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Pendant que le
monde avait les yeux tournés vers la mort de Michael Jackson, s'est
jouée, presque discrètement, au congrès des USA, une
partie importante pour l'avenir des économies mondiales,
déjà bien mises à mal par la crise financière.
La loi Waxman-Markey, du nom de ses deux promoteurs (démocrates),
également intitulée "American Clean Energy and Security
Act of 2009" vient
d'être votée ce vendredi à une très courte
majorité à la chambre (219 pour, 212 contre,
majorité à 218...), et seule une défaite au sénat
pourrait empêcher un prochain désastre.
Une loi anti-carbone majeure
La loi en question a pour but de lutter contre "le changement
climatique", suivant en cela la ligne des Climato-alarmistes. Passons
sur la mise en place d'un schéma de réduction des
émissions carbonées par système de taxation par quotas
d'émissions échangeables (cap and trade), qui prévoit
d'abaisser de 80% (!) la consommation d'énergies fossiles d'ici 2050.
C'est scientifiquement stupide (je ne détaillerai pas une nouvelle fois
ici les raisons scientifiques de mon scepticisme climato-carbonique
longuement exposées par ailleurs, ici,
ici, ici, ici, et là), et assez rapidement, avant
une dizaine d'années, les américains reviendront à la
raison. Certes, l'économie américaine n'a sûrement pas
besoin d'un tel fardeau supplémentaire en ce moment, mais au point ou
ils en sont, ça en plus ou en moins...
La loi comporte de nombreuses provisions visant à promouvoir les
énergies vertes et les produits à "faible empreinte
carbonique". Gaspillages certains, mais là n'est pas le pire,
à ce niveau, cela reste une affaire intérieure aux USA.
Mais il est une des provisions de la loi qui est porteuse de désordres
économiques mondiaux graves à court et moyen terme.
L'hydre protectionniste est de retour
Sauf amendement de dernière minute, il semble bien que la loi impose,
sans voie de recours, au président et à son administration de
mettre en place des barrières douanières aux
importations des pays qui failliraient à leur "devoir de
réduction des émissions de CO2". Soyons clairs, ce sont la
Chine et l'Inde qui sont visées. A ce propos, on s'étonnera du
silence de tous ceux qui dénonçaient
"l'impérialisme américain" quand le président
s'appelait Bush. Car il s'agit d'une loi déterminerait les droits de
douane envers certains pays en fonction des choix politiques qui y seraient
faits. J'ignore s'il y a des précédents, mais cela ressemble
fort à du chantage envers des états souverains.
Bref, au nom
d'une menace fictive née d'une démarche de politisation de la
science dont il faudra bien qu'un jour la justice se demande "à
qui cela profite", le congrès est en train de refaire, au milieu
d'une crise financière grave, le coup de la loi ultra protectionniste
dite Smoot-Hawley.
Cette dernière, entrée en discussion mi 1929 et
définitivement votée en juin 1930 malgré l'opposition de
plus de 1000 économistes les plus prestigieux de l'époque,
avait imposé des droits de douane sur 20 000 produits importés,
conduisant les partenaires commerciaux des USA à des
représailles de même nature, ce qui avait fait chuter le
commerce mondial de plus de 66%, contribuant grandement à transformer
la crise financière de 1929 en une dépression
généralisée durable.
Nombre de personnes croient de bonne foi que la concurrence des pays à
bas salaires supprime des emplois chez nous. Pour comprendre pourquoi la
fermeture des frontières au commerce est un deal perdant-perdant,
outre les anciens articles d'oblib tel que celui ci, je
vous suggère cette
parabole du Professeur Boudreaux, de la George Mason University, dont
voici un extrait :
How
is it that a typical worker today can easily afford a wide variety of goods
and services, the production of which requires the coordinated efforts of
millions of workers? The answer is that each of these workers is part of a
market so vast that it is worthwhile for many entrepreneurs and investors to
organize highly specialized production operations that are profitable only
because the market for their outputs is large. This specialization of labour and
production across different industries around the world is the phenomenon of
globalization.
Suppose, for example, that shirts can be made in one of two ways. The first
is by hand. It costs a shirt maker using this method—regardless of how
many shirts he produces—$250 to produce each shirt. Working full-time
producing shirts by hand, the shirt-maker can produce 10 shirts each month.
The second way to produce shirts is in a highly mechanized factory. If the
factory runs at a peak capacity of a million shirts monthly, each shirt costs
$5 to make. But because building and equipping the factory requires a huge
initial investment, operating the factory at less-than-full capacity causes
the cost of each shirt to rise. The reason for this increase is that producing
fewer shirts denies the shirt-maker the opportunity to spread the investment
cost over maximum output. The smaller the factory’s output, the higher
the cost of each shirt.
