États ne sont pas venus créer de la bisbille. C’est la discrimination systématique de l’État qui est un problème, puisqu’elle s’applique à l’ensemble des relations sociales, sans possibilité de se tourner vers une alternative. On devrait s’assurer de l’éliminer dans tous les domaines au lieu d’en inventer de nouvelles formes dites « positives ».

Y a-t-il d’autres courants philosophiques qui vous intéressent et qui vous inspirent?

          Oui, l’épicurisme dans la Grèce antique. C’est une philosophie qui vise l’atteinte de la tranquillité d’esprit (et pas la jouissance effrénée, comme on le croit souvent à tort) dans un monde rationnel que l’on cherche à comprendre de la façon la plus scientifique possible. Épicure a popularisé la thèse atomiste, c’est-à-dire selon laquelle tout l’univers est fait d’atomes agencés de diverses façons. Selon lui, il n’y a pas de réalité surnaturelle et les dieux, s’ils existent, ne se préoccupent pas des hommes. Il explique également que l’univers et la vie évoluent, d’une façon qui ressemble beaucoup à la théorie darwinienne. C’est une philosophie extrêmement moderne, encore tout à fait pertinente aujourd’hui.

          Et en plus, l’épicurisme est d’une certaine façon la première philosophie libertarienne de l’histoire. La société juste est fondée sur une entente de n’agresser personne et de collaborer avec tous pour viser le bonheur. L’État ne joue aucun rôle dans le monde idéal d’Épicure. Tout revient aux désirs et à l’action individuels. L’épicurisme a influence de nombreux auteurs libéraux classiques, et devrait figurer à mon avis comme l’une des philosophies les plus importantes dans le développement de la civilisation occidentale, même si elle est aujourd’hui considérée comme plutôt marginale.

Quels auteurs vous ont le plus influencé? Auriez-vous des recommandations de livres pour ceux et celles qui s’intéressent au libertarianisme?

          L’auteur qui m’a le plus influencé est Ludwig von Mises, selon moi l’un des penseurs les plus brillants du 20e siècle. Le libertarianisme comprend divers courants, dont les principaux sont l’École autrichienne (Mises, mais également Friedrich Hayek, plus connu comme lauréat du Prix Nobel d’économie en 1974, Murray Rothbard et plusieurs autres), l’École néo-classique (Milton Friedman, James Buchanan, George Stigler, Gary Becker), et la philosophie objectiviste, développée par la romancière Ayn Rand. Tous ces courants défendent le capitalisme, la liberté individuelle et un État minimal (ou dans certains cas inexistant), mais leurs méthodologies, leurs stratégies et leur vision plus générale de la société diffèrent sur plusieurs points cruciaux.

          Ma préférence va sans l’ombre d’un doute à l’École autrichienne, qui fonde toute son approche sur l’action des individus et qui propose une analyse globale pertinente pour toutes les sciences humaines, et pas seulement pour l’économie. Tout étudiant en économie, sociologie, histoire, science politique, psychologie ou anthropologie devrait, je pense, lire les 200 premières pages du chef-d’oeuvre imposant de Mises, L’action humaine (Human Action).

            

Martin Masse

Le Quebecois Libre


Martin Masse est né à Joliette en 1965. Il est diplômé de l'Université McGill en science politique et en études est-asiatiques. Il a lancé le cybermagazine libertarien Le Québécois Libre en février 1998. Il a été directeur des publications à l’Institut économique de Montréal de 2000 à 2007. Il a traduit en 2003 le best-seller international de Johan Norberg, Plaidoyer pour la mondialisation capitaliste, publié au Québec par l'Institut économique de Montréal avec les Éditions St-Martin et chez Plon en France.



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