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Cours Or & Argent

Bienvenue dans le monde des zombies des taux zéro

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Publié le 15 novembre 2015
1135 mots - Temps de lecture : 2 - 4 minutes
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Aux Etats-Unis, en Europe et au Royaume-Uni, les taux d’intérêt ont été réduits jusqu’à tomber très proches de zéro suite à l’effondrement de Lehman, il y a près de sept ans.

Initialement, les politiques de taux zéro devaient être une mesure temporaire destinée à combattre la déflation des prix à la suite de la crise. Mais depuis qu’elles ont été mises en place, les taux d’intérêts sont restés supprimés et rattachés à zéro. Beaucoup espéraient que le stimulus des taux d’intérêt zéro puisse garantir une reprise économique. En ce sens, ils sont une politique échouée, et les faibles rendements d’obligations qui en sont nés n’ont fait qu’encourager l’expansion rapide de la dette gouvernementale.

Il est clair que les politiques monétaires des banques centrales sont au cœur du problème. Plutôt que de stimuler la reprise, elles ont détruit le mécanisme par lequel l’épargne est transformée en capital pour favoriser la production. Elles ont donné vie au rêve de Keynes, exprimé dans sa Théorie générale lorsqu’il écrit « avoir hâte d’être témoin de l’euthanasie des rentiers », dont la fonction de financement des entrepreneurs devrait pétré remplacée par l’Etat : les entrepreneurs « sont si amoureux de leur art que leur travail pourrait être obtenu pour bien moins qu’il ne coûte aujourd’hui ». [1]

Plutôt que d’accumuler le fruit de son labeur sous forme de dépôts bancaires disponibles au financement des entrepreneurs, l’épargnant est découragé, forcé à spéculer pour générer des gains de capital. En ce sens, les politiques de taux zéro sont le dernier point de l’idéal de Keynes.

L’erreur serait d’adhérer à l’idée que les taux d’intérêt sont usuriers et ne bénéficient qu’aux riches, une idée qui semble avoir été adoptée par Keynes. Ce que Keynes n’a pas pu percevoir, c’est que les taux d’intérêt sont l’expression d’une préférence temporelle, une compensation monétaire rendue disponible aujourd’hui contre des rendements futurs. Si vous tentez de faire disparaître les taux d’intérêt, alors la fonction vitale de distribution de l’épargne dans l’intérêt du progrès ne peut que disparaître aussi. Une économie à taux zéro ne peut que joindre les rangs des morts-vivants.

Von Mises l’a reconnu en 1909 en écrivant que « la chute de la valeur d’une monnaie va main dans la main avec la hausse des taux d’intérêt, et la hausse de la valeur d’une monnaie main dans la main avec la baisse des taux d’intérêt. C’est un phénomène qui dure aussi longtemps que se poursuit la valeur d’échange. Lorsque celle-ci prend fin, le taux d’intérêt est rétabli au niveau déterminé par la situation économique ». [2]

En plus de dire que l’analyse de Mises a été indépendamment confirmée par le paradoxe de Gibson, il pourrait être utile de la reprendre en des termes plus simples. L’Histoire nous a montré qu’un emprunteur, au sein d’une économie saine et stable, paierait environ 3% d’intérêts. Si les prix grimpent, sa marge augmente, et il doit se préparer à payer plus pour pouvoir générer des profits. Mais si les prix baissent, il ne peut que se permettre de payer moins, ce qui restreint ses activités futures à celles qu’il est capable de financier à partir de ses propres ressources. C’est la demande sur le marché libre qui détermine les taux d’intérêt, et non les prêteurs usuriers de Keynes.

L’idée est que la suppression des taux d’intérêt rend l’emprunt profitable, mais ce n’est pas ainsi que la perçoivent les producteurs. Les bénéfices marginaux de l’emprunt supplémentaire doivent excéder le coût d’investissement en production pour être profitables. Une entreprise dont les bilans se portent bien tend à améliorer ses produits existants en réinvestissant ses propres réserves sans avoir recours à des fonds externes. Le recours à des fonds externes implique la production d’un produit matériellement différent, ou une expansion significative de la capacité de production ; une étape risquée qui demande des dépenses plus importantes de capital, et qui ne doit avoir lieu que lorsque les perspectives économiques sont justes.

