L’énergie solaire a su
demeurer la grande nouveauté énergétique depuis la naissance de beaucoup
d’entre nous. Mais elle a toujours été trop coûteuse pour devenir plus qu’une
technologie à créneau, attrayante plus pour son côté « cool » que
pour son efficacité. Mais les choses ont désormais changé.
Selon un rapport publié par Deutsch
Bank, la génération d’électricité à partir de la lumière solaire est
devenue dans une majorité d’Etats américains moins chère que l’énergie
dérivée du charbon, une fois les subventions prises en compte. Et au rythme
auquel le prix de l’énergie solaire baisse aujourd’hui, il n’y aura bientôt
plus besoin de subventions.
Alors l’écluse sera ouverte.
Tous les propriétaires de la sunbelt des Etats-Unis et de toutes les autres
régions chaudes du monde installeront des panneaux solaires sur leur toit et regarderont
avec contentement leur compteur avancer au ralenti. Selon un récent rapport
publié par l’Agence
internationale de l'énergie, d’ici à 2050, la part de l’énergie solaire
dans la production globale d’électricité devrait passer de 1 à 27%, et
devenir la source d’énergie principale de l’humanité.
Une bonne nouvelle pour les
changements climatiques, la qualité de l’air et l’ouest de la Virginie (qui
n’aura finalement pas à étêter toutes ses montagnes pour obtenir suffisamment
de charbon). Mais qu’en est-il de l’argent ? Chaque panneau solaire
traditionnel fabriqué en silicium cristallin est composé d’une petite
quantité de pâte d’argent, qui conduit l’électricité hors des cellules
solaires. La réduction de la quantité d’argent utilisée dans la fabrication
de panneaux solaires a fait partie de la liste de récentes mesures prises par
l’industrie pour réduire ses coûts. Certaines alternatives ont été
découvertes, mais aucune d’entre elles n’a pour l’instant été développée en
raison du prix très faible de l’argent. Cette aire de recherche est également
passée en second plan, derrière d’autres projets plus immédiats comme
l’amélioration de l’efficacité des panneaux solaires et la réduction de leur
coût d’installation.
L’argent ne devrait donc pas
être supplanté par la génération actuelle de panneaux solaires, ce qui
signifie que la demande de l’industrie solaire devrait augmenter en parallèle
aux installations. Voici comment un récent article du magazine Forbes
présente la question :
Approximativement vingt
grammes d’argent sont utilisés dans la fabrication de chaque panneau solaire
en silicium cristallin, qui représentent 85% du marché. Environ 80 tonnes d’argent,
ou approximativement 2,8 millions d’onces d’argent, sont nécessaires à la
génération d’un gigawatt d’énergie solaire.
Evolution de la capacité de
production d’énergie solaire
La capacité de production
d’énergie solaire globale était de 139 GW à la fin de l’année 2013, contre
1,3 GW en 2000. L’Europe a été la principale responsable de cette croissance,
et notamment l’Allemagne, dont les politiques gouvernementales favorables ont
facilité le développement du secteur de l’énergie renouvelable. En 2010,
l’Europe représentait 75% de la capacité de production d’énergie solaire
mondiale. En revanche, les nouvelles installations devraient ralentir en
Europe en raison de la diminution actuelle du nombre d’initiatives favorables
à l’énergie photovoltaïque, notamment en Allemagne.
La croissance du secteur
photovoltaïque devrait bientôt être alimentée principalement par la Chine. La
Chine tente en effet aujourd’hui de réduire sa dépendance au charbon en tant
que source d’énergie. Le pays espère pouvoir développer une capacité de
production d’énergie solaire de 70 GW d’ici à 2017, contre 18,6 GW en 2013.
Selon les estimations de
l’Association européenne pour l’industrie photovoltaïque, d’ici à 2018, la
capacité de production globale d’énergie solaire devrait atteindre 430 GW
selon les scénarios les plus optimistes, et 321 GW selon les scénarios les
plus pessimistes. Une capacité de 375 GW représenterait une hausse annuelle
de 22% depuis les 139 GW enregistrés en 2013.
La demande en argent de
l’industrie photovoltaïque
En estimant que, d’ici ces
cinq prochaines années, les panneaux photovoltaïques en silicium
cristallin continuent de représenter environ 85% du marché, ils
représenteront alors 38 GW de la capacité installée en 2014, et 46 GW de la
capacité installée en 2018.
En prenant en compte le fait
que 2,8 millions d’onces d’argent sont nécessaires à la génération d’un GW
d’énergie solaire, la demande en argent se traduirait par environ 106
millions d’onces en 2014, et 151 millions d’onces en 2018. Pour mettre ces
chiffres en perspective, la production minière globale d’argent devrait être
respectivement de 800 millions et 750 millions d’onces en 2014 et 2018. Si le
marché était équilibré et que l’offre correspondait à la demande, la demande
en argent de l’industrie photovoltaïque passerait de 10% de la demande
globale en 2014 à 15% en 2018.
Et ces données pourraient être
sous-estimées. La formule ci-dessus prend en compte le déclin de la
production minière mais, autre effet de la baisse du prix de l’argent sous les
coûts actuels d’extraction minière, ce déclin pourrait être bien plus
important. Voici ce qu’en dit l’analyste Andy Hoffman :
Nous voici
aujourd’hui face au dénouement de l’attaque la plus vicieuse qui ait été
portée au marché papier des métaux précieux depuis 2008. L’or et l’argent ont
tous deux vu leur prix passer sous leur coût d’extraction, et selon mes plus
récentes estimations, une baisse de plus de 25% de la production globale de
métaux précieux est désormais bien plus imminente qu’elle n’est inévitable.
Combinez la hausse de la
demande à la baisse du niveau de production, et il devient vite possible que
les panneaux solaires représentent 20% de la demande en argent disponible en
2018 (contre virtuellement zéro pourcent il y a dix ans). Et cette tendance
ne s’apaisera pas avant qu’une hausse du prix de l’argent ne vienne en
stimuler la production et réduire la part de l’énergie solaire dans la
demande globale.