Vous avez tous certainement
entendu parler des taxes sur l’importation d’or et d’argent imposées en Inde
à la demande de la banque centrale du pays.
La banque centrale a récemment
annoncé, et pour la troisième fois depuis le début de l’année, une nouvelle
hausse des taxes d’importations sur les métaux précieux. L’or et l’argent
font désormais l’objet d’une taxe d’importation de 10% supplémentaires. La
prime sur le prix de l’or devrait atteindre plus de 100 dollars par rapport
au prix de Londres.
Nous savons tous que cette
décision n’a pour but que de diminuer l’actuel déficit du compte courant de
l’Inde. Après le pétrole brut, l’or est la deuxième ressource la plus
importée par le pays.
Il est intéressant de se
pencher sur l’efficacité de ces mesures. Elles n’ont pas seulement impacté
les importations, particulièrement après l’annonce des restrictions
import/export de 80 %, mais elles ont des conséquences bien plus profondes.
Une hausse du chômage
On estime à près de deux
millions le nombre d’artisans impliqués dans l’industrie de la bijouterie.
All India Trade Gems
& Jewellery Trade Federation
représente 300.000 bijoutiers et revendeurs de métal.
Selon les rapports que vous
lisez, on estime entre 500.000 et un million les membres de l’industrie
susceptibles de perdre leur emploi en conséquence de ces restrictions.
Compte tenu des quantités d’or
susceptibles d’entrer le pays illégalement, un grand nombre de professionnels
pourraient se retrouver sans emploi. Les personnes impliquées sur le marché
de l’import/export sont susceptibles de souffrir des questions relatives à
l’origine de leur or que pourraient leur poser les autorités.
Une contrebande colossale
Entre les mois d’avril et juin
de cette année, les saisies d’or importé illégalement ont augmenté de
365% ; et l’or saisi s’est élevé à 598 millions de roupies (9,7 millions
de dollars). A lui seul, l’aéroport de Mumbai
représente 93 millions de roupies. Le marché noir Indien de l’or représente
plus que l’industrie narcotique du pays.
Les officiels estiment que
pour chaque kilo d’or saisi, 10 à 15 kilos d’or parviennent à entrer dans le
pays. Les statistiques ne devraient qu’augmenter à mesure qu’approche la
saison des festivals.
Les services douaniers ont
récemment reporté que les travailleurs les plus pauvres du Proche-Orient sont
recrutés par des bandes organisées pour passer de l’or aux frontières. Pour
leur tâche, ils ne reçoivent que quelques milliers de roupies et un billet
retour vers chez eux.
Mais ce ne sont pas que les
pauvres qui ressentent l’urgence de passer de l’or aux travers de la
frontière Indienne. Le directeur d’une firme bijoutière de Singapour a été
arrêté il y a quelques semaines pour avoir tenté de faire passer de l’or en
contrebande dans ses sous-vêtements.
Et il ne s’agit pas que d’or
caché sur des passagers. Une route maritime entre le nord du Sri-Lanka et la région Indienne du Tamil Nadu Nagapattinam sert de point
d’entrée pour de l’or venu du Proche-Orient au travers du Sri-lanka.
Le mois dernier, quatre associés travaillant pour un service de blanchiment
d’argent ont été interpelés alors qu’ils tentaient d’entrer 200 barres d’or
en inde sur leur bateau de pêche.
Nos amis amoureux de l’or se font pincer
Nous pouvons lire, dans
d’intéressants articles de Reuters et de Paul Ploumis,
que les pays voisins de l’Inde tentent d’en apaiser la demande.
Le Pakistan, le Sri-Lanka et le Népal ont tous trois enregistrés une
hausse significative de leurs importations en or au cours de ces derniers
mois. Je suppose que c’est dû en partie à la baisse du prix de l’or et que
des pays comme la Chine se jettent sur cette opportunité pour accumuler plus
de métal.
En revanche, comme je l’ai
mentionné plus haut, il est clair que cette hausse des importations est liée
à la demande en or clandestin de l’Inde.
Les trois pays disposent de
restrictions d’importation moindres que celles de l’Inde. Ces derniers mois,
des rapports d’importation clandestine d’or ont été publiés mentionnant les
trois pays.
