| Au G20 de Saint-Pétersbourg, l’actualité syrienne a bouleversé l’ordre du jour et éclipsé les questions initialement inscrites à l’ordre du jour. L’étude par l’OCDE des mesures destinées à combattre l’optimisation fiscale des entreprises transnationales, grâce à laquelle elles échappent à l’impôt, ou les propositions de régulation du shadow banking du Conseil de stabilité financière (FSB), que l’on retrouvera néanmoins ronflantes dans le communiqué final. Une partie qui se veut décisive se joue pourtant dans ce dernier domaine, avec en ligne de mire le dossier de l’hypothécation (ou nantisssement), cette colonne vertébrale du système financier, avec pour objectif pour les régulateurs de la renforcer. Emprunter à court terme pour prêter à long terme est devenu une activités financières basique (et profitable, tant que tout se passe bien), déployée par les banques dans leur activité d’intermédiation et de spéculation, ainsi que par le secteur non régulé du shadow banking. Afin de maitriser le risque associé, les emprunts sont garantis par des actifs, d’abord cédés puis ensuite repris une fois le prêt remboursé : le collatéral. Ces opérations interviennent sur un gigantesque marché où plusieurs milliers de milliards de dollars de transactions sont enregistrés quotidiennement, appelé marché du « repo » pour repurchase (ré-achat). En diminuer ou non la dimension est aujourd’hui en cause, à la faveur d’une réglementation de l’utilisation du collatéral, qui donne lieu à de très sérieuses passes d’armes dans les coulisses. Côté régulation, deux leviers peuvent être actionnés : accroître la décote des actifs cédés lors de la transaction initiale et restreindre le nombre de fois qu’un même actif peut être réutilisé pour des transactions différentes, le nombre de maillons de la chaîne qui a été constituée. D’après le FMI, ce ratio serait tombé à 2,2 en moyenne après avoir culminé à plus de 3 à la date de l’effondrement de Lehman Brothers. Ce qui revient à dire que 3 créanciers peuvent réclamer le même actif, ce que l’on a vu lors de la chute de la banque. Du côté des acteurs du marché, on agite le spectre d’une pénurie de collatéral, qui est chiffrée à 1.000 milliards de dollars afin de couvrir les appels de marge futurs par l’International swaps and derivatives association (ISDA). Une telle pénurie aboutirait à restreindre le nombre de transactions, atteignant la liquidité du marché, est-il mis en garde. Les prime brokers, dont le métier est au sein des banques de financer les hedge funds, n’auraient plus que leurs yeux pour pleurer, toute leur économie chamboulée. Pourtant, on parle de décotes de l’ordre de 4 %, qui restent très modestes au regard des dépréciations qui pourraient intervenir. Avec ce dernier secteur d’activité, on touche à l’un des nœuds de la question. Ou plus exactement au vecteur de transmission d’une crise financière démarrant dans le shadow banking pour être transmise aux banques du secteur régulé. Le gel du marché du « repo » pouvant être assimilé à la panique bancaire des déposants d’hier. Voilà pourquoi le FSB en vient également à vouloir réguler les hedge funds impliqués dans ce type de transaction en leur imposant à leur tour des normes de liquidité (un coussin d’actifs pouvant être facilement cédés sur le marché). Comment décontracter le problème ? En n’imposant pas de décote trop importante ou un nombre trop restreint de maillons aux chaînes de collatéral. D’autres interventions plus discrètes des banques centrales peuvent aussi y contribuer, en abaissant le niveau de qualité des actifs qu’elles prennent en garantie, en contrepartie de leurs prêts aux établissements ayant accès à leurs guichets. En drainant les liquidités sur le marché, comme elles prétendent pouvoir le faire mais pour l’instant s’en gardent, elles céderaient également à ces mêmes établissements les actifs dont ils se sont dessaisis, qu’ils pourraient utiliser pour d’autres besoins. Une fois de plus dans l’obligation de passer des compromis avec l’industrie financière, les régulateurs vont trembler des mains lorsqu’il faudra décider et que le dossier sera descendu à l’échelle nationale (ou régionale pour la zone euro). Lorsqu’il s’agit de restreindre la taille du système financier, que ce soit indirectement en renforçant le marché du « repo » ou plus franchement en restructurant la dette, les piques se dressent et les hommes politiques imaginent vite leurs têtes y être plantées… Et pourtant ! | |