Nous avons
fréquemment eu l'occasion dans ces colonnes de signaler les effets
néfastes d'une fiscalité trop lourde, en ce qu'elle incite soit
à l'exil, soit au moindre effort.
Gérard Depardieu,
prenant la suite de nombreux entrepreneurs, sportifs et artistes, a donc
décidé de quitter la France, et ce faisant, se voit
insulté et calomnié par le gouvernement, par de nombreux
journalistes, et par certains de ses collègues engagés et courageux
(le plus vulgaire étant sans doute le petit VRP du socialisme
arrogant, Philippe Torreton).
Il s'agit d'un
véritable retournement moral où le voleur est celui qui refuse
d'être volé.
Avec
Gérard Depardieu, l'Histoire nous offre un exemple particulièrement
intéressant. Comme il le signalait dans sa lettre ouverte à
Jean-Marc Ayrault, il estime avoir versé 145 millions d'euros
d'impôts depuis le début de sa carrière. Il a en
réalité rapporté bien plus aux caisses de
l’État. En devenant l'acteur français le plus
célèbre à l'étranger (avec 170 films), il a
contribué au rayonnement et à la rentabilité du
cinéma et de la culture française dans le monde entier.
Comédien
exceptionnel, il aurait pu, dès le succès d'un Cyrano de
Bergerac, aller se planquer en Californie pour siroter des piña coladas à
Palm Springs (comme Omar Sy ou Dany Boon, qui n'ont
étonnamment pas ému le Premier ministre de François
Hollande).
Mais non,
amoureux de la France et de ses terroirs, le plus costaud des Gaulois a
décidé d'investir son argent dans l'économie
française, en achetant des vignes, des restaurants, et en faisant
travailler quatre-vingt personnes dans les entreprises qu'il a
créées. Amoureux du patrimoine architectural français, il
a également acheté et entretenu un grand nombre de
propriétés dont le château de Tigné
dans le Val de Loire, ou le splendide hôtel particulier du 95 rue du
cherche midi à Paris. Faisant appel aux architectes locaux, il a fait
construire une villa sur les hauteurs de Trouville, et a intégralement
réhabilité son hôtel particulier.
Mais il semble
que ces preuves de l'attachement à la France, et ce goût de
mettre son argent au service de la création de richesse, d'emplois, et
de produits du terroir ne suffisent pas à inspirer un peu
d'humilité et d'autocritique à la meute politique. Non,
l'acteur-entrepreneur est un égoïste gras et minable, qui a la
mesquinerie de vouloir profiter des fruits de son travail.
Cette
« polémique » est en réalité d'une
très grande portée. Le lynchage politico-médiatique que
subit le comédien depuis quelques jours a un peu le goût d'un
apéritif amer préparant la décision toute
soviétique d'empêcher tout simplement les gens de partir (en
général, une fois la porte fermée, ceux qui continuent
à vouloir gagner ce qu'ils gagnent ou penser ce qu'ils pensent,
finissent dans des camps, à Mourmansk).
Dieu
bénisse le Royaume de Belgique, qui garde le bon sens de ne pas faire
fuir les talents et la richesse. La France de
« lui-Président », elle, préfère
garder au chaud les artistes qui font la queue au guichet des intermittents
du spectacle en crachant sur le système.
Que les
Ardennes lui soient douces. Et voici pour finir, les derniers alexandrins
très à propos de Cyrano.
Que dites-vous
?... C'est inutile ?... Je le sais !
Mais on ne se
bat pas dans l'espoir du succès !
Non ! non,
c'est bien plus beau lorsque c'est inutile !
Qu'est-ce que
c'est que tous ceux-là !- Vous êtes mille ?
Ah ! je vous
reconnais, tous mes vieux ennemis !
Le Mensonge ?
[Il frappe de
son épée le vide.]
Tiens, tiens !
-Ha ! ha ! les Compromis,
Les
Préjugés, les Lâchetés !...
[Il frappe.]
Que je pactise
?
Jamais, jamais
! -Ah ! te voilà, toi, la Sottise !
Je sais bien
qu'à la fin vous me mettrez à bas ;
N'importe : je
me bats ! je me bats ! je me bats !
[Il fait des
moulinets immenses et s'arrête haletant.]
Oui, vous
m'arrachez tout, le laurier et la rose !
Arrachez ! Il
y a malgré vous quelque chose
Que j'emporte,
et ce soir, quand j'entrerai chez Dieu,
Mon salut
balaiera largement le seuil bleu,
Quelque chose
que sans un pli, sans une tache,
J'emporte
malgré vous,
[Il
s'élance l'épée haute.]
et c'est...
[L'épée
s'échappe de ses mains, il chancelle, tombe dans les bras de Le Bret
et de Ragueneau.]
ROXANE, [se
penchant sur lui et lui baisant le front]
C'est ?...
CYRANO,
[rouvre les yeux, la reconnaît et dit en souriant]
Mon panache.
RIDEAU
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