|
Hier le gouvernement nous expliquait qu’il fallait
travailler moins pour partager les emplois ; aujourd’hui, il se rend
compte qu’il faut travailler plus pour créer de la richesse.
Hier le gouvernement nous expliquait que les personnes plus
âgées devaient laisser la place aux jeunes actifs,
subventionnant les départs anticipés en retraite ;
aujourd’hui, il voudrait imposer des quotas d’embauche pour les
séniors. Hier le gouvernement voulait limiter l’installation des
grandes surfaces ; aujourd’hui, il voudrait inciter
l’installation des grandes surfaces. Poussé par les lobbies
écologistes, le gouvernement a fait passer des quotas pour
développer l’utilisation des biocarburants dans la foulée
des accords de Kyoto, quotas qui sont désormais inscrits dans les
traités européens (le paquet Climat-Energie). Aujourd’hui,
les mêmes sont réticents à produire de
l’énergie à partir de denrées agricoles alors que,
sur la planète, des populations entières souffrent de la faim.
Et je n'ose évoquer le rapport Teulade remis
à Mr Jospin, alors premier ministre, qui prévoyait le retour du
plein-emploi en France dans un délai imminent, rendant inutile - selon
les experts officiellement désignés par le gouvernement de
l'époque - toute réforme du système de retraite par
répartition...
On pourrait multiplier à
l’infini les égarements de cet Etat interventionniste qui
prétend réguler l’économie alors que ses
représentants n’ont jamais une vision exacte des processus
économiques, pensant corriger une erreur en faisant une nouvelle
erreur.
Bien-sûr, les personnalités qui composent les gouvernements
changent par le jeu démocratique. Mais c’est
précisément là le risque de politiser
l’économie : ceux qui sont au pouvoir n’ont pas de
mémoire et sont poussés à flatter une « opinion
publique » qui n’a pas de cervelle. Puis chacun se renvoie
ensuite la faute. Il
aurait mieux valu ne pas intervenir du tout plutôt que croire
qu’une intervention supplémentaire peut corriger les effets
destructeurs déclenchés par l’intervention passée.
Imaginez qu’une loi neutralise un marché X.
Constatant la pénurie du produit X, le gouvernement impose un rationnement
de la consommation tandis qu’il oblige les entreprises à
accroitre leur capacité de production. Quelques années plus
tard, c’est la surproduction qui éclate. Alors le gouvernement
se mobilise pour relancer les consommateurs tandis qu’il impose des quotas
aux entreprises pour limiter leur production. C'est ce qui se passe dans
l'éducation, dans la santé, le logement, l'agriculture, le
marché du travail, partout où l'Etat a considéré
qu'il pouvait mieux faire que le marché.
Pourtant, pour peu qu’on laisse l’économie
déployer ses effets mécaniques et nécessaires, les
corrections et ajustements se produiront par eux-mêmes, sans que le
gouvernement soit dans l’obligation de décréter quoi que
ce soit. La meilleure police des prix, c’est le jeu naturel de la concurrence.
Et les meilleures informations qui permettent aux consommateurs et aux
producteurs de prendre leurs décisions dans un processus complexe qui
organise des interactions mutuelles à l’insu de tous, ce sont
les signaux envoyés par des mouvements de prix libres.
La concurrence ne se décrète pas. Les
philosophes des Lumières considéraient qu’il était
nécessaire de protéger la démocratie
d’elle-même, la quête de la majorité pouvant
déboucher sur des programmes politiques toujours plus
démagogiques. Et ces programmes conduisent toujours à une
extension infinie de l’Etat-Providence laquelle constitue une
caricature, sinon une négation, de l’Etat de droit. Il faudrait
inscrire dans la Constitution un principe de précaution qui dirait en
substance : « quand on
ne connait pas tous les effets de l’intervention de l’Etat dans
l’économie, alors le gouvernement doit s’abstenir
d’intervenir ».
|
|