La nouvelle a été à peine
relayée dans les médias, elle est pourtant extrêmement significative :
la semaine dernière, la Fed a versé 89 milliards de dollars de bénéfices au
Trésor américain. Ce montant est supérieur de 18% aux reversements de l'année
précédente et efface le record de 2010, 79 milliards de dollars (le communiqué de la Fed).
Une remarque : l’entité
qui réalise le plus de bénéfices aux Etats-Unis n’est pas Apple, Exxon ou une
autre entreprise, c’est la banque centrale, preuve que l’économie marche sur
la tête !
Reprenons, ce reversement est
tout à fait normal : la Fed reverse au budget de l'Etat fédéral la
totalité de son bénéfice, diminué des frais de fonctionnement de son siège à
Washington et des dividendes versés aux douze banques de réserve régionales.
Ce qui l’est moins c’est la
source principale de ces bénéfices : les intérêts versés par l’Etat
fédéral pour les obligations que détient la Fed. Le système tourne en
rond : le Trésor émet des obligations, une grande partie d’entre elles
sont achetées par la Fed (c’est la monétisation, la planche à billets), puis
le Trésor verse les intérêts liés à ces obligations, que la Fed encaisse,
puis reverse au Trésor ! Précisons qu’une partie des recettes de la Fed
provient également de titres émis par Fannie Mae et Freddie Mac, eux-mêmes
aidés par l’Etat, donc on est encore en circuit fermé.
Autrement dit, la dette
acquise par la Fed ne coûte strictement rien à l’Etat, c’est comme s’il
empruntait à 0 %. La charge totale de la dette (les intérêts versés à
l’ensemble des créanciers) représentait 251 milliards de dollars en 2011, ces
89 milliards représentent donc plus d’un tiers d’économie.
Ce mécanisme est extrêmement
pervers car plus la dette publique est acquise par la banque centrale, moins
elle pèse sur le budget de l’Etat. Ce qui l’encourage à s’endetter encore
plus, et à se faire financer par la banque centrale, c'est-à-dire la planche
à billets. Et il se rajoute un autre effet pervers : les achats de la
Fed font baisser les taux d’intérêts de l’ensemble des obligations,
c'est-à-dire aussi de celles qui ne sont pas détenues par la Fed mais par des
investisseurs, américains et étrangers. Au final, la dette de l’Etat fédéral
lui coûte nettement moins cher qu’elle ne le devrait.
Ceci n’est rien d’autre qu’une
bulle gigantesque dont la seule porte de sortie, hormis un retour à l’équilibre
budgétaire, est l’hyperinflation.
Il faut évaluer les
discussions sur la réduction du déficit budgétaire à la lumière de cette
réalité. En fait, le financement du déficit et de la dette, une fois inclut
le reversement de la Fed, ne coûte pas si cher que ça. Alors pourquoi se
fatiguer à couper dans les dépenses ?