Which method of production would a shirt-maker use? The answer depends on the
size of his market. If a shirt-maker expected to serve a market of millions
of people, he would use the factory method. But if he expected to serve a
market of only a few dozen potential customers, he would produce shirts by
hand. If each shirt-maker had access only to small markets, the price of
shirts would be higher than it would if shirt-makers had access to larger
markets. This example provides one important justification for free trade: by
expanding markets beyond political boundaries, firms can take better
advantage of what economists call “economies of scale” and allow
consumers to enjoy lower prices.
Ceux qui croient que ce qui n'est plus importé sera
intégralement remplacé par de la production locale se trompent
lourdement: en augmentant le prix des marchandises accessibles aux
particuliers, faute de concurrence internationale et d'intérêt
à rechercher les modes de production les plus efficaces, le
protectionniste réduit grandement le nombre de transactions
effectivement réalisables, faute d'argent. Le résultat du
protectionnisme est donc une contraction nette des économies. Inutile
de dire que dans le contexte actuel, cela tient du suicide économique.
Si le Waxman
Markey Bill passe le cap du sénat, alors le futur s'annonce
dramatique. Aux dernières nouvelles, le vote serait très
serré, comme à la chambre.
(Nb
dernière minute : Il semblerait que la version définitive du
Bill (1200 pages que je n'ai pas eu le courage de lire en entier) ne
prévoie une entrée en vigueur qu'en 2012 - espérons que
d'ici là, entre l'OMC et la montée du scepticisme, son volet
protectionniste soit éliminé)
A qui profite
l'horreur économique ?
Toute cette
agitation autour du climat fait la fortune de quelques opportunistes qui
surfent sur la vague verte, et le système de "cap and trade"
bénéficiera entre autres directement à un certain Al
Gore, déjà
présenté sous son vrai jour ici, fondateur d'un Hedge
Fund dénommé General Investment Management LLP, et entre autres
partie prenante de la principale bourse d'échange de tonnes de
carbones, sise à Chicago, et également actionnaire important de
fonds d'investissements plus diversifiés mais également
présents dans le "vert", comme Capricorne,
présidé par le producteur de son film, un certain Jeffrey
Skoll, ou encore Kleiner-Perkins. Toutes ces fonds possèdent des parts
importantes dans des sociétés qui seront, à titres
divers, supposées bénéficier des subventions vertes
induites par les différentes lois écologistes votés par
le congrès et les états locaux. Le principal réseau
d'investissement vert, l'INCR, déjà évoqué ici,
dont les membres pèsent plus de 7 000 milliards de $ de bilan (3 fois
notre PIB) peut également se frotter les mains si la loi passe telle
quelle.
Al Gore a
été interrogé par le congrès, dans le cadre des
discussions préliminaires sur le Waxman Markey bill, le 24 avril
2009. La représentante républicaine Marsha Blackburn lui
a posé des questions portant sur ses intérêts dans
des entreprises qui allaient manifestement profiter de la nouvelle
législation cap and trade. Il a répondu très
succinctement et évasivement sur ses affaires, concédant juste
qu’il était associé de Kleiner Perkins. La
transcription de son audition comporte la réponse suivante:
“chaque penny que j’ai gagné, je l’ai mis
directement dans une association sans but lucratif, Alliance for Climate
Protection". Pure Tartufferie, comme l'attestent ses lourds
investissements dans Capricorne, Kleiner Perkins (un fond qui a investi 1 Milliard dans diverses
industries vertes qui seront directement bénéficiaires du
Waxman-Markey bill) et GIM, qui n'ont rien de philantropique.
Je n'ai rien
contre les gens qui investissent dans ce qu'ils croient, mais lorsqu'ils font
financer leurs aventures par le contribuable, faussent la concurrence en se
faisant voter des lois sur mesure, tout en adoptant un style de vie de
milliardaire qui tranche avec leurs appels à la frugalité pour
le reste du monde, et ce en mentant effrontément à leur
congrès... Très clairement, nous sommes en présence
d'une escroquerie. Vers un Carbon Gate ? Un Gore Gate ? D'ici à ce que
mon poisson d'avril 2008 devienne
réalité...
Vague de bon sens
sur le monde
Pendant que le
congrès américain plonge vers l'horreur protectionniste, dans
le monde entier, le scepticisme carbonique gagne du terrain. Selon cet
article du Wall Street Journal, une vague de bon sens est en
train de submerger nombre de nations, et le nombre de voix qui
n'hésitent plus à qualifier les théories du GIEC
d'élucubrations sans fondement ou d'escroquerie s'accroit dans de notables
proportions.
