Bien qu’il n’y ait rien de
nouveau, ayant moi-même, comme beaucoup d’autres, abordé
le sujet à de très nombreuses reprises, et comme ce fut le cas
également dans un documentaire formidable réalisé par
Max Keiser, l’article ci-dessous demeure important pour deux raisons.
Premièrement, il présente
de manière claire la panique sur l’or de 1999 et ce que
j’appellerai le Bottom de Brown ou, si vous
préférez, le record à la baisse atteint par le prix de
l’or après l’injection par le gouvernement Britannique de
400 tonnes d’or à des prix très bas sur le marché.
Cette vente aurait apparemment
été mise en place afin de sauver une ou deux banques bullion s’étant retrouvées à
découvert d’or suite à de mauvaises opérations de
portage.
Deuxièmement, il présente
une excellente description des opérations de portage sur l’or.
Lorsque de l’or est prêté par une banque centrale, une
banque bullion se l’approprie, le vend sur le
marché et investit la somme ainsi obtenue. A la fin de la
période de prêt, la banque bullion
rachète l’or dû à la banque centrale sur le
marché et le lui retourne.
Tout au long de ce processus,
l’or ne change jamais de lieu, bien qu’il il change de
propriétaire – ces changements de titre n’étant pas
toujours clairement indiqués sur les bilans publics.
Bien que l’auteur ne le mentionne
pas, certains pensent que les ventes de l’or de la banque centrale lors
d’enchères privées auraient en réalité
consisté en des transactions papier entre la banque centrale et les
banques bullion qui lui avaient emprunté du
métal et s’étaient trouvées dans
l’impossibilité de le lui retourner sans entraîner de
distorsion de prix sur le marché mondial.
Il aurait été juste de
lever rapidement le voile sur cette affaire, l’or vendu par le
gouvernement représentant l’héritage national de ses
citoyens.
En plus de cela, bien qu’il
n’en soit pas fait mention dans l’article, la vente d’or
organisée par le gouvernement Britannique en vue de sauver des banques
privées n’est impopulaire que du fait de la manière dont
elle a été conduite. Beaucoup pensent que les bilans de
nombreuses autres banques centrales Européennes feraient état
de la présence de certaines quantités d’or qu’elles
ne possèderaient en réalité plus, du fait de leur
habitude pernicieuse de prêter leur or à prix réduit
à d’autres banques. Leur or finit généralement par
être vendu sur le marché pour ne jamais revenir, et ne laisser
derrière lui qu’un amas de promesses papier.
Pour terminer, le problème le
plus incurable auquel font aujourd’hui face les banques bullion est que plus aucune banque centrale ne
possède d’argent à leur prêter. Elles se sont donc
lancées dans un jeu dangereux, qui revient à voler Peter pour
payer Paul, et passent le plus clair de leur temps à craindre que leur
combine soit exposée au grand jour et que les marchés ne
plongent dans le défaut une fois que le voile aura été
levé sur leurs positions à découvert.
Telegraph UK
Revealed: why
Gordon Brown sold Britain's
gold at a knock-down price
Thomas Pascoe
5 juillet 2012
Une
grande partie des stratégies économiques de Gordon Brown
paraissent certainement troublantes à toute personne quelque peu
sensée. Seules très peu de ses décisions ont
été gardées secrètes. Orgie de dépenses,
emprunts constants et proclamations de ‘fin des cycles
d’expansion et de ralentissement’ font désormais partie de
l’arsenal de tout politicien moderne, quel que soit le parti auquel il
appartient.
Cependant,
l’une des décisions de Brown apparaît comme étant
pour le moins étrange : la vente d’une très
importante partie des réserves d’or Britanniques à des
prix allant de 256 à 296 dollars l’once, le prix du métal
se situant aujourd’hui aux alentours de 1615 dollars.
Lorsque
Brown prit la décision de vendre 400 tonnes d’or entre 1999 et
2002, il prit simultanément deux autres décisions tout aussi
bizarres:
Premièrement,
il annonça la vente d’or très en avance, donnant au
marché un préavis quant au torrent d’or qui viendrait
bientôt l’inonder et en forcer le prix à la baisse. Il
semblerait qu’il en ait décidé ainsi afin de favoriser
une sorte de ‘politique de transparence’ – bien que comme
le veulent les règles de base de l’offre et de la demande, son
action ait fait chuter le prix de l’or jusqu’à atteindre
un record à la baisse sur vingt ans.
