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Cours Or & Argent

Une crise de l’énergie dès 2016 ?

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oilprice.com
Publié le 15 février 2016
1667 mots - Temps de lecture : 4 - 6 minutes
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Rubrique : Editoriaux

La faiblesse actuelle du cours du pétrole pourrait générer des pénuries dès cette année. A l’heure actuelle, l’offre n’est supérieure à la demande qu’à hauteur de 2%, et le prix du carburant est de moins de 2 dollars le gallon au Texas. Si l’offre déclinait davantage, le prix du carburant pourrait doubler sous dix-huit mois. Pour une marchandise aussi critique pour notre mode de vie que le pétrole, tout ce qu’il faudra pour faire grimper les prix sera une pénurie relativement limitée.

En 2014, le jour de Thanksgiving, l’Arabie Saoudite a pris la décision de maintenir sa production de pétrole brut autour de 9,5 millions de barils par jour. Elle a pris cette décision malgré une surabondance estimée à 1,5 million de barils par jour sur les marchés globaux, et malgré les dommages infligés à beaucoup d’autres pays de l’OPEP. Vous savez désormais que sa décision a entraîné un déclin sévère du cours du pétrole à l’échelle globale, et qu’un nuage noir s’est depuis formé au-dessus du secteur de l’énergie. Mais selon moi, ce ne sera là qu’un déclin de court terme pour la longue histoire des cycles pétroliers. Le cours du pétrole a toujours pu rebondir, et le déclin actuel ne sera pas une exception.

Pour remettre les choses dans leur contexte, le monde consomme actuellement 93,5 millions de barils d’énergie liquide par jour, dont tous ne proviennent pas nécessairement de l’industrie du pétrole brut. Environ 17% de l’offre globale en énergie est satisfaite par les liquides de gaz naturel et les biocarburants.

L’un des aspects qui influence l’idée des baissiers selon laquelle le prix du pétrole baissera tout au long de la première moitié de 2016 est que la demande a tendance à décliner au cours des six premiers mois de chaque année. Puisqu’une majorité de la population vit dans l’hémisphère nord, la météorologie a un impact important sur la demande. Je suis d’accord sur le fait que cet aspect jouera un rôle dans le maintien du cours du pétrole à un niveau assez bas ces prochains mois. En revanche, la faiblesse du prix du carburant aux Etats-Unis jouera certainement un rôle dans la demande en énergie en périodes de vacances.

Le Brent fluctue aujourd’hui autour de 60 dollars le baril. De mon humble avis, c’est un peu plus bas que ce à quoi s’attendait l’Arabie Saoudite, et pourrait la pousser à organiser une « réunion d’urgence » des pays de l’OPEP au premier trimestre. Mais pour l’heure, je pense que l’Arabie Saoudite est encline à laisser les autres membres de l’OPEP souffrir jusqu’à la prochaine réunion prévue en juin.

Une idée très commune est que l’Arabie Saoudite fait ce qu’elle fait pour mettre un terme à la rapide production de pétrole de schiste des Etats-Unis. D’autres pensent que son objectif est d’écraser les économies russe et iranienne. Si le prix du pétrole demeurait autour de son niveau actuel pour quelques mois supplémentaires, alors ces deux idées seront justifiées.

Mes modèles de prévision pour 2015 partent du principe que le prix du pétrole continuera de baisser tout au long du premier trimestre, avant de grimper graduellement puis accélérer à l’approche de l’hiver. Avant le mois de décembre, nous devrions voir un marché pétrolier bien plus restreint et des prix significativement plus élevés. Dans un article publié dans The National le 24 décembre 2014, Steven Kopits, directeur en chef de Princeton Energy Advisors, a expliqué qu’en « autorisant un prix du pétrole très faible, les Saoudiens cherchent à rétablir un équilibre sur le marché. A l’heure actuelle, mon estimation d’équilibre se situe entre 85 et 100 dollars le baril pour le Brent ».

Mark Mobius, économiste et invité régulier de Bloomberg TV, a récemment déclaré qu’il s’attend personnellement à un prix de 90 dollars le baril pour la fin 2015.

Depuis 2005, l’Amérique du Nord a été la seule à ajouter des stocks significatifs à l’offre. En dehors du Canada et des Etats-Unis (et du Golfe du Mexique), la production du reste du monde a enregistré un déclin net d’un million de barils par jour entre décembre 2010 et décembre 2013. Plus de la moitié des nations de l’OPEP ont aujourd’hui une production en déclin. Nous avons ces dix dernières années été en mesure de complémenter nos réserves d’énergie grâce aux biocarburants, mais leur apport reste limité parce que nous avons besoin des terres agricoles pour la production de denrées alimentaires.

Selon moi, la faiblesse actuelle du prix du pétrole pourrait être excessive et donner lieu à une nouvelle crise de l’énergie dès le début de l’année 2016. La faiblesse du prix du carburant ne durera pas.

Les sociétés pétrolières américaines sur lesquelles je garde un œil ont toutes annoncé une réduction de 20 à 50% de leurs dépenses de capital pour l’année 2015. Nous commençons à en percevoir les impacts sur l’offre, alors même que la hausse annuelle de la demande se développe. Toutes les sociétés de mon portefeuille modèle devraient rapporter une hausse de production sur un an, mais à un rythme bien moindre que ces dernières années.