L'Australie et la
Nouvelle Zélande viennent d'annuler les lois "anti-carbone"
qu'elles avaient promulgué. Les académies des sciences de
Pologne et du Japon viennent de publier des documents prenant ouvertement
position contre les thèses réchauffistes, qualifiées en
termes très durs.
En Australie, un
livre d'un scientifique réputé, Ian Pilmer, qui démonte
les thèses du réchauffement avec rigueur en est a sa
cinquième réédition, au point que même des
"réchauffistes" australiens en viennent à exprimer
des doutes sur leurs croyances initiales. Les sondages d'opinion montrent une
chute du soutien populaire à la thèse du réchauffement
d'origine carbo-humaine. La même tendance est observable un peu
partout, le point culminant du scepticisme étant observable en
République Tchèque, ou la croyance réchauffiste ne
recueillerait plus que 11% d'adhésion.
Même aux
USA, plus de 700 scientifiques de haut niveau ont, à l'instigation du
sénateur républicain James Inhofe, témoigné
devant le congrès des insuffisances des théories du GIEC. La
controverse sur le climat est vivace dans la presse, et la très faible
majorité obtenue par Waxman-Markey à la chambre montre que la
thèse du réchauffement anthropogénique n'est pas
à l'abri d'un discrédit croissant.
Et en France ?
Malheureusement,
chez nous, la frontière, qui avait arrêté, on s'en
souvient, le nuage de Tchernobyl, semble aussi peu perméable à
cette montée du réalisme.
Malgré le
fait qu'aucune des prévisions du GIEC pour la première
décennie ne se soient réalisées, qu'aucun des
modèles du GIEC n'avait anticipé la tendance au léger
refroidissement observable depuis 2002, que toutes les prévisions
apocalyptiques concernant le niveau des mers ou la disparition des ours aient
été balayées par l'observation de la
réalité, nos ministres Borloo et sa cour (Nathalie
Kosciuzko Morizet en tête) ont imaginé un "Grenelle de
l'Environnement" dont les dégâts sur notre économie
(un exemple)
s'annoncent considérables, tout en lançant des attaques ab
hominem contre ceux qui osaient remettre en cause le dogme
réchauffiste.
Notre
président lui même vient d'affirmer que l'investissement dans
les énergies et les industries à "faible empreinte"
carbonique était l'avenir, et s'apprête à y jeter des
milliards qu'il espère que les français lui
prêteront pour ce faire. Il nous annonce
déjà une taxe "carbone" pour remplacer la taxe
professionnelle, qui ne fera que s'ajouter aux taxes sur les factures EDF
pour financer l'achat à perte d'énergie éolienne et
solaire, sans oublier notre TIPP, déjà la plus chère du
monde.
Ce n'est pas aux
USA que nous devons chercher l'inspiration de nos politiques en la
matière, mais en Australie ou en Nouvelle-Zélande. Il faut
d'urgence réexaminer toutes les lois votées au nom de la lutte
contre le réchauffement, les abroger, et surtout virer pour
incompétence notoire tous ceux qui ont poussé pour que ces lois
soient appliquées. Exit Borloo ! Dehors NKM ! Un tel exemple d'ineptie
politique ne peut rester sans sanction.
Conclusion
Pour
éviter une prétendue catastrophe climatique qui tient plus du
fantasme que de la prévision scientifique dans 50 ou 100 ans, la
majorité démocrate du congrès, oubliant toutes les
leçons du passé, est prête à déclencher une
catastrophe économique certaine dès les années à
venir, le tout sous l'impulsion d'une clique intéressée
qui a fabriqué de toute pièces une crise médiatique
à partir de données scientifiques tout à fait
discutables.
Cette escroquerie
détruira des millions d'emplois dans le monde, risque de provoquer des
crises géopolitiques graves (les peuples
désespérés économiquement ont parfois des
réactions imprévisibles), sans doute de graves tensions
diplomatiques, sur fond de guerres dont on espère qu'elles ne
resteront que commerciales.
Le tout en pleine
crise financière majeure. Tout ça pour moins de 1°C de
différence en 2100.
Je ne suis pas un
fan des théories du complot, mais tout de même, une telle
concommitance de "décisions malheureuses" ne laisse de
m'interroger sur les vraies motivations de ceux qui tirent les ficelles de ce
genre de décision. L'argent ? Certes, mais qu'y aurait il de plus
idiot que de vouloir être riche dans une économie en perdition ?
Alors quoi ?
Il ne reste plus
qu'à espérer que le Sénat Américain soit sensible
au retournement d'opinion en train de s'opérer, et nous enlève
dans les jours qui viennent une bonne raison de s'inquiéter.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France, "Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement
à l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il
ose proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
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