Deuxièmement,
l’or fut vendu aux enchères. Ici encore, Brown rompait avec le
modèle traditionnel. Le prix de l’or était habituellement
déterminé lors des fixings du matin et du soir par les
représentants de grosses banques dont les réseaux de clients,
formés de plus petites banques et de particuliers, les aidaient
à déterminer le prix exact de l’or qui permettrait de
faire concorder l’offre et la demande sur le marché.
Le
système d’enchère fit que l’or Britannique fut
vendu à un prix bien inférieur au prix déterminé
par le fixing. L’or vendu lors de la première enchère fut
vendu 10 centimes de moins par once que le prix déterminé par
le fixing du matin même. Cette première enchère
entraîna également un recul du prix de l’or de 4 dollars
par once lors du fixing de l’après-midi.
C’est
un peu comme si le Trésor avait tenté d’obtenir le prix
le plus faible possible pour l’or de sa propre nation.
Les plus importantes opérations
commerciales des années 1990 étaient les opérations de
portage et, tout particulièrement, les opérations de portage
sur l’or.
Une
banque pouvait ainsi emprunter de l’or auprès d’une autre
institution financière pour une période donnée.
Une
fois que l’or changeait de mains, la banque ayant obtenu
l’emprunt s’empressait de le vendre sur le marché au prix
fort avant de réinvestir la monnaie obtenue de cette vente sur
d’autres actifs capables de générer un rendement plus
important que l’or - dont le prix était à
l’époque relativement stable.
A
la fin de la période de prêt, la banque revendait ses
investissements et utilisait l’argent ainsi obtenu pour racheter
l’or originellement emprunté. Cet or était ensuite
retourné au créditeur et la banque ayant contracté
l’emprunt pouvait empocher la différence entre les deux prix.
Cette
tactique fonctionnait à merveille lorsque le prix de l’or
diminuait et que celui de l’autre actif – bien souvent des titres
protégés par le yen – augmentait. Lorsque l’inverse
se produisait, les banques faisaient face à de gros problèmes.
C’est ce
qu’il s’est passé à très grande
échelle dès le début de l’année 1999. Une
importante banque Américaine se serait retrouvée à
découvert de deux tonnes d’or, ce qui aurait
représenté une quantité d’or suffisante à
la remise en question de sa solvabilité si son prêt était
arrivé à échéance alors que le prix de l’or
était au plus haut.
Goldman Sachs, qui
n’aurait quant à elle pas enregistré de découvert
significatif sur cette période, aurait pris contact avec le
Trésor Britannique par le biais de son responsable de capitaux de
l’époque, Gavyn Davies - devenu plus
tard directeur de la BBC et mari de la secrétaire de Gordon Brown, Sue
Nye.
Face à un
éventuel effondrement du système bancaire, le chancelier prit
la décision de venir en aide aux banques en abandonnant l’or
Britannique, forçant ainsi le prix du métal à la baisse
afin de permettre aux banques à découvert de le racheter et de
tirer de ce rachat un profit conséquent, et de pouvoir remplir leurs
obligations en tant qu’emprunteurs.
J’ai pu discuter
l’an dernier avec Peter Hambro, PDG de Petroplavosk et personnage important du marché de
l’or de Londres et lui ai demandé ce qu’il pensait des
rumeurs citées ci-dessus.
‘Je pense que
monsieur Brown s’est trouvé dans une position très
délicate’, m’a-t-il répondu.
‘Il a fait face
à un problème qui était un problème mondial.
Certaines institutions financières se sont volontairement
retrouvées à court d’or au point de mettre en danger la
stabilité du système financier. Il est clair que quelque chose
devait être fait’.
Bien que la manipulation
de marché qui eut lieu lors de la vente des réserves d’or
était loin d’être aussi illégale que
l’affaire Barclays, l’atmosphère dans laquelle les choses
furent mises en place étaient pour le moins identiques.
Le krach ayant fait son
apparition en 2007 et qui dure encore aujourd’hui n’est que le
résultat d’une abdication de ses responsabilités par le
secteur financier.
Toute
responsabilité est fuie de ceux qui devraient la porter sur leurs
épaules. La panique sur l’or de 1999 a été prise
en charge en très grande partie par le public Britannique. Les
politiciens auraient alors dû se rendre compte, après que le
fait ait été établi aux yeux de tous que les banques ne
sont autres que des créatrices d’obligations publiques, que
certaines contraintes structurelles devraient leur être
imposées.
Ceci aurait pu leur
permettre de contenir les joueurs ayant participé au boom du
marché du crédit dans les années 2000. Il semblerait
malheureusement que personne n’ait compris la leçon.
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