Mes chères contrariées, mes chers contrariens,
En cette période, je ne résiste pas à faire le
parallèle entre l'agent 007 et My name is Baroin...
François Baroin. Bon, je l'avoue, cela fait
moins classe que Bond, James Bond, mais tout de même... Nous aussi nous
savons lancer des opérations secrètes. Retour sur
l'événement.
Black Swan :
Bercy anticipa un éclatement de la zone euro
Qui a dit que nos ministres n'étaient pas cultivés ni
créatifs. François Baroin, dans son
livre Journal de crise,
révèle qu'une réunion secrète a eu lieu à
Bercy l'an dernier pour évoquer un scénario catastrophe :
l'éclatement de la zone euro. Nom de code de cette rencontre :
« Black Swan ».
François Baroin admet, dans son livre,
avoir travaillé sur l'hypothèse d'un éclatement de la
zone euro.
L'ancien ministre de l'Economie François Baroin
publie un livre qui commence déjà à faire du bruit. Journal de crise, c'est son nom, est
un carnet de bord embarqué dans les couloirs de Bercy. Le récit
de son passage au Budget et aux Finances, de mars 2010 à mai 2012, au
cœur de la crise de la zone euro. Et il y parle notamment d'une
mystérieuse réunion.
Pas de traces, pas de documents ! La réunion était
totalement secrète... À tel point que François Baroin reconnaît lui-même qu'il ne prenait
aucune note.
D'après l'article de BFM TV, l'ancien ministre laisse imaginer
la scène. Nous sommes en novembre de l'année dernière,
trois personnes de confiance assises dans son bureau. Nom de code de la
rencontre, « Black Swan », en référence
au livre qui a théorisé la puissance des événements
imprévisibles. Interdiction aux participants de mentionner ne
serait-ce que l'existence de ce rendez-vous, même à ses proches.
Mais qu'ont-ils de si dangereux à cacher ? Réponse de
François Baroin, « l'hypothèse
la plus sombre de notre histoire économique moderne »,
à savoir le scénario d'un éclatement de la zone euro :
sortie de la Grèce de la monnaie unique et effet domino sur
l'économie française. C'est la première fois qu'un
responsable politique français admet avoir travaillé sur cette
hypothèse.
Voilà qui est de nature à rassurer les plus
« pessimistes » d'entre nous. Nous n'avons pas
rêvé. Il y a bien un problème majeur et effectivement, il
est important de se préparer. Mais il ne faut pas vous
inquiéter. Le pire de la crise est derrière nous.
Notre Président François Hollande nous l'a bien dit.
Cela dit, cette information m'inspire plusieurs remarques.
Ce qui est extraordinaire, c'est la capacité de nos dirigeants
à déclarer publiquement certaines choses, et à faire en
secret l'inverse. C'est justement pour cela qu'il faut ne faire preuve
d'aucune naïveté, d'où la nécessité
impérative de conserver en toutes circonstances un esprit critique
affûté en regardant avec une lucidité absolue les faits.
Or, les faits, si on les regarde aujourd'hui, nous montrent clairement
que rien, strictement rien n'a changé depuis 2011, à part des
promesses de dons de pays totalement surendettés dans un
mécanisme européen pour tenter de sauver des pays
carrément en faillite. Sinon rien. N'oubliez pas, comme le dit l'adage
populaire, que les « promesses n'engagent que ceux qui y
croient ».
La deuxième remarque, c'est pourquoi François Baroin parle-t-il de ce sujet aujourd'hui ? C'est un
homme intelligent qui a une parfaite connaissance et maîtrise de ce
qu'est le concept de secret d'état et/ou de confidentialité ou
de « réserve ». C'est donc une démarche
parfaitement consciente de sa part.
Penser qu'il s'agit simplement de faire un
« coup » d'édition me semble un peu court comme
explication, de la part d'un homme dont la famille et la vie ont toujours
été dédiées au service de l'État. Monsieur
Baroin n'a pas besoin de
« vendre » quelques milliers de livres en plus ou en
moins. Alors pourquoi ?
On peut dès lors imaginer que ce type d'ouvrage et de
déclarations permettent tout simplement de banaliser l'idée
même d'éclatement de la zone euro. Le président de la
République, lui, parle d'une Europe à plusieurs vitesses.