C’est cet engagement de capital qui manque aujourd’hui, malgré une période de stimulus monétaire prolongé. Les banquiers centraux sont conscients de leur échec, qui n’a fait que pousser les gouvernements vers une trappe toujours plus profonde de la dette. C’est pourquoi la Banque des règlements internationaux a annoncé publiquement ses inquiétudes, et la raison pour laquelle la Fed et la Banque d’Angleterre ont exprimé leur désir de retourner vers une normalité des taux d’intérêt. Ce sera extrêmement difficile à faire. Mais imaginons que les taux grimpent. Que se passera-t-il ensuite ?

Une hausse des taux d’intérêt jusqu’à plus de 1 ou 2% sera accompagnée par une hausse des prix des marchandises : c’est ce que nous explique le paradoxe de Gibson, et ce qui se développera alors que l’argent des spéculateurs fuira les actifs financiers et que seront ouvertes des positions à découvert sur les marchandises.

Les entreprises verront se produire deux choses. Bien évidemment, les obligations, les actions et les biens immobiliers verront leur prix baisser à mesure que les taux grimperont, et les perspectives des entreprises s’en trouveront réduites. En revanche, face à la hausse des prix des marchandises et des produits au gros, qui reflètera la baisse du pouvoir d’achat de la monnaie, les entreprises devront se préparer à verser plus aux rentiers de Keynes. C’est la base du paradoxe de Gibson.

Non pas qu’elle soit largement comprise : les théories macroéconomiques ont échoué, et personne ne semble savoir pourquoi. Tout le monde veut faire marche arrière, et tout le monde a peur des conséquences. La normalisation des taux d’intérêt pourrait générer un effondrement du marché boursier, au risque de déclencher une avalanche de banqueroutes d’entreprises surendettées et de rendre intenables les finances gouvernementales. Une hausse des taux risque de déclencher une seconde crise financière qui fera plonger les devises et grimper l’inflation. Alors que les théories macroéconomiques peuvent être critiquées sur la base de leurs conséquences, il ne fait aucun doute que la menace systémique représentée par la tendance de hausse des taux est bel et bien réelle.

C’est une situation qui demande une inaction justifiée par l’espoir. Après tout, avec des taux des fonds fédéraux de 0,25% et 2,6 trillions de dollars de fonds des banques commerciales déjà inclus dans les dépôts de la Fed, même une légère hausse des taux pourrait faire disparaître beaucoup d’argent du système bancaire américain, et déclencher une contraction du prêt bancaire.

Les banquiers centraux commencent à réaliser à quoi font face leurs confrères japonais, qui après vingt-cinq ans de taux zéro ne rencontrent toujours aucun succès. Bienvenue dans le monde de Keynes, dans le monde de l’euthanasie des épargnants et du financement sponsorisé par le gouvernement. Bienvenue dans le monde des zombies des taux zéro.

[1] Keynes: Théorie générale de l’emploi et de la monnaie, chapitre 24, section 2
[2] Voir Von Mises, Théorie de la monnaie et du crédit

 

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"Les banquiers centraux commencent à réaliser à quoi font face leurs confrères japonais, qui après vingt-cinq ans de taux zéro ne rencontrent toujours aucun succès."

Je veux bien, mais un quart de siècle après il n'y a toujours pas d'effondrement au Japon. Donc, la planche billet, peut continuer à tourner très, très longtemps.
Les japonais, surtout les vieux, sont très fidèles à leur gouvernement et achètent ses obligation pourries sans y réfléchir. Comme l'exercice d'un devoir national.
Mais combien de temps cela peut-il durer ? Personne ne le sait. Mais plus dure sera la chute.
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