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Saint Thomas
d’Aquin (1225-1274), est un théologien et philosophe, italien
d’origine, ayant appartenu à l’ordre des Dominicains. Il
est considéré comme l’un des principaux maîtres de
la théologie catholique. Par ailleurs, toute son œuvre
coïncide avec la redécouverte des œuvres d'Aristote par
l'Occident médiéval. C’est pourquoi, si pour Thomas la
philosophie reste servante de la théologie, elle est bien autonome
dans sa méthode. Elle est toute entière fondée sur la
rationalité, c’est-à-dire sur l’argumentation
logique.
Surnommé
par ses pairs le « docteur angélique », Thomas est
né en 1227 en Sicile, au château de Rocca-Secca, de la famille
des comtes d’Aquin. Devenu dominicain dès 1243, il est
élève d’Albert le Grand à Paris de 1243 à
1248, puis à Cologne. De 1252 à 1259, il s’installe
à l’Université de Paris, où il devient
maître en 1257.
De 1259
à 1268, il séjourne en Italie auprès du dominicain
helléniste Guillaume de Moerbeke qui traduit Aristote du grec au
latin. C’est là qu’il écrit de nombreux
commentaires d’Aristote (Logique, Physique, Métaphysique,
Éthique, De l’âme, Météores, Du ciel I
à III, De la génération, Politique I à IV). Mais
la défense d’Aristote est mal vue par certains augustiniens,
disciples de Platon, qui veulent le faire condamner comme
hérétique. Thomas d’Aquin les combattra sans
relâche par sa plume. Il écrit également la Somme
contre les Gentils (les gentils sont les non-chrétiens) en 1260,
et commence en 1265 la célèbre Somme Théologique qu’il
poursuit, sans l’achever, jusqu’en 1273.
Chef-d’œuvre
du XIIIe siècle, sorte de cathédrale gothique intellectuelle,
la Somme théologique est une vaste synthèse des grands
principes de la foi et un essai de conciliation de la philosophie
d’Aristote et de la théologie chrétienne. En effet, le recours
à la raison
est tenu pour indispensable, même en matière théologale. La Somme Théologique est
divisée en trois parties (prima pars, secunda pars, tertia
pars) chacune étant elle-même subdivisée en
sous-parties. Chaque sous-partie est une suite de questions
séparées en articles. Chaque article est rédigé
selon un schéma bien défini : les arguments contre la
thèse (objections), la thèse elle-même, les arguments
pour la thèse, puis la réponse aux objections.
De 1268
à 1272, il enseigne de nouveau à Paris. Il écrit des
œuvres polémiques, et met par écrit ses prises de
positions sur des questions disputées diverses. Il quitte Paris pour
Naples en 1272 et meurt en 1274 en se rendant au concile de Lyon. Il sera
proclamé docteur de l’Église en 1567 et sa doctrine sera
déclarée doctrine officielle de l’Église
catholique par le pape Léon XIII en 1879.
L’anthropologie
Nombre
de notions abordées par Thomas pourraient figurer dans n’importe
quel manuel de philosophie. C’est toujours de l’homme dont il est
question, dans son rapport à la nature, aux autres et à Dieu.
Il
distingue ainsi deux types de créatures : les créatures
rationnelles et et les créatures non rationnelles. Contrairement aux
animaux, l'homme a non seulement le pouvoir de produire son action par
lui-même mais aussi de la diriger selon sa propre volonté,
échappant ainsi au déterminisme. Sous cet aspect, les hommes
sont des êtres de liberté, responsables de leurs actes. Du fait
de cette dignité particulière qui la place au sommet de
l’échelle des êtres, la personne humaine ne peut pas
appartenir toute entière à la communauté politique.
Certes, dit saint Thomas, la personne est ordonnée au bien commun et
donc elle doit s’engager dans la cité, au service des autres,
parce qu’elle est une partie de la cité qui est un tout plus
grand que la partie. Mais la personne ne saurait jamais se réduire au
service de la communauté ou de l’État. Elle existe
également pour elle-même comme un tout. De cela, il
découle que le pouvoir doit être limité et qu’il ne
peut imposer aux hommes des obligations qui seraient illégitimes au
regard de la loi naturelle.
La philosophie du droit
Dans
la Somme théologique, Thomas a écrit un traité
des lois dans lequel il explique qu’il y a trois lois fondamentales. Il
y a d’abord la loi divine, c’est la Révélation.
Dieu se révèle à l’homme pour le guider, pour lui
donner une direction. Puis, il y a la loi naturelle qui est, dit
Thomas, un reflet de la loi divine dans la nature et en particulier dans la
nature humaine.
Cette
loi naturelle se traduit par un certain nombre d’inclinations. Or, si
l’homme perçoit correctement ces inclinations et les suit, il
peut parvenir à l’excellence de sa nature et donc au bonheur.
Pour cela, il a besoin d’une raison et Dieu a donc mis en l’homme
la faculté de connaître le bien et le mal à la
lumière de la loi naturelle. Mais la loi naturelle ne suffit pas parce
que c’est une loi très générale (faire le bien et
éviter le mal). Il reste alors la loi humaine, la loi que les hommes
vont élaborer avec leur raison pour disposer de normes
concrètes d’action en société, c’est le droit
positif.
Mais
les gouvernants ne peuvent s’affranchir de certaines limites. Ils sont
liés par les lois de la nature humaine qui émanent de l'acte de
création de Dieu. Il s'ensuit que les lois positives ne sont
légitimes que si elles dérivent des principes
généraux du droit naturel.
(À
suivre…)
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