Globalement, l'idée reste la même.
Enfin, pour ceux qui ne l'ont pas lu, le livre de Nassim Nicholas
Taleb Le cygne noir : La puissance de
l'imprévisible est particulièrement remarquable et sa
lecture indispensable pour bien comprendre qu'en réalité, ce
sont les événements imprévisibles et hautement
improbables qui façonnent le monde et nos vies.
Les prévisions à base de moyennes sont
systématiquement démenties par les faits. Mais les moyennes
restent le seul outil pourtant utilisé pour fonder nos
décisions.
L'explosion de l'euro est le « Cygne noir » par
excellence. Une chose qui ne devrait pas arriver. Mais qui pourtant se
produit. Le simple fait que cela soit officiellement envisagé par nos
plus hautes autorités et qui plus est désigné comme
étant un Cygne Noir est un... signe qu'il ne faut pas ignorer.
Pendant ce temps, outre-Rhin, nos « amis »
allemands commencent à s'agacer prodigieusement de notre non-vision
politique et économique.
L'Allemagne
s'inquiète pour l'économie de la France
C'est un excellent article du Figaro
du jeudi 1er novembre qui résume parfaitement la situation.
Le Figaro revient longuement sur la
« Une » du grand quotidien populaire allemand Bild, qui pose
la question qui fâche : la France est-elle en train devenir la nouvelle
Grèce ?
« Officiellement, les relations sont au mieux. Mais en
coulisses, conseillers et anciens dirigeants critiquent les décisions
économiques de Paris.
Une fois encore, c'est le grand quotidien populaire Bild, qui saute dans le plat à
pieds joints. "La France est-elle en train de devenir la nouvelle
Grèce ?", s'interroge le journal. La question provocatrice
lancée comme un signal d'alarme est volontairement outrancière.
Cependant, elle traduit le malaise réel des élites allemandes
et du gouvernement d'Angela Merkel à
l'égard de leur grand voisin : la France est devenue un sujet
d'inquiétude en Allemagne. S'exprimant lors d'une conférence
organisée par l'institut sur l'avenir de l'Europe – fondé
par le milliardaire Nicolas Berggruen – l'ancien
chancelier social-démocrate, Gerhard Schröder, n'a pas
mâché ses mots. Il a taclé ses camarades socialistes
français, comparant la France d'aujourd'hui à l'Allemagne de
2003, alors considérée comme "l'homme malade de
l'Europe". Schröder l'avait sortie de l'ornière grâce
à sa cure de réformes libérales, "l'Agenda 2010".
"Les promesses de campagne du président français
finiront par se fracasser sur le mur des réalités
économiques, a-t-il prévenu. Si le refinancement de sa dette
devient plus difficile ce sera le début des vrais problèmes
pour la France". Ainsi, pour Schröder l'avancement de l'âge
de la retraite est "simplement le mauvais signal", "pas
finançable". La pression fiscale aura pour effet, selon lui, non
seulement de provoquer une fuite des capitaux, mais conduira à un
effondrement du financement des emplois en France. "Deux ou trois
mauvais signaux et nos amis français seront rattrapés par les
réalités", lance Schröder à ses camarades
à Paris.
Bild enfonce le
clou en citant "25 % de chômage des jeunes", "5 % de
déficit budgétaire", "zéro croissance",
"climat des affaires au plus bas depuis trois ans", sans oublier la
"crise lourde de l'industrie automobile"… "La France se
finance encore dans de bonnes conditions sur les marchés, mais les chiffres
de son économie rappellent les États du Sud en crise." Et
le journal de lancer un appel à Hollande pour "mener enfin des
réformes courageuses". Pour Bild, il s'agit d'éviter
que la "Grande Nation ne devienne aussi pauvre que les Grecs
fauchés".
"Alice au pays des merveilles"
L'ancien chancelier a lancé de vive voix les inquiétudes
que le gouvernement Merkel n'ose formuler
publiquement. À la Chancellerie et dans les grands ministères
à Berlin, l'invitation à commenter officiellement la situation
en France se heurte systématiquement à un refus teinté
d'un rictus angoissé. Mais en privé, quelques langues se
délient. "Bild
est dans l'exagération, tempère un responsable placé au
cœur du pouvoir berlinois. La France, ce n'est ni la Grèce, ni
l'Espagne, ni l'Italie. Mais ce qui s'y passe est inquiétant. Hollande
donne une impression d'Alice au pays des merveilles. Idéologiquement,
il s'est isolé de ses voisins, qui mènent des réformes
structurelles courageuses. Mais il réalisera tôt ou tard que la
France ne peut échapper aux lois de la physique."