Voilà plus de douze ans que
les importations d’or ne sont plus taxées au Pakistan. Et pourtant, les
importations du pays ont augmenté de 386% au cours de la première moitié de
l’année. Le gouvernement Pakistanais a récemment imposé une interdiction
d’importations sur un mois. Cette hausse a été attribuée à la demande en
importations illégale de la part de l’Inde. Le Comité de Coopération
Economique du Pakistan faisait récemment mention d’une utilisation ‘peu
scrupuleuse’ de l’or importé.
Au cours du premier trimestre
de 2013, le Sri-Lanka a vu ses importations d’or
augmenter de 46%. En avril, elles s’élevaient à 50 millions de dollars. A la
suite d’une hausse des arrestations pour contrebande, le gouvernement
Sri-Lankais a imposé une taxe de 10% sur l’importation d’or dans l’espoir de
mettre un terme à l’opportunité d’arbitrage. ‘Nous avons découvert des fuites
et faisons de notre mieux pour les neutraliser’, indiquait un officiel lors
d’un entretien avec Reuters.
Au Népal, les taxes sur
l’importation d’or ont augmenté de 20% et sont passées de 3000 à 3600 roupies
pour 10 grammes d’or. Cette décision fait suite à la saisie de 35 kilos de
barres d’or en provenance de la Chine et à destination de l’Inde.
Où déposer son capital ?
Le combat contre l’or et
l’argent n’est en rien un combat contre l’importation, mais un conflit entre
les devises. Les autorités Indiennes veulent que leurs citoyens conservent
leurs roupies, mais les épargnants ont besoin de quelque chose qui soit
capable de conserver sa valeur. La roupie continue d’être dépréciée, c’est
pourquoi ils se tournent vers l’or.
Malgré les efforts du
gouvernement, les épargnants refusent encore d’avoir recours à des comptes
épargne. Un récent article publié par le Times suggère que sur les 100
millions de comptes ouverts au cours de cette dernière décennie, une majorité
demeure non-utilisée.
Il sera intéressant de voir
vers quoi ils se tourneront dans le futur. L’or, l’argent et le platine souffrent
désormais de taxes d’importation de 10%. L’Inde représente 10% de la demande
globale en diamants, mais n’est plus une région dans laquelle investir. L’an
dernier, les diamants souffraient déjà d’une taxe d’importation de 2%.
Ils ne devraient selon moi pas
se tourner vers autre chose que l’or.
Un désir croissant de posséder de l’or
Les officiels espèrent que les
contrôles imposés à l’or finiront par dissuader les Indiens d’investir sur le
métal jaune. Il semble pourtant que la demande ne cesse de gonfler,
contrairement à ce que voudraient les mesures récemment mises en place.
Malgré les restrictions, les importations d’or au mois de juillet s’élevaient
à 2,9 milliards de dollars, contre 2,45 milliards de dollars en juin.
Comme Bhargav
Vaidya, directeur de B.N. Vaidya
& Associates, une société basée à Mumbai
spécialisée dans le conseil de traders, mettait l’accent sur le fait que si
les gens veulent acheter de l’or, ils en achèteront. ‘Nous ne pouvons prêcher
une religion à des hommes qui ont l’estomac vide. Il n’y a actuellement plus
d’or disponible sur le marché officiel. La contrebande ne fera que gonfler,
et j’espère de tout cœur que nous de revivrons pas les jours du Gold Control Act’.
J’ai abordé le Gold Control Act la semaine dernière, qui a été graduellement retiré à
mesure que le gouvernement s’est prouvé incapable de contrôler les activités
illégales touchant à l’or. Puisque nous vivons aujourd’hui dans l’ère
digitale, les individus ont bien plus de facilité à avoir accès à l’or. Le
gouvernement aura aujourd’hui encore plus de difficulté à contrôler les
importations illégales.
Un pays ne peut accumuler plus
de 8000 tonnes d’or privé juste ‘comme ça’. Il le fait parce qu’il n’existe
selon lui pas de meilleure alternative. Ou s’il en existe, elle n’est
certainement pas offerte par le gouvernement.
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