En Ukraine, la situation a
pris de l’ampleur ce week-end et menace désormais d’exploser. Le gouvernement
de Kiev prévoit d’envoyer des troupes « anti-terroristes » dans les
villes de l’est du pays où des citoyens d’origine russe occupent des infrastructures.
En Europe, nous avions autrefois diables et sorcières. Aujourd’hui, grâce aux
Etats-Unis, nous avons maintenant des « terroristes ». Bien que la
guerre civile imminente puisse s’avérer très coûteuse pour l’Ukraine, elle
pose deux questions essentielles : 1. La crise ukrainienne
regarde-t-elle qui que ce soit à l’extérieur de la région?, et 2.
Regarde-t-elle les Etats-Unis?
Ceux qui se tiennent en ligne
de touche et que la situation ne regarde en rien (comme le New York Times)
font toute une histoire des 40.000 soldats russes déployés le long de la
frontière ukrainienne. Et alors? Ce n’est pas beaucoup plus que les 33.000
soldats américains déployés en Afghanistan dans le
cadre du projet actuel de « reconstruction » des Etats-Unis. Et la
balance commence sérieusement à pencher du côté des Etats-Unis une fois que
sont comptabilisés les 3.000 soldats américains stationnés dans l’ancienne
république soviétique du Kirghizistan et les 15.000 soldats postés au Koweït
et au Bahreïn. Je ne souviens pas avoir entendu un seul Russe se plaindre des
activités militaires que mènent les Etats-Unis dans leur région du monde
depuis dix ans.
Il semblerait au moins que
quelqu’un ait finalement enfoncé un pain aux raisins dans le gosier de John
Kerry la semaine dernière. La perruque ambulante à la recherche d’un cerveau
enfin cessé de faire des promesses ridicules au gouvernement de Kiev promu
par les Etats-Unis et l’Europe. Et le président Obama a cessé d’inscrire des
phrases à s’en rouler par terre dans le sable. Je suppose que s’ils
recommençaient à battre ce tambour, ils pourraient bel et bien déclencher des
révoltes dans leur propre pays. Tout le monde n’est pas scotché devant Kardashian Channel, le bras enfoncé jusqu’au coude dans
un paquet de Curlys. Et tous les soldats de retour
de nations musulmanes (j’entends par là ceux qui ne se sont pas suicidés)
n’ont pas un avis aussi optimiste de la situation sur le terrain.
Barack Obama, pour qui j’ai
voté deux fois, est en passe de devenir le pire président que j’ai pu voir de
toute ma vie – et peut-être même depuis le début de la République. Je n’ai
pas envie de trop dévier de mon sujet aujourd’hui, mais n’est-il pas ridicule
que le Département de la justice n’ait commencé à s’intéresser au trading à haute-fréquence de Wall Street qu’après
l’apparition de Michael Lewis dans 60 Minutes la semaine dernière ?
Comme s’il n’avait jamais auparavant entendu parler de cette orgie qui dure
maintenant depuis des années. Je me sentirais certainement plus confortable
si Vladimir Poutine décidait d’amasser ses troupes le long de la frontière
des Etats-Unis avec le Mexique pour protéger les américains de leur propre
gouvernement.
Revenons-en à l’Ukraine.
Certaines choses ne sont-elles pas évidentes ? Les Russes ont un intérêt
plus grand d’empêcher le chaos de s’y développer que les Etats-Unis de
déterminer les frontières provisionnelles du pays et de discuter la
composition de son gouvernement. Tout au long du XXe siècle, l’Ukraine a
essentiellement été une puissance russe. Et avant ça, elle était la pupille
de bien des royaumes européens. La Russie a beaucoup investi sur les
pipelines qui traversent l’Ukraine et dont dépendent ses revenus nationaux,
sans parler du confort hivernal de nombreuses nations de l’Europe de l’est.
D’où mon plaidoyer : les
partis américains (dont les « progressistes » d’Obama) vont-ils un
jour cesser d’encourager une épreuve de force sur le seuil d’une nation de
l’autre bout du monde dont le destin n’a rien à voir avec celui du peuple de
l’Ohio, du Nebraska, du Rhode Island ou de
n’importe quel autre des 50 Etats ? Nous avons assez à faire au sein de
notre propre pays pour nous ajuster aux nouvelles réalités du déclin de
l’économie turbo-industrielle – et auquel nous ne prêtons d’ailleurs aucune
attention. Nos débats politiques domestiques sont juvéniles et
absurdes. Je préfèrerai voir des troupes américaines détruire des
magasins WalMart, qui ont fait bien plus pour
détruire l’économie des Etats-Unis (et la vie de ses citoyens) que les
bandits d’un trou à rats d’Asie centrale. Je préfèrerai voir les Etats-Unis
dépenser ce qui leur reste de capital à restaurer leurs chemins de fer plutôt
qu’à rembourser les dettes d’étrangers du bout du monde.
Pour la scène politique
américaine, la situation commence à ressembler au Vietnam. Où se cachent les Fullbrights et les Bobby Kennedys
de notre temps, qui auront le courage de rassembler le peuple face au
gouvernement ? Quels officiels élus parmi les frères Koch pourris et les
vagabonds de Wall Street lèveront la voix pour des principes basés sur la
réalité ? Quand les jeunes décideront-ils de lâcher leur iPhone et de
regarder ce qu’il se passe autour d’eux ? Quand les Etats-Unis
commenceront-ils à prendre la situation en main ?