Les économistes allemands les plus écoutés par le
gouvernement sont unanimes. Le cocktail de hausses d'impôts et de trop
timides coupes dans les dépenses de l'État étouffera la
croissance en France et provoquera du chômage. "Ils nous disent
tous que seules les réformes structurelles et la discipline
budgétaire peuvent impacter positivement la croissance et
l'emploi", poursuit le responsable. Les recettes des économistes
allemands, pour créer un choc de compétitivité en France
: "baisser le coût du travail", "abolir les 35 heures",
"augmenter la flexibilité", "mettre fin aux avantages
des fonctionnaires trop privilégiés par rapport aux emplois
précaires", "réduire le poids de l'État dans
l'économie", "lever les barrières à la
concurrence", "baisse des impôts", "réforme
du système social, notamment les retraites".
Les responsables allemands soulignent les "extraordinaires atouts"
de la France. "Grâce à son fort taux de natalité,
elle n'a pas besoin de faire autant d'efforts que nous, qui sommes
frappés par la dépopulation, explique l'un d'entre eux. Cela
lui offre un bonus de croissance de l'ordre de 1 % par rapport à
l'Allemagne." Mais Berlin redoute surtout que la politique de Hollande
ne finisse par saper la dynamique des réformes structurelles et de la
discipline budgétaire en Europe. "S'il persiste dans ses choix
hasardeux, s'inquiète-t-on dans la capitale allemande, Hollande finira
par donner raison à ceux qui, en France et en Europe, affirment que
ces remèdes cassent la croissance et l'emploi. »
En clair, nos « amis » allemands sont furieux de
notre manque de courage et de vision. Ils ont raison. Cela n'est pas nouveau.
Nous aurions bien tord de blâmer
exclusivement François Hollande.
Nous sommes tous coupables collectivement et ce, depuis une bonne
trentaine d'années. Nous ne faisons rien. RIEN.
Toujours plus de dépenses.
Toujours plus d'impôts.
Toujours plus de décentralisation pour satisfaire les ambitions
(et le pouvoir d'achat) d'une classe politique régionale de plus en
plus pléthorique.
Toujours plus d'aides sociales pour tous. Le RSA, les CAF,
l'allocation de rentrée scolaire qu'il faut même augmenter de 25
% cette année !! Absurde.
Toujours aucune réforme de notre droit social ou du travail
dont les « codes » ne font que voir leur nombre de
pages s'élever d'année en année.
Toujours aucun effort sur les régimes spéciaux,
étrangement absents de tous les débats.
Nous sommes un peuple qui manque cruellement de courage. Nicolas
Sarkozy a perdu cinq ans à s'agiter pour pas grand-chose, sans
s'attaquer aux maux profonds qui rongent l'économie française.
Jacques Chirac, malgré toute la sympathie que je porte à
l'homme, fut un roi fainéant. Quant au règne de Tonton 14 (ans), seul subsiste de son œuvre
quelques somptueux bâtiments et... une monnaie unique qui
désormais prend l'eau de toute part.
Notre pays est, sous nos yeux, en train de s'enfoncer dans
l'abîme. Vous pouvez ne pas le voir, ou plutôt ne pas vouloir le
voir, mais la réalité va nous rattraper et très vite.
Préparez-vous. Le temps nous est désormais
compté. Nous sommes le principal de l'Europe. L'Espagne, l'Italie et
la Grèce ont toujours été et seront toujours des pays du
Sud.
La France pouvait se placer dans le peloton de tête et l'euro,
notre monnaie unique, est fondamentalement basée sur la convergence
des économies françaises et allemandes.
Nous ne rattraperons plus l'Allemagne. L'euro est donc mort.
1992-2013... ci-gît l'euro, monnaie unique.
Charles SANNAT
Directeur des Etudes Economiques Aucoffre.com
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