Une étude publiée par Crédit Suisse il y a deux semaines montre que les indépendants américains s’attendent à un déclin d’un tiers des dépenses de capital contre un gain de production de 10% pour l’année prochaine. Cela signifierait une croissance de la production de 600.000 barils par jour de liquides de schiste, et peut-être 200.000 barils par jours issus des projets en eaux profondes du Golfe du Mexique. Dans le même temps, la production conventionnelle domestique des Etats-Unis continue de plonger. J’ai pu lire des estimations de déclin de 500.000 à 700.000 barils par jour sous douze mois. Si ces prévisions étaient correctes, la croissance de la production pétrolière des Etats-Unis serait à peine positive l’année prochaine, et devrait entrer en déclin en 2016.

Les sources d’énergie non-conventionnelles (sables bitumeux, schiste et autres formations) de l’Amérique du Nord ont représenté la quasi-totalité de la croissance de production nette globale enregistrée depuis 2005. Si la production non-conventionnelle cessait de croître et que la production conventionnelle déclinait, l’offre se trouverait hautement compromise dès 2016. Au prix actuel, seuls le pétrole de schiste américain et les sables bitumeux canadiens génèrent suffisamment de rendements financiers pour justifier des dépenses de développement. L’exploration en eaux profondes ralentit à l’échelle globale.

Si la croissance de la demande prenait fin, cela ne représenterait pas un aussi gros problème. Mais elle augmente d’année en année. Elle a même augmenté pendant la Grande récession de 2008, ainsi qu’en 2009 et 2010 malgré une faible croissance économique globale. La faiblesse des prix de l’énergie continue de faire grimper la demande aujourd’hui, et avec une estimation de croissance du PIB américain de 5% pour 2015, nous pourrions voir la demande en énergies fossiles grimper de près d’1,5 million de barils par jour cette année. L’AIE s’attend actuellement à une hausse de la demande de 900.000 barils par jour.

Dans un tel scénario, les marchés pétroliers enregistreraient un resserrement important pendant la première moitié de 2016.

La dernière fois que le prix du pétrole est resté très bas sur une longue période, c’était entre 1985 et 1990. En 1985, alors que le pétrole s’effondrait pour des raisons similaire à celles que nous voyons aujourd’hui, le monde disposait d’une capacité non-utilisée de 13 millions de barils par jour, dont 7 millions en Arabie Saoudite. L’OPEP était en position d’absorber une hausse significative de la demande.

Aujourd’hui, l’Arabie Saoudite représente la totalité de la capacité non-utilisée, qui représente une estimation de 2 millions de barils par jour. Lou Powers, membre de l’EPG et auteur de The World Energy Dilemma, est d’avis que l’Arabie Saoudite aura des difficultés à maintenir sa production à plus de 10 millions de barils par jour sur une longue période. Si nous venions à enregistrer une pénurie de pétrole, l’Arabie Saoudite pourrait avoir besoin de porter son niveau de production à son maximum tout au long de 2016. Si cela se produisait, nous entrerions une fois de plus en période de choc pétrolier, et le prix du pétrole passerait bien au-dessus des 100 dollars le baril.

La faiblesse du prix du pétrole portera atteinte aux sociétés pétrolières non-couvertes, mais aussi au secteur des services sur les champs pétroliers. Je m’attends à ce que le nombre de puits en activité plonge de 30% d’ici la mi-2015. Le prix du pétrole aura besoin de se renforcer quelques mois avant que les sociétés n’osent dépenser davantage. Ceci étant dit, les sociétés de forage de haute qualité telles qu’Helmerich & Payne (HP), Patterson-UTI Energy (PTEN) et Precision Drilling Corp (PDS) s’en tireront bien, puisque leurs puits les plus importants poursuivront leurs activités dans le cadre de contrats de long terme. En 2016, elles auront augmenté leur part de marché.

L’Amérique du Nord et les eaux profondes représentent les seuls potentiels de hausse de la production. Si le prix du brut passait sous les 60 dollars le baril ne serait-ce que pour six mois, les retombées pourraient en être catastrophiques pour les producteurs qui n’appartiennent pas à l’OPEP. Viendra un jour où une action de l’OPEP deviendra nécessaire.

« Mais peut-être pas de la part des Saoudiens. La position de la Russie est comparable à celle de l’Arabie Saoudite. Les deux pays sont en mesure de réduire significativement leur production, mais les Russes ont le plus besoin de revenus. L’Arabie Saoudite aurait raison de dire que les demandes de réduction de production devraient être transférées à Moscou. L’OPEP pourrait réduire sa production pour soutenir les prix et faire grimper ses revenus. Mais pour le moment, la meilleure stratégie (pour l’Arabie Saoudite) est d’attendre, malgré les critiques, et de laisser se jouer les évènements. Si les Russes ont l’esprit clair, ils réduiront les premiers » - Steven Kopits, directeur en chef de Princeton Energy Advisors.

La bonne nouvelle pour nous, c’est que l’Iran puisse décider de mettre fin à son programme d’enrichissement nucléaire d’ici quelques mois. Je suis persuadé que c’est là la raison qui explique véritablement les actions de l’Arabie Saoudite.

 

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